Tournée printanière dans le vignoble alsacien : visite au domaine François Schmitt à Orschwihr

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Malgré un agenda vinique déjà bien chargé avec un nombre considérable de comptes-rendus à publier, je n’ai pas hésité à accepter l’invitation de mon ami François qui m’a proposé de l’accompagner dans une petite tournée dans le vignoble alsacien en compagnie d’un couple de cavistes californiens.

Avec mon niveau pitoyable en anglais, je ne vais pas forcément pouvoir vanter autant que je voudrais la beauté de mon vignoble préféré et la grande qualité des vins qui y sont produits…mais bon quand il s’agit de défendre l’Alsace je suis toujours prêt à me surpasser !!!
Le programme du jour est assez « copieux » puisqu’il va nous emmener dans 3 domaines réputés : François Schmitt à Orschwihr, Paul Kubler à Soulzmatt et Paul Ginglinger à Eguisheim.
Hoppla « Let’s go » !


Domaine François Schmitt à Orschwihr

 

Avec une session A.O.C. programmée dans quelques jours dans ce même domaine, notre première visite du jour chez Myriam et Frédéric Schmitt a des airs de « répétition générale » mais je ne vais pas bouder mon plaisir…ces vignerons comme leurs vins méritent amplement qu’on les rencontre plusieurs fois dans l’année !

Notre visite commence par un petit tour dans les locaux professionnels en compagnie de Frédéric pendant que Myriam s’occupe des clients installés dans la grande salle de dégustation du domaine.

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Le parc à barriques du domaine…

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…et le cuvage où s’affinent les vins de 2017.

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Des plants de pinots noirs de la maison Hebinger (sélection massale du Clos des Epenots à Pommard) prêts à être replantés.

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L’oenothèque de domaine qui commence à avoir fière allure.

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Retour au caveau...

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…pour une longue séquence de dégustation orchestrée par Frédéric Schmitt.

Fédéric nous propose de découvrir la gamme du domaine cépage par cépage…et nous commençons par les cuvées de Pinot Noir :

Pinot Noir Rosé 2016 : nez ouvert et bien fruité, bouche vineuse, équilibre frais, finale légère avec des amers salivants.
Pinot noir Rouge 2017 : nez marqué par une légère réduction, jus riche et très gourmand en bouche, finale sapide sur la cerise acidulée.
Pinot noir Cœur de Bollenberg 2015 : nez flatteur, notes de cerise noire bien mûre sur un fond lacté/fumé encore un peu présent mais qui commence à s’intégrer harmonieusement dans la palette aromatique, matière puissante structurée par des tanins mûrs et une profonde salinité, finale longue et pleine d’énergie.

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Cette jolie triplette nous présente trois versions différentes du pinot noir alsacien.
Le rosé séduit par son côté juteux et désaltérant alors que le rouge qu’on a dégusté un peu trop jeune, révèle une présence en bouche qui laisse deviner de jolies expressions fruitées à venir. Voilà deux vins qui seront parfaitement à leur aise sur une tablée estivale pour accompagner des grillades ou un plateau de charcuterie.
La cuvée haut de gamme travaillée à la bourguignonne (avec 50% de vendange entière sur ce millésime) est pleine de belles promesses et pourra surement tenir tête à quelques grands vins rouges de la Côte de Beaune pour peu qu’on lui laisse encore un peu de temps pour s’affiner en cave.


Les Crémants :

Crémant Blanc de Blancs : olfaction séduisante, notes de fleurs et de céréales, matière ample, mousse onctueuse, finale vive et sapide.
(70% auxerrois + 20% pinot blanc + 10% chardonnay)
Crémant Rosé : fruité ouvert et charmeur, un peu sirop de grenadine, rondeur agréable en bouche, finale légère et suave.
(100% pinot noir)
Crémant Blanc de Noirs : nez discret, palette raffinée, notes fruitées et crayeuses, ample et puissant en bouche, bulle très fine, finale longue, sillage citronné relevé par une salinité intense.
(100% pinot noir du Bollenberg – assemblage de jus de 2013 et 2014 – 30% des vins élevés en barriques)
Crémant Cœur de Cuvée Extra Brut 2008 : nez discret et très complexe, matière concentrée, mousse crémeuse, équilibre très droit et finale minérale de grande longueur.
(2/3 pinot noir + 1/3 chardonnay – dégorgement : janvier 2018)

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Avec ces 4 cuvées bien typées, le domaine Schmitt propose un choix très intéressant de bulles alsaciennes : un blanc de blanc expressif et convivial, un rosé festif et séducteur, un blanc de noirs de très haute tenue – pour moi c’est depuis toujours l’un des meilleurs crémants d’Alsace – et une grande cuvée disponible uniquement en magnum dont la texture et la complexité évoque un beau champagne de gastronomie…il y en a pour tous les goûts et pour toutes les occasions. MIAM !


Une nouveauté :

Alsace 2017 : nez expressif avec des notes de fruits blancs et une fine touche amylique, matière souple, équilibre très aérien, finale bien « glissante ».

