Visites à Châteauneuf du Pape : domaine de Ferrand et domaine Charvin

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Il est des habitudes que l’on prend au fil du temps et que l’on ne voudrait jamais abandonner. Depuis quelques années, comme un pèlerinage, je prends la route de Châteauneuf rejoindre l’ami Vall pour passer ensemble une demie journée afin de goûter le nouveau millésime. Deux domaines sont incontournables depuis 10 ans, sis dans un secteur proche, les domaines de Ferrand avec Philippe Bravay et le domaine Charvin de Laurent Charvin.

Le chateau


 

Domaine de Ferrand

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Philippe Bravay nous accueille toujours avec beaucoup d’attention et de gentillesse. Avec Vall, ils aiment échanger technique, et les termes de PH, CO2, SO2 etc…leur sont langage commun.  Pour moi c’est parfois difficile, étant non professionnel du vin, mais j’apprend énormément de leur part sur tous les aspects techniques voire scientifiques de l’élaboration d’un vin. Etre vigneron demande une somme de compétences que peu de gens connaissent sans compter une sensibilité aux éléments naturels qui les entoure entre la terre et le ciel voire pour les plus attentionnés, un cinquième élément que l’on arrive à appréhender dans la dégustation d’un grand vin… J’aime la production de ce domaine au fil des 10 derniers millésimes dégustés et chaque passage ne fait que renforcer cet attrait.

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Vin de pays Hors la loi 2016 : un 100% viognier qui n’a pas les « codes » du cépage, en tout cas pas les marqueurs habituels. Un nez assez floral, une bouche vive avec un peu de salinité, pas de sensation d’alcool perceptible mais au contraire beaucoup de fraîcheur. C’est très agréable.

Côte du Rhône Mistral 2016 : un assemblage syrah-grenache-carignan-vaccarese. Le but de cette cuvée est de faire un vin friand, facile d’accès. Contrat rempli avec un fruité frais qui rend le vin très gouleyant.

Côte du Rhône 2016 jeunes vignes dégusté sur cuve : 90 % grenache complété de mourvèdre, cinsault et syrah. On ressent tout de suite un vin plein, presque à l’équilibre, sphérique. On le mettrait en bouteille tout de suite, j’en prendrai un carton tant c’est déjà accessible et délicieux !

Côte du Rhône Vieilles Vignes 2016 dégusté sur cuve : 95 % grenache et 5% Mourvèdre. Il restait un reliquat de SO2 et le 1er nez pique un peu mais un coup de poignet permet de mieux appréhender ce que sera le vin. Là encore, Plein, sphérique, mais avec une plus grosse matière qui demandera un peu de temps pour que les tanins soient moins accrocheurs et le tout plus accessible. On est un gros cran au-dessus d’un « simple » côte du Rhône !

Côte du Rhône 2015 : Millésime solaire, le fruit est plus noir, la matière plus dense avec moins d’équilibre général même si le vin dispose d’un support acide qui le porte. Il faudra un peu de temps pour que l’ensemble soit plus harmonieux.

Châteauneuf du Pape 2015 : Une belle aromatique sudiste se dégage du verre, c’est très mûr mais sans excès, avec une grosse mâche. Là encore il faudra du temps mais à l’aération de jolies notes florales apparaissent qui augure dans quelques années de bons moments.

Châteauneuf du pape 2014 : De très jolis parfums se dégagent immédiatement du verre, fleurs épices douces et cerise. C’est très délicat, sensuel le tout avec beaucoup d’équilibre. Un millésime qui n’est pas forcément de garde, quoi que…, mais qui d’ores et déjà bien travaillé donne un vin à boire sans modération !

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Domaine Charvin

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« Astérix » Charvin ne nous a pas accompagné cette fois, momentanément sur une jambe. Donc pas de grimpée à l’échelle sur le toit des cuves pour tremper les verres un peu partout dans le dernier millésime pas encore en bouteille et de discussions passionnées sur le vin en général et châteauneuf en particulier. On va être « obligé » de revenir ! Toutes les cuvées ne sont plus disponibles mais par contre nous allons pouvoir revenir sur 3 millésimes de CDP.

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Côte du Rhône 2015 : pas très ouvert, au départ sur des notes de cendres froides puis tout doucement évoluant vers un fruité plus avenant. Je pense que là encore, on est sur un peu plus qu’un « simple » Côte du Rhône et le temps devrait permettre au tout de se mettre en place même si je l’avoue, sur ce millésime, je ne suis pas fan.

Châteauneuf du Pape 2015 : très étonnamment plus en place, plus ouvert, à l’aromatique expressive de fruits à noyau teintée d’une touche florale. Le soleil du millésime ne se fait pas tant sentir que cela avec même un support acide bien présent. Une belle bouteille de garde qui pourra déjà être appréciée dans sa prime jeunesse mais qui certainement va se refermer quelques années pour mieux renaître ensuite.

Châteauneuf du Pape 2014 : ce vin a un côté un peu évanescent avec des touches florales, épices douces et même poudrées au nez et une bouche plus stricte, plus terrienne, plus carrée. Un bon coup de carafe et un peu de temps devrait permettre au vin de se mettre plus en place. Les vins de Laurent demandent souvent pas mal d’aération, ce ne sont pas des bouteilles que l’on peut faire claquer au débotté.

Châteauneuf du Pape 2013 : on sait le millésime pas facile, et l’on sent un vin serré, un peu comprimé. J’ai goûté ce millésime plus facilement à sa naissance, il a du se refermer pour quelque temps, mais le jus est joli, avec toujours cette élégance qui caractérise les vins de Laurent.


Voilà un petit bout de vie bien agréable… Mon grand plaisir quand je quitte ce quartier de Châteauneuf est de remonter par la route de Courthezon sur le haut du village et d’arriver sur le clos des papes avec en point de vue les vestiges du château. Au soleil couchant, c’est magnifique surtout en cette saison d’automne. Après je m’arrête pour déambuler dans les rues et souvent je fais une halte au caveau des vignerons afin de prendre quelques flacons de domaines que je n’ai pas le temps de visiter. Les prix ne sont pas tendres mais, eu égard à la qualité d’ensemble et à la renommée mondiale de ce crû, ils ont su raison garder, pour ceux du moins qui n’ont pas été pervertis par le « pape » des dégustateurs Américains… J’aime le Châteauneuf à juste maturité, avec un élevage en cuve voire en foudre, à dominante de grenache mais complété de quelques autres cépages sudistes. Au fruité, j’aime l’alliance du floral et ne déteste pas parfois sur des vins plus anciens, un côté terrien avec de belles notes de truffe. La maitrise du soleil est un élément essentiel tout comme le vent, surtout si, comme en 2017, le manque d’eau se fait sentir. Le sol, le matériel végétal s’est vu dans l’obligation au fil du temps, de se forger une carapace pour affronter ces conditions. C’est pour toutes ces raisons, et d’autres encore, que ce lieu me remplit à chaque fois que je vais dans cette contrée. Que ça dure…. que ça dure encore longtemps !

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 Cyril Amelin - novembre 2017

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