Dégustation club AOC - Rieslings de clos alsaciens
La dernière réunion AOC de cette année va nous faire vivre une séance dédiée à deux thèmes un peu étranges – pour ne pas dire tout à fait incongrus – puisqu’on va y déguster des vins génériques venus d’un pays de vins de clos et des vins de clos venus d’un pays de vins de cépage.
Thème 1 : une sélection de 10 cuvées génériques produites par de grandes maisons bourguignonnes
Thème 2 : une sélection de 9 rieslings issus de clos alsaciens réputés.
La série bourguignonne a été composée par Stéphane avec des bouteilles de sa cave et des bouteilles achetées chez un caviste.
La série de rieslings a été constituée par mes soins avec des bouteilles venant de ma cave et de cette de Stéphane et par quelques flacons achetés sur place lors de l’une de mes nombreuses virées dans le vignoble alsacien.
Les pinots noirs ont été débouchés juste avant le service et servis 1 par 1 étiquette découverte.
Les rieslings ont été débouchés juste avant le service et servis 2 par 2 (sauf le premier), étiquette masquée.
Verres Spiegelau Expert
Soirée Club AOC du 14 décembre 2018 à La Wantzenau
En guise de mise en bouche :
Crémant Mémoire de Granit-Extra Brut- 2013 – Domaine Schoenheitz à Wihr au Val : nez très agréable, palette complexe sur les fruits blancs et les fleurs de printemps, matière assez concentrée, équilibre très sec, mousse vive et stimulante, amers minéraux en finale.
Découverte il y a quelques jours lors de la journée « Portes Ouvertes » au domaine Schoenheitz, cette nouvelle cuvée de crémant haut de gamme a passé près de 5 ans sur lattes avant d’être dégorgée et commercialisée en version extra brut.
Pas forcément adaptée à un usage festif cette bulle alsacienne très vineuse possède un vrai caractère de vin de gastronomie.
Thème 2 : et si on ouvrait le débat sur les clos alsaciens avec quelques rieslings ?
Riesling Clos de la Folie Marco 2017 – Domaine Hering à Barr : fruité frais avec une touche muscatée au nez, bouche très légère, acidité souple, finale glissante mais assez courte.
(terroir : marno-calcaire – exposition : est – peu pentu)
Depuis 1962, ce clos situé au cœur de la cité de Barr est exploité par la famille Hering qui y produit une cuvée de sylvaner et une cuvée de riesling.
L’édition 2017 de ce riesling s’exprime avec une belle pureté mais manque un peu de profondeur et de complexité mais ça reste un joli vin d’entrée de gamme, bien travaillé et doté d’un excellent rapport Q/P.
Riesling Clos Saint Landelin 2015 – Domaine Muré à Rouffach : nez dominé par des arômes balsamiques (cire, résine, térébenthine) qui écrasent un peu un fruité délicat qu’il faut chercher longuement dans le verre, matière corpulente et riche avec une texture assez grasse et une présence d’amers qui monopolisent durablement la finale avant de laisser apparaître de belles nuances salines et poivrées.
(terroir : argilo-calcaire très caillouteux sur le Grand Cru Vorbourg – exposition : sud avec terrasses))
Comme lors de la journée « Portes Ouvertes » du domaine Muré, ce riesling 2015 massif et austère a encore un peu malmené nos papilles ce soir…voilà un vin conçu pour la garde qu’il ne faut probablement pas déranger en ce moment.
Riesling Clos Rebberg 2015 – Domaine Kreydenweiss à Andlau : nez expressif et charmeur, notes de fruits blancs et d’ananas frais sur un fond légèrement vanillé, matière généreuse qui enrobe une acidité longue et fine, finale gourmande mais marquée par une belle salinité.
(terroir : schistes de Villé – exposition : sud-est avec terrasses)
Mis en culture par Marc Kreydenweiss, ce terroir ancestral (des schistes de 500 millions d’années) et indemne de toute chimie, a permis à Antoine de produire un riesling qui conjugue opulence et minéralité avec une grande classe. MIAM !
Riesling Grand Cru Rangen-Clos Saint Théobald 2014 – Domaine Schoffit à Colmar : nez mûr et raffiné, notes de citron frais et de pierre à feu, acidité vive qui se positionne dès l’attaque en bouche, matière charnue tramée par une puissante minéralité, finale longue et tonique, sillage aromatique complexe sur les agrumes frais (pamplemousse) et une légère touche fumée.
terroir : volcanique – exposition : sud, très pentu)
Ce clos qui appartient à la famille Schoffit depuis l’année 1984 est situé dans la partie centrale du coteau du Rangen, entre les parcelles du domaine Zind-Humbrecht à l’ouest et celles de la maison Wolfberger à l’est.
Malgré sa jeunesse, le riesling 2014 issu de ce clos Saint Théobald révèle déjà une vraie plénitude et une belle énergie minérale. MIAM !
Clos du Zahnacker 2014 – Cave de Ribeauvillé : nez assez discret mais où on devine une belle complexité, matière dense et solidement charpentée, équilibre frais, belle salinité en finale.
