Journée Portes Ouvertes au domaine Rietsch à Mittelbergheim
Journées Portes Ouvertes dans le vignoble alsacien – Printemps 2019
Dans le vignoble alsacien, l’arrivée du printemps est marquée par la reprise des manifestations œnotouristiques sur la route des vins et comme toujours c’est le domaine Barmès-Buecher qui a ouvert le bal suivi de près par les domaines Rietsch et Kreydenweiss.
Cette année encore, une fête de famille m’a empêché de répondre à l’invitation des premiers, je commencerai donc mes visites 2019 en Alsace en participant à 2 journées « Portes Ouvertes » : rendez-vous au domaine Rietsch le dimanche matin et au domaine Kreydenweiss le dimanche après-midi.
Hoppla, c’est parti !
Domaine Rietsch à Mittelbergheim
L’entrée côté vignes du domaine Rietsch.
Ce sont les premiers jours du printemps…la nature n’a pas oublié !
Je connais Jean-Pierre Rietsch depuis 2004 et son domaine fait partie de ceux que j’ai visité le plus grand nombre de fois…et pourtant lorsque j’ai consulté mes comptes-rendus viniques sur ce site, j’ai constaté que plus de 3 années s’étaient écoulées depuis ma dernière rencontre avec ce vigneron de Mittelbergheim.
Il va sans dire que cette journée « Portes Ouvertes » tombait à point nommé pour reprendre mes bonnes habitudes !
C’est bien là…
…il suffit de suivre le fléchage qui nous guide vers la nouvelle la cave.
Les verres sont prêts…
…et comme toujours le domaine Rietsch a ouvert ses espaces de cave à des artistes.
Pour cette édition 2019, la famille Rietsch a invité 2 artistes, Samuel Guillemot et Marie Dréa, 2 autres domaines viticoles, le domaine du Stierkopf (Alsace) et le domaine Pergaud (Ardèche) et Anita Hoerter qui produit des sirops et des gelées réalisées à partir de fruits et de plantes cueillis sur le Stierkopf.
La collection de portraits réalisés par SAM…
…et quelques ouvres de Marie Dréa…
…l’artiste qui illustre les étiquettes du domaine Rietsch.
Les premiers visiteurs du matin commencent la dégustation
Jean-Pierre Rietsch qui parle de ses vins avec Eric Texier, le vigneron ardèchois du domaine de Pergaud.
Je commence ma dégustation avec quelques vins qui sont encore en cours d’élevage mais qui vont bientôt faire leur apparition sur le tarif du domaine :
Tout Blanc 2018 : nez discret et délicatement citronné, jus tonique et très salin en bouche, finale fraîche, relevée par une légère présence tannique.
(45% riesling + 45% auxerrois + 10% gewurztraminer)
Cet assemblage proposé en bouteilles de 1 litre est une cuvée qui associe une franche gourmandise et un caractère minéral bien affirmé…c’est le style de vin qu’on j’aimerait retrouver dans les pichets des winstubs alsaciennes pour accompagner une tarte à l’oignon, un jarret braisé ou une bonne choucroute.
Pinot Gris Quand le Chat n’est pas là 2018 : couleur très étonnante – elle fait vraiment penser à un pinot noir – nez très discret avec de jolies notes végétales et fruitées, matière consistante en bouche, mâche tannique sensuelle, finale épicée et bien salivante.
(100% pinot gris récolté sur Mittelbergheim et sur le Stierkopf)
Dès le deuxième vin, Jean-Pierre Rietsch nous invite dans son univers esthétique loin des canons alsaciens avec ce pinot gris de macération plutôt déroutant mais qui se laisse boire avec une grande facilité…voilà un vin à goûter sans préjugés pour éprouver des sensations inédites mais fort plaisantes !
La robe vraiment étonnante du pinot gris 2018
Coquette 2018 : aromatique assez expressive, notes florales (violette, guimauve) et réglissées, matière dense, trame acide/saline très solide, finale étirée avec de beaux amers salivants.
(1/3 gewurztraminer macéré 15 jours puis décuvé et refermenté avec 2/3 de riesling)
Avec les gewurztraminers qui marquent fortement l’expression aromatique et les rieslings qui donnent du corps et de la tension à l’ensemble, cet assemblage travaillé de façon originale est une petite friandise vineuse qui accompagnera à merveille des préparations culinaires aux épices douces.
