Après une session de septembre très festive – et sans thème précis, si ce n’est la convivialité – le club AOC ouvre la saison 2018-2019 avec deux séries de vins que tout sépare :
1. Des vins de la Moselle française : très peu connus et nés dans une région où peu de gens savent qu’on y trouve de la vigne…moi en premier, jusqu’à ma visite de ce printemps au Château de Vaux.
2. Des vins de la Côte Rôtie : bien plus célèbres mais rares et convoités par les amateurs du monde entier.
La série de crus mosellans a été composée par mes soins avec des bouteilles achetées directement au Château de Vaux et d’autres commandées chez un caviste spécialisé dans les produits gastronomiques lorrains.
Les flacons de Côte Rôtie proviennent des caves individuelles des membres du club.
Les vins blancs de Moselle ont été débouchés juste avant le service et les rouges ont été ouverts 1 heure 30 avant leur dégustation.
Les bouteilles de Côte Rôtie ont été ouvertes et épaulées 2 heures 30 avant leur dégustation.
Toutes les bouteilles sont présentées étiquettes découvertes.
Verres Spiegelau Expert
Soirée Club AOC du 12 octobre 2018 à La Wantzenau
En guis de mise en bouche :
Alsace Mont Saint Georges 2016 – Domaine R. Roth à Soultz : nez très flatteur, notes de tarte au citron, de brioche au beurre sur un fond un peu fermentaire (levain), matière consistante avec une texture assez grasse mais un équilibre bien vif, finale sapide et délicatement vanillée.
Cette bouteille proposée par Stéphane et servie à l’aveugle, m’a fait une belle impression : c’est un vin propre et gourmand avec un jus riche et un boisé subtilement dosé…j’ai pensé à un Pinot Gris « Le Maréchal » de Frédéric Schmitt.
Issue d’un assemblage de pinot gris et de sylvaner élevé en barrique cette cuvée nous a permis de découvrir un domaine en plein progrès. MIAM !
Thème 2 : les quelques grands noms de la Côte Rôtie vont-ils nous faire grimper vers des sommets viniques ?
Côte Rôtie Rozier 2014 – Domaine C. Pichon à Chavanay : finesse et élégance au nez, palette assez « carnée » et sanguine sur un fond poivré et finement boisé, bouche puissante avec une matière dense et structurée, finale longue et sapide, sillage épicé et fumé.
(terroir – schistes – 90% syrah + 10% viognier – élevage : 13 mois en fûts neufs majoritairement)
Après cette série mosellane très hétérogène, cette première bouteille de Côte Rôtie a assuré son statut de grand vin avec une grande facilité : malgré son jeune âge, cette cuvée vinifiée par Christophe Pichon a révélé un caractère à la fois puissant et sensuel et nous a fait entrer de la plus belle manière qui soit dans l’univers esthétique de ces grands vins rhodaniens. MIAM !
Côte Rôtie Château d’Ampuis 2011 – Domaine Guigal à Ampuis : nez complexe et raffiné, notes de fruits noirs discrètes et fines nuances boisées, matière dense, équilibre précis, tanins fondants, finale sapide avec une très grands persistance aromatique sur les épices et les herbes de garrigue.
(terroir : gneiss, sables argileux et micaschistes – 93% syrah + 7% viognier – élevage : 38 mois ans en fûts neufs)
Côte Rôtie La Barbarine 2011 – Domaine Gangloff à Condrieu : nez ouverte et très complexe, notes de bouillon de viande, d’épices douces, de laurier et de tomate confite, bouche opulente, acidité et trame tannique enrobées par une chair très gourmande, finale longue et très douce.
(terroir : granit – 100% syrah – élevage : fûts de 2 à 3 vins)
La dégustation se poursuit avec ces deux grosses pointures de l’appellation qui ont montré que leur réputation n’était pas usurpée même si leurs façons de s’exprimer se sont révélées très différentes.
La cuvée du Château d’Ampuis a brillé par son élégance très aristocratique alors que La Barbarine d’Yves Gangloff s’est livrée de façon un peu plus spontanée tout en développant un caractère plus terrien…mais quels beaux vins. Double MIAM !
