Repas dégustation à la Maison des Compagnons de Dambach - Edition 2017

Après une première expérience mémorable en 2015, c’est avec une grande impatience que j’attendais cette nouvelle édition de cette rencontre gastronomique orchestrée par un chef cuisinier et un vigneron pour créer et réaliser d’exceptionnels accords gustatifs.
Dans le cadre chaleureux et chargé d’histoire de la Maison des Compagnons de Dambach, Gérard Praud, chef cuisinier au Château de Pleujouse, au piano et Florian Beck-Hartweg, vigneron talentueux de Dambach, à la flûte alsacienne vont conjuguer leurs talents pour nous gratifier d’un très beau récital gastronomique.

A peine remis de mes émotions après le dîner Zind-Humbrecht à La Taverne Alsacienne, me voilà reparti pour une nouvelle expérience gustative dont je sais déjà qu’elle va être exceptionnelle.
Hoppla c’est parti !

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La maison des Compagnons de Dambach, mitoyenne avec la porte d’Ebersheim et sa tour.


Nous arrivons à Dambach avec un bon quart d’heure de retard – en ce moment c’est vraiment la croix et la bannière pour quitter Strasbourg…50 mn pour faire 5 km, au secours ! – mais la soirée vient juste de commencer…ouf !

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Les convives sont installés dans la salle à manger de la maison des Compagnons.

Avant de débuter nos agapes nous avons droit à un petit discours d’accueil du compagnon tailleur de pierre « Strasbourgeois la Sagesse » qui nous présente rapidement l’histoire de l’« Union Compagnonnique » ainsi que son fonctionnement et ses missions.

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Le compagnon « Strasbourgeois la Sagesse »

Florian et Gérard prennent le relais pour nous décrire le déroulement de cette soirée qui va nous permettre de déguster 7 vins du domaine Beck-Hartweg accompagnés d’une série de 10 préparations gourmandes imaginées et réalisées par notre compagnon cuisinier qui a profité du jour de fermeture de son restaurant pour venir faire parler son génie culinaire du côté de Dambach.

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Florian le vigneron et Gérard le compagnon cuisinier « Blinois va sans crainte »

Comme lors de la première édition, le chef Gérard Praud est secondé par une brigade de compagnons (couvreur, ébéniste, tailleur de pierre…) pour dresser et servir les plats préparés dans la cuisine.

Pour nous mettre en condition, Florian nous sert un Auxerrois Vieilles Vignes 2015 : arômes flatteurs de poire au sirop, bouche riche et suave, finale assez puissante mais très digeste, sillage agréable sur le miel de forêt.

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Issus d’une parcelle de vieilles vignes, ces auxerrois récoltés à forte maturité ont permis à Florian de réaliser cette petite friandise qu’on sirote en fermant les yeux pour en apprécier pleinement la sensualité…j’ai déjà oublié le stress de mon voyage de Strasbourg à Dambach !


Granit 2015 : olfaction un peu austère mais grande complexité, notes de résine, de zestes et d’écorce sur un fond « pierreux », matière assez dense, équilibre sec, présence tannique sensible, finale minérale très salivante, sillage fruité sur le pamplemousse.
(Assemblage de riesling, pinot gris et pinot noir)

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Plat 1 : tartare « langoustine, jeune bar », fleur de sel de Guérande, infusion de poivre timut, chair de pamplemousse « fraicheur » et petites biscottes.

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Remarquable par la complexité de ses associations aromatiques, cette première préparation nous emmène directement dans l’univers gustatif de Gérard Praud tout en réussissant à trouver une harmonie très positive avec le vin : le plat stimule le vin en allant « chercher » ses notes d’agrumes tout en affinant sa texture.

Plat 2 : effilochée de daurade royale aux épices de mon choix, pétales de roses, poireau mi-confit, huile vierge d’Espagne et extrait de framboises au paprika.

