Domaine Bernard Bohn à Reichsfeld - 2013

DEGUSTATIONS PRINTANIERES EN ALSACE


Avec notre séjour estival à Grospierres qui approche, la nécessité d’une petite tournée dans le vignoble alsacien se faisait de plus en plus pressante, histoire de constituer mon petit stock de bouteilles à livrer ou à déguster en terre ardéchoise.
Après un printemps très hivernal, l’Alsace connaît un premier épisode caniculaire en cette mi-juin…37° à l’ombre, c’est beaucoup trop pour moi, heureusement que notre Route des Vins, qui fête son soixantième anniversaire cette année, nous offre une série d’adresses vigneronnes où le vin est bon et la cave bien fraîche.
Comme le conseille le Ministère de la Santé « En cas de chaleur excessive, les personnes âgées doivent penser à se rafraîchir et à s’hydrater ».
Il n’y a donc pas de temps à perdre…Hoppla, c’est parti !


Domaine Bernard Bohn à Reichsfeld


La très bonne tenue des pinots noirs de Bernard Bohn lors d’une session A.O.C. consacrée à ce cépage, m’a donné l’envie d’aller me reperdre une nouvelle fois au pied de l’Ungersberg, pour rendre une seconde visite à ce vigneron et goûter quelques unes de ses dernières cuvées : les rouges bien sûr mais également son étonnant crémant millésimé qui reste 6 ans sur lattes avant d’être mis en vente.

87951271-o.jpgEn arrivant au domaine Bohn…

Avec cette chaleur écrasante qui rend quasiment impossible le travail dans la vigne sur les flancs du Schieferberg, je retrouve Bernard Bohn et son fils, au frais dans le garage, en train de monter un impressionnant outil pour le palissage à l’avant de leur tracteur flambant neuf.
Dans ces conditions climatiques un peu hors normes, la vigne pousse à tout va et il est grand temps de « tirer la première ficelle pour remonter les rameaux ». Mais avec le soleil au zénith, le travail sur les coteaux devient vite trop pénible, c’est pour cette raison d’ailleurs que ma visite a été programmée en début d’après-midi : rien de tel qu’une petite dégustation à la fraîche lorsque le soleil tape aussi fort qu’aujourd’hui !

Crémant d’Alsace Millésime 2004 : le nez est suave et raffiné avec des notes très complexes de fruits rouges et de fruits secs, soutenues par une pointe épicée et une fine touche minérale, la bouche est ample et vineuse avec une bulle d’une grande délicatesse, les arômes de fruits rouges (framboise, fraise des bois) s’épanouissent et persistent longuement en finale.
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Avec un 2004 tout aussi réussi que l’incroyable 2003, j’ai obtenu la confirmation que j’étais venu chercher aujourd’hui, les crémants millésimés de Bernard Bohn sont grands !

Sensibilisé à l’esthétique des crus champenois par un stage de formation sur la fameuse Côte des Blancs, ce vigneron élabore une cuvée haut de gamme en assemblant à parts égales pinots noirs et chardonnays vendangés à maturité optimale. L’élevage sur lattes dure 6 ans, le remuage est entièrement manuel et le dosage est fixé après dégustation de divers échantillons. « En 2004, les raisins ont été récoltés assez m ûrs, en bouteille vin fini titrait près de 13° d’alcool et nous avons trouvé que le dosage idéal se situait à 6g/l ».
Un aromatique complexe, une structure puissante, un toucher crémeux, tout en gardant un côté rafraichissant et désaltérant…j’ai l’impression que ce crémant a tout pour combler l’amateur le plus exigeant. MIAM !!!

Charbohnnay 2010 : le nez est délicat sur les fruits blancs avec une touche de chlorophylle, en bouche on sent un joli gras et un volume conséquent, le fruité reste bien présent et la finale étire cette belle aromatique soutenue par une fraîcheur très agréable.
Cette cuvée 100% chardonnay, vinifiée à la bourguignonne, présentée dans une bouteille bordelaise et baptisée d’un nom assez improbable (composition entre le nom du cépage et celui du vigneron…) représente assez bien le côté facétieux et un peu provocateur de Bernard Bohn.
Je n’étais pas très enthousiaste lors de ma première rencontre avec ce vin, mais là je dois avouer que ce charbohnnay qui semble avoir atteint sa vitesse de croisière aujourd’hui, s’est goûté avec beaucoup d’agrément cet après-midi.

