Journée "Portes Ouvertes" au domaine Deiss à Bergheim - Edition 2024
Comme chaque année, le domaine Deiss ouvre ses portes à ses clients particuliers pour les inviter à découvrir sa production vinique.
Faute de temps, j’ai « séché » l’édition 2023 mais cette année j’avais bien ciblé cette date dans mon agenda pour ne pas rater une fois encore la possibilité de goûter ces belles cuvées élaborées par ces grands vignerons de Bergheim.
Hoppla, c’est parti !
L’entrée du domaine Deiss...
...et la salle de dégustation avec les premiers visiteurs du matin.
La découverte de la production du domaine Deiss se fait en 4 étapes matérialisées par 4 tables thématiques :
- la table « villages et climats »
- la table « les climats sous l’angle de la macération »
- la table « grands crus »
- la table « vendanges tardives et sélection de grains nobles »
La table « villages et climats »
Alsace Berckem 2022 : nez complexe et séduisant avec de belles notes de fruits blancs mûrs relevées par de fine touches exotiques, bouche généreuse, profonde et sapide, finale très digeste avec un long sillage exotique et épicé.
(terroir : calcaire jurassique – 13° – S.R. : 19,4 g/l – A.T. : 5,65 g/l)
Alsace Engelgarten 2022 : nez ouvert et engageant avec des notes de raisin mûr et d’agrumes soutenues par des évocations minérales bien sensibles, bouche ample et riche avec un jus assez épais structuré par une acidité souple et une fine trame tannique, finale très racée avec des amers nobles et une longue persistance sur la pierre et les épices.
(terroir : graves – 13,5° – S.R. : 2,9 g/l – A.T. : 5,23 g/l)
Alsace Rotenberg 2018 : nez très avenant avec des notes de fruits jaunes mûrs, bouche riche, sphérique mais avec une structure solide et compacte, finale très saline avec une longue persistance pierreuse et citronnée.
(terroir : calcaire jurassique – 13° – S.R. : 31,5 g/l – A.T. : 5,2 g/l)
Alsace Grasberg 2019 : nez riche avec une belle palette citronnée et pierreuse, bouche ronde et concentrée avec une texture légèrement granuleuse, étirée par une acidité bien mûre, finale riche et salivante avec une très grande longueur aromatique sur les agrumes et la craie.
(terroir : calcaire jurassique – 13°5 – S.R. : 32,9 g/l – A.T. : 6,17 g/l)
Alsace Burg 2018 : nez complexe avec des notes de fruits exotiques et d’herbes aromatiques, bouche opulente mais assez nerveuse, structurée par une acidité large et une fine tannicité, finale très élégante avec une belle persistance sur l’aspérule et la menthe fraîche.
(terroir: marnes du Keuper – 14° – S.R.: 20,9 g/l – A.T.: 6,66 g/l).
Cette série un peu plus courte que d’habitude – certaines cuvées qui composent généralement cette gamme étaient épuisées, conséquence de la faiblesse des rendements des derniers millésimes – j’ai retrouvé avec plaisir ces vins francs et généreux qui se livraient à la dégustation avec une belle spontanéité tout en affirmant des structures et des textures bien typées, des signatures déjà bien lisibles de leurs terroirs d’origine.
Un choix de beurres signés Bordier et des pains pour se refaire le palais avec une petite tartine
La table des « climats sous l’angle de la macération »
Alsace La Colline Rouge 2022 : nez élégant et complexe avec des notes d’agrumes et de zestes, bouche bien charnue avec une texture un peu granuleuse, finale longue et saline relevée par des amers délicats.
(terroir : calcaire jurassique – 13,5° – S.R.: 1,4 g/l – A.T.: 5,34 g/l).
Réalisée à partir de rieslings et des pinots récoltés sur le Rotenberg, égrappés et macérés durant 10 mois en amphores, cette cuvée remarquable de complexité et de buvabilité propose une interprétation originale mais très réussie de ce terroir.