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Cette assiette étonnante qui nous propose une association originale d’arômes et de textures a été imaginée pour créer une vraie symbiose gustative avec cette cuvée Granit où Gérard Praud a identifié des nuances de rose fanée et de fruits rouges.
Bien évidemment, cette l’harmonie ton sur ton est d’une beauté absolue : le vin de Florian se fait de plus en plus aimable avec une aromatique où se précisent de belles notes de fruits rouges et des sensations salines qui s’intensifient en finale.
Bluffant !!!

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Florian qui évoque probablement le « toucher de bouche » de ses vins…

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…et Gérard qui raconte avec beaucoup d’enthousiasme l’histoire de ses plats et de ses produits.


Tout naturellement 2016 : nez riche avec des notes de fruits jaunes bien mûrs sur un fond « nature » assez discret, matière juteuse qui développe de beaux arômes de raisins frais, petite sensation de sucrosité en milieu de bouche mais salinité intense en finale.
(Assemblage sylvaner et pinot blanc)

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Plat 3 : saumon de fontaine de la Vallée de Soubey « rôti sur peau », baies blanches du Penja, confidant « caviar d’aubergine, poire séchée, galanga » et acidulé de cerfeuil

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(photo aimablement prêtée par Adrien Boii – https://unstrasbourgeoisdanslesvignes.com/)

Cette cuvée encore très jeune m’a d’abord surpris par son côté doux et suave – je n’avais pas eu les mêmes sensations sur les éditions précédentes – mais face à cette préparation qui combinait des textures douces et des arômes épicés, ce vin a réalisé un accord complexe et contrasté : l’harmonie sur le registre de la douceur était évidente mais en finale le vin qui semblait léger à priori a bien montré son caractère en tenant tête sans faillir au puissant sillage poivré du plat.


Pinot Gris Grand Cru Frankstein 2016 : nez discret sur un registre très « terrien », notes de racine, d’écorce et de résine sur un fond sur d’amande amère, bouche pleine et charnue, équilibre sec, mâche gourmande et finale salivante avec de beaux amers minéraux et de fines notes de poivre blanc.

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Plat 4 : bonbons de sole, en marinade, pistaches torréfiées, chorizo « Patta-Negra », airelles et potiron muscat, cuit au four à bois, du château.

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Ce plat qui met en rapport des saveurs délicates, des textures onctueuses et les éléments plus acérées du chorizo et des airelles semblait assez compliqué à marier à priori mais le pinot gris de Florian a réussi à trouver sa place grâce à son caractère bien trempé : le vin se tient droit et soutient le plat sans réellement entamer le dialogue pour réaliser un accord contrasté mais équilibré.


Pinot Noir F 2015 : olfaction assez sombre, notes de graphite, de mûre et d’amande amère, bouche charnue, tanins présents mais bien patinés, texture soyeuse, finale un peu plus serrée qui laisse persister de belles nuances poivrées.

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Plat 5 : dos de cabillaud en « pierre de feu », râpe de muscade, rizotto au lait d’amandes, poivre de Guinée grillé.

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Né sur le coteau du Frankstein, ce pinot noir concentré et tramé par une belle présence minérale s’accorde à merveille avec cette composition très raffinée : le contact avec le cabillaud charnu et moelleux à cœur donne beaucoup de souplesse et de glissant au vin alors que l’accompagnement va chercher ses saveurs épicées très caractéristiques de ce terroir…qui a dit que le rouge ne s’accordait pas avec le poisson !

Plat 6 : médaillon de veau d’Ajoie, confiture de pieds de porc, moelleux de châtaignes fumées, écorce de brioche et vinaigre balsamique de Modène.

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La tranche de veau le confit de pied de porc sont de véritables caresses pour les papilles et le pinot noir qui a eu le temps de s’aérer dans le verre a lissé sa texture pour se fondre dans l’univers gustatif du plat et réaliser un accord tout en douceur…mais en ce qui me concerne, j’ai préféré le couple précédent.


Bungertal 2016 : nez expressif et flatteur associant de belles notes florales et minérales, matière dense, équilibre très sec, texture finement tannique, finale saline avec des amers nobles et persistants.

