Des mets et des vins à Blienschwiller : le Double Rendez-Vous des Saveurs 2014

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Blienschwiller au printemps.

Le « Double rendez-vous des Saveurs » organisé par le Syndicat d’Initiative de Blienschwiller m’avait permis de passer un moment délicieux dans les cours vigneronnes de ce village l’année passée.
Bien évidemment, lorsque j’ai su que cette manifestation pour gastronomes œnophiles allait être reconduite en 2014, je n’ai pas hésité à m’inscrire afin de faire partie des quelques 350 privilégiés qui vont pouvoir se promener dans les rues de Blienschwiller et se régaler à chaque halte gourmande proposées par des vignerons locaux et des grands chefs alsaciens.
Hoppla c’est parti !

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Les outils sont prêts…ma promenade gourmande peut commencer.


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Il est 13 heures, les rues de Blienschwiller sont encore vides…mais ça ne durera pas !

Le programme ne précise pas la nature des plats proposés mais on sait qu’il n’y aura pas de mets sucrés ce qui permet de faire nos visites sans respecter d’ordre précis et de nous laisser surprendre chez chaque vigneron qui nous ouvre les portes de son domaine.

1. Domaine J.-M. et H. Sohler : Pinot Noir La Pièce de la Chapelle 2009

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Poitrine de cochon gascon sur tartine de fromage blanc aux herbes réalisé par Manou Schieber – « L’Auberge de la Ferme du Manou » à Steige.

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Elevé durant deux ans en barriques ce pinot noir, délivre des arômes bien mûrs et légèrement fumés, la bouche est assez riche et très suave, la finale possède une belle allonge.
Simple mais goûteux le plat réalise un accord évident sur la douceur avec un pinot noir déjà bien patiné…reste la fin de bouche où les notes d’herbes aromatiques du fromage blanc écrasent un peu le fruit du vin.


2. Domaine F. et P.-Y. Meyer
: Riesling G.C. Wintzenberg 2010

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Tartare de bœuf iodé aux huîtres, caviar de harengs fumés réalisé par Gérard Eckert – « Restaurant-traîteur Gérard Eckert » à Dorlisheim.

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Ce riesling issu du Grand Cru granitique du village, développe une palette très tonique sur le citron frais et quelques nuances iodées, en bouche l’attaque est douce mais la minéralité commence à parler très le toucher de bouche est grenu et la finale se tend en laissant persister de belles impressions salines.
Complexe mais offrant une harmonie gustative sans faille, ce plat très raffiné rehausse les notes pierreuses du riesling…au bout du compte la force du plat finit par dominer le vin mais les sensations gustatives restent très agréables.

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Dans la cour du domaine Meyer, le vigneron présente son vin aux visiteurs.


3. Domaine H. Metz « Cave de la Dîme » : Riesling G.C. Wintzenberg 2010

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Gâteau de brochet, sauce riesling réalisé par Eric Girardin – « Restaurant Girardin » à Strasbourg.

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Ce second riesling Wintzenberg 2010, proposé par le domaine Metz, nous offre une version plus droite et encore plus minérale de ce Grand Cru : moins causant que le vin des Meyer, il montre cependant une matière dense et solidement tendue laissant persister un long sillage pierreux en finale.
Face à ce plat raffiné et très subtil au goût, la virilité monolithique du vin tranche nettement mais l’accord se réalise sur une complémentarité très dynamique. Superbe !

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Datant du début du XVIII° siècle, la cave du domaine H. Metz a été décorée avec quelques œuvres d’art pour loccasion.


4. Domaine R. Kientz : Gewurztraminer 2012

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Bœuf épicé au riz royal réalisé par Robert Hubrecht – « La Petite Auberge » au Hohwald.

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Ce gewurztraminer provenant de vignes autour d’Epfig charme par sa légèreté et son aromatique florale complexe et précise mais pas trop exubérante. La bouche est longiligne, goûteuse et équilibrée avec une finale un peu courte mais d’une grande netteté.
Le plat riche en effluves épicées ne résonne pas immédiatement au niveau aromatique mais en bouche l’association révèle le côté épicé du gewurztraminer…l’ensemble est harmonieux mais cette préparation au bœuf aurait surement supporté la force d’un Grand Cru.


5. Domaine J.-M. Straub : Pinot Noir Barriques 2010

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Faux filet, sauce béarnaise réalisé par Didier Roeckel – « La Couronne » à Scherwiller.