Alsace Le Jeu des Verts 2022 : nez discret mais très raffiné, bouche ample et puissante qui développe progressivement de beaux arômes d’orange sanguine et d’épices douces, finale droite et salivante avec un sillage fruité/épicé/minéral d’une grande longueur.
(terroir : marnes du Keuper – 13,5° – S.R.: 0,8 g/l – A.T.: 5,14 g/l).
Cette seconde nouvelle cuvée a été élaborée à partir de rieslings, pinots noirs et gewurztraminers issus du « Gruenspiel » macérés durant 3 semaines avant pressurage et élevage de un an en foudre.
C’est un vin complet mais un peu plus austère qui fera merveille à table face à un plat de viande blanche à la crème…et peut-être même un gibier.
Alsace Burlenberg 2020 : nez expressif et charmeur avec un fruité profond, bouche dense et charnue soutenue par une acidité large et stimulée par une fine trame tannique, finale longue et pleine d’énergie avec une belle persistance fruitée/épicée.
(terroir : calcaire volcanique)
Cet assemblage de pinots (noir, meunier, beurot, blanc et gris) issus de ce terroir très particulier séduit et impressionne par sa puissance et sa vinosité tout en se laissant approcher avec facilité.
J’ai très bien goûté ce vin que je trouve toujours un peu trop viril (voire sauvage) dans ses jeunes années…effet millésime ou changement de style, l’avenir nous apportera probablement la réponse.
La table des « Grands Crus »
Alsace Grand Cru Schlossberg 2021 : nez vif et expressif avec une palette citronnée et pierreuse, bouche longiligne et juteuse, étirée par une acidité véloce et bien centrée, finale lumineuse et cristalline.
(terroir : granit – 13,5° – S.R. : 3 g/l – A.T. : 7,87 g/l)
Alsace Grand Cru Altenberg de Bergheim 2018 : nez riche et expressif avec des notes de coing, de miel et d’épices douces, bouche puissante qui développe un jus fruité très concentré qui libère des arômes de raisin confit et de résine, finale longue et vibrante avec un beau sillage balsamique et poivré.
(terroir : argilo-calcaro-gréseux – 12° – S.R. : 75,4 g/l – A.T. : 4,74 g/l)
Alsace Grand Cru Schoenenbourg 2018 : nez complexe et raffiné avec des notes citronnée et minérales sur un fond légèrement grillé/torréfié, bouche très élégante avec de la densité de la vinosité et un équilibre très digeste, finale d’une longueur exceptionnelle avec de beaux amers minéraux et un sillage finement iodé et fumé.
(terroir : marnes à gypse – 13° – S.R. : 34,8 g/l – A.T. : 5,54 g/l)
Les trois cuvées qui composent le trio des Grands Crus du jour assument pleinement leur statut en développant des jus à forte personnalité avec des équilibres et des structures profondément imprégnées par leurs terroirs respectifs.
A côté d’un Schlossberg virevoltant et affuté comme un katana, l’Altenberg et le Schoenenbourg nous emmènent dans un univers plus apaisé avec leurs textures caressantes, leurs matières très généreuse et leur parfaite digestibilité.
L’atelier « accords mets et vins »
Comme toujours la famille Deiss nous invite à tester le potentiel gastronomique de leurs cuvées en dégustant 3 accords conçus par le chef Frédéric Engel.
Accord n°1 : brochette lotte/chorizo et feuille de céleri frit avec la cuvée La Colline Rouge 2022
Cette cuvée a relevé vaillamment le défi proposé par cette petite brochette aux saveurs puissantes et complexes. Cette association gustative très intéressante a donné du relief à la texture du vin tout en exacerbant son côté minéral.
Accord n°2 : truite fumée, abricot, gingembre, poivron et fleur avec la cuvée Grasberg 2019
Cette association osée et originale entre le fumé de la truite et la douceur acidulée de la compote d’abricot « piquée » par le gingembre s’est mariée à merveille avec le fruité épanoui et la fine touche crayeuse de cette cuvée du Grasberg.