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Voilà une cuvée d’assemblage des 7 cépages alsaciens qui va faire son apparition dans la gamme du domaine : vinifié avec finesse et précision ce petit « condensé d’Alsace » a tous les arguments nécessaires pour conquérir un large public. Joli coup !


Les cuvées de Pinot Blanc

Pinot blanc 2016 : expression olfactive discrète mais très agréable, bouche légère, finale sapide relevée par de beaux amers.
(70% auxerrois + 30% pinot blanc)
Pinot blanc Bollenberg-Auxerrois 2016 : nez encore un peu retenu mais d’une belle pureté, bouche ample et onctueuse, finale tonique avec une présence saline appétante.
(100% auxerrois)
Pinot Blanc Croix du Sud 2016 : nez ouvert et charmeur, notes de citron vert et de chlorophylle, matière charnue en bouche, équilibre droit, finale bien tendue avec un sillage complexe, fruité frais et boisé subtil.
(100% pinot blanc – élevage en barriques)

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La gamme de pinot blanc nous offre également 3 interprétations différentes de ce cépage : un caractère simple et consensuel pour la première cuvée, un profil plus riche et déjà marqué par une belle minéralité pour le vin du Bollenberg et un style bourguignon pleinement assumé et très prometteur pour l’incroyable pinot de la « Croix du Sud ». MIAM !


Un petit intermède avec un sylvaner et un muscat

Sylvaner Bollenberg 2016 : nez discret, palette complexe sur les fruits blancs et l’herbe séchée, belle densité en bouche, acidité large, notes minérales et légèrement pimentées en finale.
Muscat 2016 : nez floral très intense, matière svelte en bouche, équilibre très droit, finale tendue et bien salivante.

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Né versant sud du coteau du Bollenberg – sur le lieu-dit « Effenberg » en voie d’être classé 1° cru – ce sylvaner est un vin droit et minéral qui fera merveille sur des fruits de mer ou des poissons grillés.
La cuvée de muscat qui est issue d’un assemblage à parts égales de muscat d’Alsace et de muscat Ottonel développe une aromatique expressive tour en gardant une certaine rigueur en bouche…voilà le compagnon idéal pour les asperges ou un saumon fumé.


Les cuvées de Riesling

Riesling 2016 : nez fin et légèrement miellé, bouche assez large mais silhouette élégante, finale citronnée très stimulante.
Riesling Bollenberg 2016 : nez discret sur les agrumes frais, bouche ample et plus dense tenue par une acidité puissante, finale ciselée et déjà bien minérale.
Riesling Grand Cru Pfingstberg 2016 : nez pur et cristallin, notes de citron et de zestes d’agrumes, matière svelte et étirée en bouche, finale très salivante.
Riesling Grand Cru Pfingstberg-Paradis 2016 : nez plus riche et plus ouvert, palette florale et miellée, matière concentrée, acidité massive, grande profondeur structurelle, finale longue et minérale.

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Pas sûr que la photo corresponde… !

La cuvée « générique » est ouverte et accessible bien que solidement structurée alors que le riesling du Bollenberg – né sur le lieu-dit Effenberg comme le sylvaner –commence déjà à montrer son caractère de vin de terroir…ça promet !
Malgré des expressions aromatiques encore très timides, les deux Grands Crus affirment la noblesse de leur origine par leur présence en bouche dense et tramée par une maille acide/saline bien identifiable : une structure légère et étirée avec un grain tannique salivant pour la cuvée issue de la parcelle gréseuse (Buntsandstein) située dans la partie haute du Pfingstberg et une acidité minérale plus large, plus massive  et plus profonde pour la cuvée « Paradis » née sur une parcelle de grès calcaire (Muschelkalk) située dans le secteur central du Grand Cru…de très belles quilles en devenir !

 

Les cuvées de Pinot gris

Pinot Gris 2016 : nez bien ouvert, notes de céréales torréfiées et d’herbes aromatiques, aromatique très suave en bouche mais structure bien solide, finale tonique avec un joli sillage sur la verveine.
Pinot Gris Bollenberg 2016 : nez expressif et bien mûr, notes de fruits jaunes juteux, matière ample avec un joli gras, équilibre assez généreux en milieu de bouche, finale plus énergique avec une belle présence saline.
Pinot Gris Le Maréchal 2015 : nez marqué par un élevage ambitieux et qualitatif, notes balsamiques de résine et de menthe sur un fond fruité discret, bouche déjà bien en place, matière dense avec un gras sensuel, ligne acide longue et solide qui tient fermement la structure tout en donnant un côté bien sapide à la finale.

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Si les rieslings du domaine Schmitt font de plus en plus parler d’eux dans les sphères œnophiles – de façon tout à fait logique d’ailleurs – les cuvées de pinots gris méritent également une mise en lumière car j’ai bien l’impression que Frédéric maîtrise de mieux en mieux l’art de vinifier ce cépage.
La cuvée « générique » est à la fois gourmande et digeste et la cuvée du Bollenberg nous ravit par son  fruité pur et sa belle structure minérale en bouche.
A l’instar du grand vin rouge du domaine (« Cœur de Bollenberg »), le pinot gris « Le Maréchal », né sur le terroir marno-calcaire du versant ouest du Bollenberg, a été travaillé à la bourguignonne (avec 20% de bois neuf) et révèle dès à présent des qualités organoleptiques qui rappellent certains crus de la côte de Beaune. MIAM !