Sylvaner Vieilles Vignes 2018 : nez discret, presque mutique, bouche pleine d’énergie avec un jus corsé structuré par une salinité intense et une légère présence tannique, finale très digeste avec une acidité longue et citronnée.
(100% sylvaner principalement issu du G.C. Zotzenberg)
Avec une vendange 2018 très qualitative mais un peu trop généreuse sur le plan des volumes, Jean-Pierre a décidé de ne pas revendiquer le label Grand Cru pour ses sylvaners du Zotzenberg…autant dire que ce vin superbe d’équilibre et d’énergie minérale mérite d’être encavé par tout amateur de grands sylvaners de terroir. MIAM !
Riesling Brandluft 2015 : nez discret mais bien frais, matière consistante, acidité vive et bien large, salinité impressive, finale marquée par de beaux amers minéraux. (100% riesling)
Ce dernier riesling Brandluft produit par Jean-Pierre Rietsch a été élevé durant deux ans sur lies en foudre et durant une année supplémentaire en bouteille avant d’être proposé à la vente.
C’est un vin au caractère assez impulsif avec une énergie minérale impressionnante qui peut heurter des papilles trop sensibles…mais je suis certain que quelques années de garde l’aideront à contenir sa fougue et à lisser sa texture.
Riesling Stein 2016 : nez plus ouvert, palette pure et fraîche sur les zestes d’agrumes et la poudre de craie, matière élancée, équilibre vif et précis, finale tendu et marquée par des notes de pamplemousse et de belles nuances minérales (craie, graphite).
(100% riesling)
Le riesling Stein est depuis toujours l’une de mes cuvées fétiches du domaine Rietsch et ce n’est pas cette très belle édition 2016 qui va me faire changer d’avis : c’est un riesling très élégant qui nous fait ressentir de façon précise la trame acide/saline qui caractérise ce grand terroir calcaire. MIAM !
Pinot Noir Stierkopf 2018 : nez très discret, notes fumées et épicées, jus ample et concentré, trame tannique mûre mais structurante, finale sur les fruits rouges frais et la craie.
(100% pinot noir sur le Stierkopf – vigne de 30 ans avec des plants issus d’une sélection massale de pinots noirs bourguignons)
Depuis la restructuration de son domaine, Jean-Pierre exploite 3 hectares de vignes en fermage sur ce coteau calcaro-gréseux qui prolonge le Grand Cru Bruderthal vers Mutzig et ce pinot noir charnu et structuré nous apporte une preuve évidente de la grande valeur de ce terroir encore trop méconnu à l’heure actuelle.
Crémant Extra Brut : nez complexe et raffiné sur les fruits blancs de brioche au beurre sur un fond minéral sensible, matière ample et vineuse en bouche, bulle d’une grande finesse, amers nobles et salinité intense en finale.
(auxerrois dominant + chardonnay + pinot gris – vins de 2015 et 2016 alimentés par les jus et les levains de 2017 pour la prise de mousse en bouteille).
Le choix d’utiliser cette méthode ancestrale dans l’élaboration de ce crémant permet à Jean-Pierre d’utiliser des vins de base bien mûrs sans les charger par un ajout de sucres trop important et de nous proposer cette bulle à la fois festive et gastronomique…quelle belle quille mes amis !!!
Pour la suite de la dégustation, le domaine Rietsch nous propose de découvrir une petite verticale de vins de macération.
Riesling Quand le Chat n’est pas là 2012 : nez très agréable, notes de pomme bien mûre et d’herbes à tisane sur un fond légèrement oxydatif, bouche dense et saline avec un petit grip tannique qui dynamise la finale.
(macération : 12 jours – élevage : 12 mois en fûts de 400 et 600 litres)
Gewurztraminer Vilain petit Canard 2013 : nez flatteur, notes de fruits exotiques bien mûrs, bouche généreuses qui développe des arômes de raisin sec et de figue, amers nobles et nuances épiées en finale.
(macération : 21 jours – élevage : 6 mois en fûts de 400 litres)
Gewurztraminer Demoiselle 2014 : nez assez discret, palette complexe sur l’abricot confit, les fleurs et les épices douces, jus dense et onctueux en bouche, équilibre tonique, finale sapide et délicatement poivrée.