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Ce pinot noir issu du Grand Cru Wintzenberg a été élevé durant 12 mois en foudres et 12 mois en barriques. Il présente une olfaction discrète mais racée sur les fruits noirs (cassis) avec une pointe fumée, la bouche est tonique et très gourmande avec une finale précise et très sapide.
Face à ce plat simple associant une viande très goûteuse et quelques légumes présentés dans une feuille d’endive crue, le vin réalise un accord évident et classique avec la viande mais les légumes durcissent le vin en resserrant les tanins en finale.

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Foudres et barriques dans la belle cave du domaine Straub.


6. Domaine R. Bohn et fils : Pinot Noir 2012

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Parmentier de lapin au romarin et aux lentins du chêne réalisé par Marie-Christine Herment – « Aux deux clefs » à Lièpvre.

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Provenant de parcelles autour de Blienschwiller ce pinot noir élevé en foudres s’exprime avec simplicité et gourmandise : fruits rouges au nez, souplesse et suavité en bouche.
Ce vin très flatteur et facile d’accès répond avec beaucoup d’aplomb à ce plat à forte personnalité, cependant sur la durée les arômes intenses qui émanent de la cassolette (romarin et lentins) prennent le dessus sans générer de faux goût.


7. Domaine C. Schwartz et fils : Riesling Vieilles Vignes 2011

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Rillette de truite du Val d’Orbey, compotée de fenouil, tempura de fleur de courgette, effluves de combawa et yuzu réalisé par Sébastien Sattler – « La Table des Vergers » à Dieffenthal.

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Issu de parcelles situées sur des coteaux autour de Blienschwiller ce riesling présente une palette discrète avec des notes pierreuses et finement anisées. La bouche est ample avec un joli gras et une finale franche mais un peu courte.
Avec ce plat vraiment exceptionnel de finesse et de complexité le vin trouve un beau terrain d’entente sur le thème de l’anis, mais au bout du compte l’assiette domine largement le verre. L’accord reste bien agréable mais avec un vin plus puissant on approchait du Nirvana gustatif !


8. Domaine J-F, M-A et J-S Straub : Pinot Gris 2011

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Panacotta à l’ail des ours, émincé de poulet à l’asperge réalisé par Hubert Maetz – « Le Rosenmeer » à Rosheim.

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Issu d’un coteau granitique assez tardif ce pinot gris discret et très élégant possède un équilibre sec, une belle présence en bouche et une finale bien sapide.
Conçu par l’un de mes chefs alsaciens préférés ce plat qui propose un mariage très audacieux entre viande blanche et végétaux à forte personnalité fut pour moi l’un des hits de l’après-midi.
Curieusement les nuances végétales de cette verrine ont réveillé l’aromatique du vin…mariage inattendu, étonnant mais parfaitement réussi !


9. Domaine H. Meyer : Riesling 2013

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Tourteau mayonnaise, guacamole, gelée de pomme verte, émulsion de yuzu réalisé par Sébastien Buecher – « L’Auberge du Frankenbourg » à La Vancelle.

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Issu d’une vieille vigne de riesling (plantée en 1948) située en contrebas du Grand Cru ce riesling séduit par son aromatique complexe sur le citron vert, complétée par quelques notes plus pierreuses et par sa matière en bouche, dense, riche et équilibrée par une belle salinité.
La parcelle qui a produit des raisins rentrés à 12°9 naturels (pas mal pour le millésime) a fait l’objet de soins particuliers de la part d’un stagiaire BTS qui a pratiqué des effeuillages ciblés au moment de la floraison et de la nouaison…Belle réussite !
Face à ce plat aux saveurs intenses le vin tient magnifiquement en résonnant très harmonieusement sur le registre aromatique des agrumes. Très grand accord gastronomique !

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Le cuvier du domaine Meyer…


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…et son extension flambant neuve mise en service pour ce millésime.

Avec sa palette racée sur les agrumes mûrs et l’eau de roche, sa matière concentrée et puissamment minérale en finale, le riesling Grand Cru Wintzenberg 2012 affirme sa noble origine avec beaucoup de classe.
Le pinot gris Grand Cru 2012 est encore très réservé au plan aromatique mais possède une matière dense, charnue et très gourmande…prometteur !

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Testé sur le plat par curiosité le riesling G.C. garde ses distances et ne communique pas vraiment…bizarrement, la magie n’opère pas, preuve que le choix de la cuvée riesling 2013 a été vraiment pertinent. Bravo !