Côte Rôtie Les Rochains 2009 – Domaine Bonnefond à Mornas : nez discret et complexe, registre épicé et minéral (notes pierreuses), attaque assez douce mais présence en bouche qui monte progressivement en puissance, matière dense et serrée, tannins qui accrochent un peu, finale énergique mais un poil alcooleuse avec un sillage sur le noyau de cerise et la pierre à fusil,
(terroir : schistes sur Côte Brune – 100% syrah – élevage : 24 mois en barriques neuves)
Ce vin qui s’est très bien goûté au débouchage, semble s’être un peu resserré après quelques heures d’aération pour laisser une impression de force et de rigueur qui a un peu secoué mes papilles.
Les vignes de la Côte Rôtie ont vraiment souffert en 2009 et cette cuvée qui semble en porter les stigmates (dureté des tannins et richesse en alcool) aura surement besoin de quelques années supplémentaire en cave pour trouver l’harmonie et la sérénité.
Côte Rôtie Amphoralis 1999 – Domaine Levet à Ampuis : nez intense et complexe, notes de baies et de feuilles de cassis, épices douces et bâton de réglisse, matière vive et structurée en bouche, silhouette longiligne tenue par une trame tannique un peu dure, finale fraîche, limite austère, sillage réglissé et minéral.
(terroir : schiste – 100% syrah – élevage : 24 mois en demi-muids)
Côte Rôtie La Chatillonne 1999 – Domaine Vidal-Fleury à Ampuis : nez noble et racé, poudre à canon, fruits noirs et épices, matière dense et très onctueuse, équilibre parfait, finale sapide, longue rémanence épicée et réglissée.
(terroir : gneiss et sables argileux sur Côte Blonde – 88% syrah + 12% viognier complantés – élevage : 4 ans en fûts)
La cuvée Amphoralis est restée dans la ligne « éditoriale » des vins du domaine Levet (dont le club a déjà programmé une petite verticale en 2013) en révélant un profil sans concession avec une présence en bouche plutôt virile alors que La Chatillonne m’a littéralement subjugué par sa finesse et sa classe.
Voilà deux bouteilles qui nous présentent deux visions très différentes de cette appellation…mais en ce qui me concerne c’est MIAM et coup de cœur pour La Chatillonne.
Côte Rôtie Côtes Brune et Blonde 1990 – Domaine Guigal à Ampuis : victime d’un bouchage défectueux, la doyenne de la soirée n’a pas pu nous offrir le bouquet final espéré.
(terroir : gneiss, sables argileux et micaschistes – 96% syrah + 4% viognier – élevage : 3 ans en fûts)
Dommage…
Pour conclure :
Malgré une fin de série gâchée par une bouteille défectueuse – déception d’autant plus grande que ce vin semblait arrivé à son optimum de maturité – cette sélection a prouvé que ces coteaux viticoles aux pentes souvent effrayantes permettaient à des vignerons courageux de produire des vins vraiment exceptionnels.
Les 6 cuvées « valides » ont révélé des expressions aromatiques complexes et des matières en bouche à la fois voluptueuses et solidement charpentées.
Cépage dont le fort caractère est exacerbé par les conditions extrêmes imposées par ce terroir exigeant, la syrah de Côte Rôtie a besoin d’élevages très longs et de quelques années sous verre pour exprimer la plénitude de son talent.
Ce sont des vins difficiles à produire, difficiles à acheter – les prix sont quand même très élevés – et pas si faciles que ça à déguster en dehors d’un repas…même si quelques flacons nous ont vraiment donné beaucoup de plaisir ce soir.
Dans ce sextuor de grands vins, mes coups de cœur se porteront sur deux bouteilles : en premier lieu, La Chatillonne 1999, une merveille d’équilibre et de classe qui semble être arrivée tout prêt de son plateau de maturité optimale et, en second lieu, la cuvée du Château d’Ampuis 2011, encore bien jeune mais qui révèle déjà cet équilibre subtil entre puissance et raffinement.
Merci à tous ceux qui accepté d’effectué un prélèvement dans leur collection de grands vins pour partager ces quelques moments de bonheur papillaire avec les membres du club AOC.
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