Pinot noir Les Roches Rouges 2007 : le nez s’ouvre sur des notes finement torréfiées et réglissées avant de développer un registre très « noir » (réglisse, cerise noire, quetsche), la bouche est bien charnue avec une trame tannique souple et une belle présence minérale en finale.
Pinot noir Les Roches Rouges 2008 : le nez est plus discret mais toujours dédié aux fruits noirs (mûre, griotte), la bouche est ample avec une acidité profonde et une finale longuement aromatique.
Pinot noir Les Roches Rouges 2011 : le nez est flatteur et nettement plus « rouge » avec des notes de bigarreau assez prononcées, la bouche est généreuse avec un toucher très caressant.
Comme son nom l’indique cette cuvée est issue principalement de pinots noirs récoltés sur des parcelles gréseuses (80% sur grès et 20% sur schistes). Elle a été élevée 16 mois en barriques d’âge différent (peu ou pas de bois neuf).
Cette mini verticale nous fait découvrir des vins avec une aromatique complexe (mais avec des notes de cerise comme constante), dotés d’une belle présence en bouche qui allie avec élégance une structure solide et une matière généreuse.

Pinot noir Les Roches Rouges 2012 : le nez très réservé délivre de fines notes de fruits noir, la bouche possède une matière ample et concentrée avec un toucher agréablement velouté.
Le vin est encore en cours d’élevage et l’échantillon dégusté provient d’un assemblage de 2 barriques. Discret au plan olfactif mais étonnant par la qualité de sa texture en bouche, ce pré-assemblage du dernier millésime révèle un très beau potentiel.

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Pinot noir 2012 : le nez présente une légère réduction à l’ouverture avant de révéler de discrètes notes fruitées, en bouche c’est une autre histoire…les notes de cerise rouge explosent et la matière se pose avec volupté, ample, profonde et longuement aromatique en finale.
Cette cuvée a été élaborée par le fils de Bernard Bohn à partir de raisins sélectionnés sur les parcelles des « Roches Rouges ». Vinifié avec un tiers de vendange entière et sans ajout de SO2, ce pinot noir encore en cours d’élevage se distingue par son volume et sa grande gourmandise en bouche…très prometteur !

Riesling 2012 : le nez est déjà très racé avec des notes d’agrumes frais et de silex, en bouche la matière est gourmande et très bien équilibrée avec un jus riche et fruité soutenu par une acidité pointue et longue qui donne déjà une belle impression de profondeur.
Deuxième cuvée expérimentale du fiston, ce riesling qui provient du lieu-dit Oberhagel sur le Schieferberg a été récolté mûr (13°-13°5) et vinifié sans S02 (2g sur le moût).
Malgré ses 5 g de SR, le jus possède déjà un très bel équilibre avec une aromatique précise et une présence en bouche qui révèle un vrai potentiel.


Comme je l’ai déjà senti lors de mon précédent passage à Reichsfeld, Bernard Bohn est un vigneron qui assume pleinement un côté artiste toujours à la recherche de nouveauté, tout en prônant une exigence absolue dans son travail à la vigne et en cave.

Sa gamme de vins est large et diversifiée et ses cuvées montrent le plus souvent de très fortes personnalités susceptibles de bousculer un tant soit peu les canons esthétiques alsaciens.
Le crémant 2004 se situe parfaitement dans cette logique : mûr, vineux et crémeux avec une expressivité un peu baroque qui peu surprendre un palais trop formaté…mais qui me fait fondre de plaisir pour la deuxième année consécutive.
Même si la série de millésimes récents goûtés cet après-midi présentaient déjà des profils très séduisants, les cuvées rouges du domaine Bohn sont résolument conçues pour défier le temps…comme cet incroyable Roches Rouges 2004 qui a bluffé tous les dégustateurs lors de notre session A.O.C. consacrée à ce cépage.

Les deux vins présentés par le fiston ont montré un niveau de maîtrise déjà très solide et un esprit de recherche pour exprimer avec encore plus de force la nature des terroirs de Reichsfeld…j’ai comme l’impression que la synergie père/fils va encore faire progresser la production de ce domaine !

87951401-o-1.jpgVue sur une partie du Schieferberg à la sortie du village

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