Accord n°3 : millefeuille de foie gras au pain d’épice, gelée de coing et poivre de Sichuan avec la cuvée Schoenenbourg 2018
La cuvée du Schoenenbourg a beaucoup apprécié l’univers doux et délicatement épicé crée par cette petite brochette mais comme on pouvait s’y attendre, c’est le vin qui a gardé le dernier mot en fin de bouche…et ce n’est surement pas moi qui vais m’en plaindre !
Pour terminer cette visite, je vais participer à une petite conférence-dégustation animée par Jean-Michel Deiss qui va nous présenter la cuvée « L’Arche », une cuvée très confidentielle (200 bouteilles) issue d’une parcelle de 16 ares complantée avec 47 cépages alsaciens oubliés : « nous voulions produire un vin qu’on ne peut produire nulle part ailleurs ».
Il y a toujours beaucoup de monde pour écouter Jean-Michel Deiss…
…toujours aussi enthousiaste lorsqu’il parle de vin.
Quelques morceaux choisis
Sur le choix des cépages :
- « Il faut planter des cépages capables de se rendre au service du lieu »
- « les plants de vigne issus de sélections multiples sont faibles…il faut revenir vers des plants rustiques, des vieux cépages peu perfectionnés mais capables de résister aux aléas climatiques qui se reproduisent de plus en plus fréquemment »
Sur la complantation :
- « c’est le rassemblement de tous les cépages légitimes dans un lieu pour qu’ils coopèrent dans le but de produire les meilleurs fruits »
- « la complantation est un outil extraordinaire pour s’adapter aux conditions climatiques actuelles »
Sur la dégustation :
- « pour bien déguster il faut fermer les yeux pour faire de la place dans le cerveau »
- « l’olfaction raconte plus l’histoire du dégustateur que celle du vin…c’est par le toucher de bouche qu’on perçoit l’âme d’un vin »
C’est l’heure des travaux pratiques
V.D.F. L’Arche : nez très complexe avec des notes d’herbes aromatiques, de zestes d’agrumes et d’épices, bouche chaude avec un jus consistant et légèrement granuleux appuyé sur un socle acide large, finale vive et saline.
Réalisée à partir d’une vendange entière vinifiée et élevée durant une année en amphore, cette cuvée novatrice se goûte déjà remarquablement dès aujourd’hui : c’est un vin un peu mystérieux qui sort un peu des codes esthétiques habituels mais qui révèle une très belle personnalité avec des qualités qui lui garantissent un très beau potentiel de garde.
Jean-Michel et Mathieu Deiss font partie de ces vignerons alsaciens qui ont pris le parti de pousser les maturités de leurs raisins à leur terme et qui ont appris à gérer la richesse des jus pour produire des vins denses, structurés et profondément marqués par la minéralité de leurs terroirs d’origine.
Dès leur prime jeunesse, ces vins singuliers révèlent des caractères gastronomiques évidents, prouvant par là même à quel point c’est réducteur – voire même aberrant – de se focaliser uniquement sur la sucrosité d’un vin pour qualifier son équilibre.
Ceci dit, malgré ce côté sociable très précoce, les vins du domaine Deiss sont avant tout conçus pour être gardés quelques années en cave afin de leur permettre de donner toute la mesure de leur potentiel...les chanceux qui ont pu déguster l’une de ces grandes bouteilles à pleine maturité savent de quoi je parle.
La très belle collection d’étiquettes créées à partir d’une iconographie médiévale, en fonction du paysage mental décrit lors d’une séance de dégustation intuitive qui a regroupé 25 dégustateurs.
Les nouvelles cuvées que j’ai découvert ce jour – les macérations sur le Rotenberg et le Gruenspiel et la cuvée « L’Arche » – sont de très belles réussites qui enrichissent encore un peu la belle gamme de vins de ce domaine.
Merci à l’équipe du domaine Deiss d’avoir partagé ces belles émotions viniques.
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