Les cuvées de Gewurztraminer

Gewurztraminer 2016 : nez flatteur et bien mûr, notes de brioche grillée et de fruits jaunes sur un fond délicatement mentholé, bouche suave et très souple, finale légère et digeste avec des amers salivants.
Gewurztraminer Bollenberg-Cuvée Marie-France 2016 : nez fruité et épicé, bouche ronde et bien déliée, expression aromatique douce et séduisante, finale digest avec un long sillage épicé et vanillé.
Gewurztraminer Grand Cru Pfingstberg 2016 : nez très fin avec de belles notes florales, matière en demi-corps qui enrobe une acidité mûre, silhouette oblongue très élégante, finale sapide avec des amers nobles relevés par une belle salinité.
Gewurztraminer Grand Cru Pfingstberg 2015 : expression olfactive riche et intense, notes de fruits mûrs et d’épices douces, matière opulente en bouche, équilibre généreux mais finale très digeste avec un long sillage épicé et réglissé.
Gewurztraminer V.T. 2015 : nez intense et complexe, notes de fruits blancs confits, de vanille et d’épices, matière ample, équilibre moelleux mais sans excès de lourdeur, vivacité qui rebondit en finale pour lui donner une belle énergie, sillage long et complexe sur les fruits et les épices.

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J’ai toujours beaucoup aimé les gewurztraminers de ce domaine, en particulier parce qu’ils n’hésitent pas à affirmer un caractère épanoui et séducteur sans pour autant devenir trop démonstratifs : derrière des expressions aromatiques complexes et un poil aguicheuses on sent toujours des présences en bouche qui révèlent une belle vinosité et une trame minérale bien définie.
Les deux premières cuvées sont des petites friandises qu’on peut s’offrir dès à présent alors que les deux vins du Pfingstberg semblent encore loin de leur optimum même s’ils se montrent déjà d’un abord fort agréable aujourd’hui.
Issue d’une très vieille vigne – une parcelle centenaire – située sur le terroir de marnes bleues du le lieu-dit « Luft », la cuvée de vendange tardive a parfaitement intégré sa richesse naturelle (80g de SR) grâce à une structure acide/minérale qui donne une belle énergie à la finale.

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On a bien travaillé non !

Après ce « petit apéritif », la famille Schmitt nous invite à partager le déjeuner, histoire de goûter quelques flacons que Frédéric est allé prélever dans l’oenothèque du domaine.

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Déjeuner convivial avec la famille Schmitt

Je n’ai pas pris de notes précises sur les 4 bouteilles ouvertes au moment du repas mais j’ai été particulièrement marqué par la tenue exceptionnelle du pinot blanc Croix du Sud 2010 – quelle finesse ! – et par le sublime riesling Paradis 2007 – plus de 10 ans au compteur, un grand vin dans la force de l’âge. Double MIAM !

La cuvée de pinot noir Cœur de Bollenberg 2009 a eu besoin d’un peu de temps pour laisser parler son fruité pur et profond alors que le gewurztraminer Grand Cru 2007 a fini nos agapes en douceur en compagnie d’un excellent munster.

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Le quatuor qui a animé notre déjeuner


Je ne compte plus mes visites chez Myriam et Frédéric Schmitt et pourtant je suis surpris à chaque fois par l’enthousiasme et la générosité qui animent ce couple de vignerons lorsqu’il s’agit de partager quelques moments autour de notre passion commune.
L’ami François voulait montrer à ses visiteurs d’outre atlantique qu’on savait recevoir et faire du bon vin en Alsace…et je crois qu’il ne s’est pas trompé lorsqu’il les a amenés du côte d’Orschwihr.
« IT’S AMAZING » aura été la phrase que j’ai le plus entendue ce jour…et je crois que ça venait vraiment du cœur !

La longue série de vins dégustés m’a permis de redécouvrir l’ensemble de la gamme produite par ce domaine.
Grâce à des pratiques viticoles vertueuses (bio et bio-dynamie) et à des vinifications d’une grande précision, Frédéric Schmitt arrive à créer des vins très purs qui expriment avec une grande authenticité le message minéral des grands terroirs d’Orschwihr.
Ses cuvées d’entrée de gamme sont des modèles de finesse et de buvabilité et sa collection de crémants offre à tout amateur de bulles un choix cohérent de bouteilles avec un rapport Q/P défiant toute concurrence.
Les grandes cuvées nées sur le Bollenberg ou le Pfingstberg se trouvent tout naturellement au sommet de la pyramide qualitative du domaine Schmitt : ce sont des vins qui brillent par leur complexité et leur énergie minérale mais qui ont toujours besoin de quelques années de garde pour donner la pleine mesure de leur talent…les sublimes 2007 dégustés lors du déjeuner (pinot blanc Croix du Sud et riesling Pfingstberg-Paradis) nous en ont apporté une preuve éclatante aujourd’hui !

Mille mercis à Myriam et Frédéric pour ces beaux moments…et à très bientôt !

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