(terroir : marno-calcaire du Trias sur le Grand Cru Osterberg – exposition :sud-est)
Ce clos, monopole de la cave de Ribeauvillé est une complantation de 3 cépages dont près de la moitié de riesling, le reste étant dédié au pinot gris et au gewurztraminer. Cette cuvée un peu particulière dans cette série à fait une belle impression à côté d’un Rangen déjà en grande forme : c’est un vin encore sur la retenue mais dont le potentiel ne fait aucun doute.
Riesling Clos Häuserer 2008 – Domaine Zind-Humbrecht à Turkheim : nez curieusement évolué, notes de foin, de miel et de croûte de pain grillée, matière concentrée, acidité discrète, finale un peu pesante.
(terroir : marno-calcaire de l’Oligicène – exposition : est, pente faible)
Situé au pied du coteau du Hengst le clos Häuserer est l’un des 4 clos exploités par le domaine Zind-Humbrecht et depuis 1973 il est entièrement dédié au riesling.
Le vin de ce soir nous a laissé un peu dubitatifs par son caractère très évolué peu conforme à nos attentes légitimes lorsqu’on considère la réputation du domaine et la qualité de ce millésime en Alsace.
Ceci dit, j’ai eu l’occasion de déboucher une autre bouteille de cette cuvée quelques jours après et la dégustation a révélé un vin bien plus en forme que celui de ce soir. (notes détaillées à paraître dans les « Bouteilles du moins de janvier 2019 »)
Riesling Bruderbach-Clos des Frères 2008 – Domaine Loew à Westhoffen : nez sur les agrumes mûrs (pamplemousse, cédrat), bouche filiforme, acidité fine et droite, finale assez longue mais dominée par une amertume très prononcée.
(terroir : grès dolomitique – exposition : sud)
Provenant d’un clos dont la réputation remonte au temps des romains et qui a été délimité et réglementé dès le XIII° siècle par les moines du Bruderbach, le second riesling de 2008 n’a pas davantage réussi à nous convaincre : matière fluette et équilibre très austère…deuxième déception sur ce millésime, dommage !
Riesling Grand Cru Goldert-Clos Saint Imer 2007 – Domaine Burn à Gueberschwihr : nez discret mais très élégant, palette florale raffinée (guimauve, acacia), bouche volumineuse, chair assez dodue tenue par une acidité mûre mais structurante, finale persistante et bien digeste.
(terroir : marno-calcaire sur le Grand Cru Goldert – exposition :sud-est avec terrasses)
Ce clos entièrement restructuré par Ernest Burn en 1934, est réputé pour engendrer des vins assez riches et ce riesling ne déroge pas à la règle mais la dizaine d’années passées en cave lui ont permis d’affiner sa silhouette et de laisser parler la minéralité de ce grand terroir de Gueberschwihr. MIAM !
Riesling Clos Windsbuhl 2007 – Domaine Zind-Humbrecht à Turkheim : nez intensément minéral avec des notes de pierre chaude et de craie sur un fond délicatement mentholé, matière dense et tendue par une structure acide/saline très puissante, finale très longue avec des amers salivante et une fine tannicité.
(terroir : calcaire coquiller – exposition : sud/sud-est)
Acquis par le domaine Zind-Humbrecht en 1987, ce clos situé en altitude (plus de 350m) au dessus du village de Hunawihr, produit toujours des rieslings droits et minéraux, conçus pour une longue garde.
Cette cuvée qui, dans sa prime jeunesse, pouvait heurter les papilles non initiés par son austérité monacale, commence doucement à s’ouvrir pour nous offrir un récital minéral de très grande classe.
Voilà un très grand vin d’Alsace qui pourra rivaliser sans peine avec quelques pointures beaunoises…notamment du côté de Puligny Montrachet. MIAM !
Pour conclure :
« Un Clos désigne une parcelle de vigne entourée d’un mur de pierre sèche avec deux entrées, l’une pour les voitures à cheval et l’autre pour le vigneron » mais celui qui connaît un peu le vignoble alsacien sait que ces exigences ne sont pas toujours respectées…notamment par le plus connu d’entre eux.
A l’heure actuelle, les clos alsaciens sont délimités sur un terroir bien identifié qui bénéficie d’une historicité prouvée et qui est obligatoirement exploité en monopole par un domaine.
Face à la pléthore de clos existants dans le vignoble alsacien, j’ai choisi de me limiter à ceux qui étaient dédiés, en tout ou en partie, au riesling.
Malgré l’absence du fameux riesling Sainte Hune, cette série qui comptait une belle sélection de bouteilles issues de clos réputés, nous a permis de découvrir quelques très jolis vins.
En effet, si on oublie les 2 bouteilles « douteuses » de 2008, ces vins ont révélé un très beau niveau qualitatif avec quelques vraies « grosses cartouches » comme ce Clos Windsbuhl 2007, grandissime tout simplement ou ce Clos Saint Théobald plein de belles promesses.
Pour ce qui est de mon coup de cœur personnel de ce soir, je choisirai sans hésiter le riesling du Clos Rebberg 2015, un vin riche, complexe et profondément minéral qui a su garder un côté gourmand et accessible…tout ce que je recherche quand je débouche une flûte alsacienne
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