10. Domaine J. Meyer : Crémant rosé brut

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Couscous d’écrevisses au fromage blanc aux douze épices réalisé par Sylvie Grucker – « Le Pressoir de Bacchus » à Blienschwiller.

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Issu de pinot noir à 100% ce crémant étonne par son aromatique plus marquée par des notes de froment que par le fruit, ceci dit la bouche tonique et finement bullée possède un caractère gourmand et appétent très agréable.
Le plat réalisé par la chef locale qui nous offre un festival d’arômes et de textures tout en délicatesse et en raffinement stimule l’expression aromatique du crémant en faisant ressortir et perdurer un beau sillage fruité.
Cet accord pleinement réussi crée une synergie gustative qui exacerbe les goûts…Superbe !

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La chef Sylvie Grucker au travail dans les vignes du domaine Jérôme Meyer


11. Domaine B. Frey : Muscat 2012

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Duo d’asperges en velouté, espuma de foie gras, chips de légumes d’antan réalisé par Christophe Knecht – « Chef à domicile, traiteur » à Epfig.

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Né sur une parcelle granitique assez tardive située au dessus du Wintzenberg, ce muscat frais et parfumé développe une palette charmeuse sur le raisin frais et les fleurs (sureau, rose) et déploie une matière ronde, suave et bien glissante en bouche.
Face à cette verrine élégante et colorée, ce muscat bien expressif réalise un accord classique mais toujours réussi avec les asperges…pourquoi changer une équipe qui gagne !


12. Domaine Spitz et fils : Riesling G.C. Wintzenberg 2010

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Croustillant de queue de langoustine et sa mousseline de céleri réalisé par Geoffrey Lagneau – « Ville de Strasbourg » à Epfig.

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Le riesling Grand Cru 2010 exprime une aromatique épanouie et complexe sur les agrumes, les fleurs blanches et la pierre chaude, la bouche est généreuse mais la finale de longueur moyenne garde un côté digeste très gastronomique.
Le crustacé bien craquant et la sauce parfumée aux agrumes s’allie avec une grande évidence à ce vin ouvert et facile d’accès…la mousseline de céleri par contre est plus difficile à marier.

Pour conclure :

- après une édition 2013 qui avait placé la barre qualitative à un niveau déjà très élevé, ce nouveau rendez-vous des saveurs de Blienschwiller nous a emmenés encore un peu plus loin dans la découverte des multiples possibilités d’accords gastronomiques entre des mets et des vins d’Alsace.
Nos grands chefs ont répondu à l’invitation des vignerons du village et ont installé des coins cuisine de fortune pour réaliser de vraies prouesses techniques en nous régalant avec des plats goûteux et recherchés dont la plupart étaient dignes de figurer sur une carte de restaurant gastronomique. Respect !

- avant de citer mes habituels coups de cœur viniques je relèverai en premier lieu la belle tenue de tous les vins présentés lors de ce parcours gourmand…messieurs les vignerons, chapeau !
Maintenant, à titre personnel je sélectionnerai tout d’abord les deux rieslings dégustés chez Hubert Meyer (riesling 2013 et Wintzenberg 2012) : deux vins complets et équilibrés au potentiel évident, conçus par un jeune vigneron entreprenant et passionné par son travail…un domaine à suivre !
Je citerai aussi le très beau pinot noir 2010 de J.M. Straub, qui a confirmé la bonne impression ressentie l’année passée lorsque j’avais rapidement goûté une cuvée de rouge produit par ce vigneron…une constance de bon augure !
Pour finir, je ne résiste pas à l’envie de relever le charme absolu du muscat 2012 de B. Frey…un vin « de saison » suave, léger et facile d’accès…MIAM !

- comme je l’ai déjà souligné en 2013, les associations gustatives proposées cette année se sont toutes révélées particulièrement intéressantes : malgré deux étapes supplémentaires, le défi du sans faute a été relevé avec brio : 12 accords et 12 réussites…Bravissimo !
A titre personnel j’ai vraiment apprécié l’étonnant accord du Crémant Rosé de J. Meyer avec le plat réalisé par Sylvie Grucker (couscous, écrevisses, fromage blanc et épices) mais aussi le noble classicisme de l’association du gâteau de brochet (E. Girardin) avec le riesling Wintzenberg 2010 du domaine H. Metz.

- Merci à tous ceux qui ont œuvré pour nous permettre de passer cette très belle après-midi. A l’année prochaine j’espère…

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Les toits de Blienschwiller sous le soleil printanier.

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