(macération : 20 jours – élevage : 6 mois en fûts de 600 litres et en foudre)
Muscat Murmure 2015 : nez flatteur avec une belle palette florale, matière gourmande et bien consistante en bouche, finale légèrement tannique avec un long sillage frais et mentholé.
(macération : 21 jours – élevage : 6 mois en cuve inox)
Klevener de Heiligenstein 2016 : nez très discret, notes de fruits blancs sur un fond végétal assez marqué, matière concentrée et structure longiligne en bouche, finale salivante avec de très beaux amers minéraux.
Cette petite série de cuvées de macération vinifiés et élevés sans SO2 nous font découvrir une autre interprétation du vin d’Alsace tout en nous montrant une fois de plus que les vins « nature » bien nés et bien travaillés savent se tenir dans le temps.
Ce sont des vins qui développent des expressions aromatiques typées et des jus structurés par des salinités minérales d’une force peu commune.
Midi approche et ces délicieuses bouchées tombent à point nommé.
La suite de ma visite me conduit la table du domaine du Stierkopf, une entreprise viticole adaptée qui propose 2 cuvées vinifiées dans la cave du domaine Rietsch.
Mule-tiple 2017 : nez très discret mais d’une belle pureté, matière longiligne, légère tannicité, équilibre bien frais, finale très sapide avec de beaux amers minéraux.
(sylvaner et riesling à parts égales + 10% gewurztraminer en macération)
Riesling 2017 : nez ouvert et engageant sur les agrumes frais (citron, pamplemousse), bouche droite, équilibre tonique, finale bien saline, sillage aromatique sur les zestes d’agrumes et le pamplemousse.
Cette entreprise qui emploie des personnes à besoins spécifiques travaille des vignes de 40 à 60 ans situées sur le Stierkopf, un coteau calcaro-gréseux très pentu et exposé plein sud qui selon Jean-Pierre Rietsch « aurait mérité le classement en Grand Cru ».
A côté d’un riesling qui exprime sa relation au terroir avec une belle franchise, la cuvée d’assemblage se distingue par son caractère minéral affirmé.
La table du domaine de Pergaud où je me suis arrêté brièvement mais sans prendre de notes…je vais rester en Alsace aujourd’hui !
Pour conclure :
Ce fut avec grand plaisir que j’ai commencé ma « campagne » de visites printanières en Alsace par ce domaine dont je connais les vins depuis une bonne quinzaine d’années.
Jean-Pierre Rietsch est un vigneron sincère et passionné qui travaille avec une conviction sans faille pour concevoir des vins qui expriment leur terroir avec une parfaite authenticité.
Pour ce faire il a choisi de conduire ses vignes de façon vertueuse (viticulture biologique) et de travailler ses raisins et ses jus tout en douceur avec un minimum d’intrants et des doses de SO2 très faibles (des valeurs de SO2 total à moins de 20mg/l).
La gamme actuelle du domaine propose des vins « traditionnels », très légèrement sulfités à la mise, des vins « naturels » avec zéro intrant et des vins de macération…une offre originale et intéressante pour qui veut faire une promenade gourmande hors des sentiers battus.
Pour Jean-Pierre Rietsch ses vins sont avant tout des « vins de bouche » avec la buvabilité comme valeur cardinale…mais en ce qui me concerne c’est surtout l’intensité des présences salines dans les différentes cuvées qui m’impressionne depuis toujours.
Bien évidemment, il y aura toujours l’un ou l’autre vin qui va me laisser perplexe ou parfois même me déplaire, mais je resterai toujours admiratif devant le travail de ce vigneron dont j’apprécie l’ouverture d’esprit et la parfaite cohérence intellectuelle.
Dans la série de vins dégustés aujourd’hui, j’ai particulièrement apprécié le sylvaner Vieilles Vignes 2018 et le riesling Stein 2016, deux cuvées pleines de vie et de belles promesses, et l’incontournable crémant But Nature, probablement l’une des meilleures bulles alsaciennes du moment…en tous cas pour moi !
J’ai également été agréablement surpris par la belle tenue du pinot noir du Stierkopf, un terroir encore peu connu mais qui s’avère très qualitatif et qui a suscité l’intérêt de vignerons comme Jean-Pierre Rietsch ou Antoine Kreydenweiss...deux bonnes « locomotives » pour donner une impulsion qualitative décisive à la production vinique sur ce terroir.
Merci à tous ceux qui ont œuvré pour nous offrir ce joli moment de culture et de gourmandise.
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