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Plat 7 : raviole « gourmandise de ris de veau, foie gras cuit au torchon », petite soupe de chanterelles, parfums de chicorée.

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Cette préparation raffinée riche en saveurs nous plonge dans une ambiance très automnale et le vin du Bungertal qui nous présente une version de gewurztraminer plutôt virile apporte un soutien structurel solide au plat tout en conjuguant ses arômes en finale pour laisser persister un sillage végétal désaltérant et appétant.

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Gérard Praud et sa brigade compagnonnique en cuisine…

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…et la suite du repas qui attend la mise sur assiette.

Plat 8 : poitrine de canette de Challans, caramélisée dans son miel de sapin, fruits de la passion, gingembre et purée de pommes de terre à l’anciennne

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Face à ce plat aux arômes puissants à peine adoucis par une sauce moelleuse, le vin nous montre sa force en résistant sans faillir pour créer une harmonie gustative étonnante mais très réussie.


Gewurztraminer Grand Cru Frankstein 2014 : nez assez retenu, palette fruitée et épicée très pure, matière puissante avec un jus riche et une acidité fine et droite, légère sensation de moelleux en milieu de bouche mais finale profondément saline.

Plat 9 : fromage d’alpage Bouderou (Valais, Suisse), poêlée de raisin, pain d’épices et huile de pignons de pain.

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Ce fromage rare né dans les alpages suisses est introuvable en dehors des circuits privés réservés à quelques privilégiés et Gérard Praud nous le propose accompagné de quelques éléments habilement choisis pour communiquer avec ce gewurztraminer Grand Cru…Bingo !!!

Plat 10 : craquelin « framboises et myrtilles », sirop de baies de Tasmanie, tentation « nougata », caramel « after eight », mangue et noisettes.

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Ce super dessert termine en beauté cette véritable symphonie gustative avec un joli jeu de saveurs et de textures mais j’ai trouvé le gewurztraminer de Florian un peu trop sec pour se plaire dans cette ambiance toute en douceur et en suavité.
J’y aurais bien associé un pinot gris Cuvée de l’Ours…mais je suis un incorrigible gourmand !

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Petit « bonus » : les bonbons au chocolat de Thierry Kleiber.

Crées pour l’occasion par le chocolatier Thierry Kleiber, dont le nom de compagnon est « Franc Comtois la Quête du Savoir », ces petits cœurs nous ont offert une dernière belle émotion gourmande. MIAM !


Pour conclure :

Notre compagnon cuisinier qui avait déjà fait des étincelles à Dambach en 2015 a une nouvelle fois fait parler son talent et sa poésie pour nous servir des compositions gustatives sophistiquées mêlant des fruits et des épices rares pour sublimer ses préparations de poissons ou de viandes.
Gérard Praud a littéralement « décortiqué » les expressions aromatiques des vins de Florian pour construire des harmonies gustatives parfaites avec ses plats.
Bravo chef…tu nous as encore gâtés ce soir !

Dégustés dans leur prime jeunesse, les vins du domaine Beck-Hartweg ont montré un potentiel gastronomique extraordinaire : en rencontrant les plats de Gérard Praud ces vins ont donné la pleine mesure de leur complexité aromatique tour en stimulant nos papilles par des textures empreintes d’une intense salinité.
Les cuvées sur granit ont brillé par leur incroyable polyvalence et le surprenant Bungertal a réalisé deux mariages particulièrement intéressants avec des préparations à base de viande…quel régal !

Bravo et merci à tous ceux qui ont œuvré pour nous offrir ce récital gustatif sans fausse note.


PS1 : si vous êtes déçus d’avoir raté cette soirée, vous pouvez toujours vous rattraper en allant goûter les créations de Gérard Praud au Château de Pleujouse.

PS2 : si vous voulez lire un autre avis sur cette soirée, rendez vous sur à Adrien Boi sur son site CLIC.

 

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