Journée Portes Ouvertes au domaine Muré - Edition 2018
Comme chaque année, le début du mois de décembre est marqué par un rendez-vous incontournable pour tout œnophile alsacien qui se respecte : la journée « Portes Ouvertes » au domaine Muré à Rouffach.
Cette manifestation constitue depuis 2016 la dernière étape de mes « vadrouillages » dans le vignoble alsacien…histoire de finir comme il se doit une année riche en belles rencontres viniques.
Hoppla c’est parti !
En ce premier dimanche de décembre je retrouve avec plaisir l’équipe du domaine mobilisée au grand complet pour assurer un programme toujours très intéressant : visite de cave, découverte des nouvelles cuvées, dégustation de vieux millésimes et ateliers gastronomiques…on ne le dira jamais assez, mais la famille Muré sait recevoir sa clientèle !
Il est 11 heures et la cave du domaine Muré commence à se remplir.
La famille Muré est au service comme René, le père…
…ou Thomas, le fils.
Avant de profiter des petites gourmandises proposées à tous les visiteurs – des huîtres, du presskopf, des knacks et les fromages de Jacky Quesnot – je commence par déguster une première série de cuvées signées Muré...voilà un apéritif comme j’aimerais en avoir un tous les dimanches !
Pinot Blanc Les Iris 2017 : nez discret, palette florale très suave, matière longiligne, équilibre vif, belle présence saline en finale.
Gewurztraminer Orchidées Sauvages 2017 : expression olfactive très flatteuse, notes d’agrumes mûrs et de fleurs d’acacia, matière riche, acidité large, finale assez guillerette avec un beau sillage épicé.
Ces deux cuvées font partie de la gamme « vins de cépage » dont les flacons seront bouchés avec une capsule à vis à partir du millésime 2017.
Leur dégustation révèle des aromatiques pures et séduisantes et des présences en bouche équilibrées et digestes…voilà une dégustation qui commence vraiment bien, vivement la suite !
Capsule à vis pour tous les vins de cépage du domaine Muré.
Crémant d’Alsace Constellation : nez plutôt discret avec de fines nuances de fruits blancs et de fleurs des prés, équilibre sec en bouche mais texture assez grasse, mousse fine et stimulante, finale bien fraîche.
Crémant d’Alsace Grand Millésime 2013 : nez sur le froment et la mie de pain avec de petites touches fermentaires, vineux et sec en bouche, bulle délicate, finale salivante avec de beaux amers minéraux.
Malgré un changement de nom, l’ancienne cuvée « Prestige » reste tout à fait dans tradition d’excellence qu’elle perpétue depuis de longues années : réalisé à partir de l’assemblage de vins de 2015 et 2016, ce crémant fera merveille à l’apéritif mais pourra aussi être placé à table avec un poisson blanc en sauce ou une bouchée à la reine.
Comme souvent, la grande cuvée millésimée se montre un peu plus austère avec un équilibre plus droit et une présence minérale qui lui donnent un grand potentiel gastronomique : il se plaira surement en compagnie de fruits de mer, de poissons nobles, de crustacés…et peut-être même avec choucroute royale !
Pinot Noir Côte de Rouffach 2016 : robe très claire, notes de petits fruits rouges au nez, matière svelte, structure légère, finale vive et sapide.
Pinot Noir V 2017 : fruité mûr et complexe au nez, jus consistant avec une grande profondeur structurelle, trame tannique veloutée, finale sapide relevée par une présence minérale sensible.
Pinot Noir Clos Saint Landelin 2017 : nez très discret avec un caractère plus austère, matière très concentrée, structure assez anguleuse mais tanins qualitatifs, finale longue tenue par une puissante salinité.
Entre un Côte de Rouffach 2016 frais, fruité mais un peu léger à mon goût et un Clos Saint Landelin 2017, très puissant mais encore verrouillé à double tour, la cuvée V 2017 nous offre une version pleine et très aboutie d’un grand pinot noir alsacien.
J’aime de plus en plus les pinots noirs de ce domaine et ce ne sont pas ces 3 bouteilles qui vont remettre en question ce coup de cœur.
VDF Syrah 2017 : nez complexe avec des notes de fruits noirs, de violette et de réglisse, bouche dense et massive, finale fraîche et digeste, sillage délicatement épicé.
Plantée il y a une dizaine d’année par René Muré sur les terrasses du Clos Saint Landelin, cette vigne expérimentale de syrah produit un vin rouge très corsé mais d’une très belle gourmandise…une cuvée avant-gardiste qui prouve qu’avec le réchauffement climatique qui se confirme hélas d’année en année, ce cépage peut gagner sa place en Alsace.
Sylvaner Steinstuck 2017 : nez encore réservé mais très pur, matière concentrée acidité bien en place, très belle salinité en finale.
Riesling Clos Saint Landelin 2015 : nez complexe, palette florale délicate sur un fond de zestes d’agrumes et de terpènes, matière compacte, structure ample mais finale qui peine encore à trouver son équilibre des amers et une chaleur alcooleuse qui ne se répondent pas encore.
Avec sa trame minérale très sensible en bouche, le sylvaner Steinstuck 2017 confirme que ce cépage est parfaitement en mesure d’engendrer de beaux vins de terroir alors que le Riesling 2015 du Clos Saint Landelin cherche encore un peu son équilibre optimal et aura besoin de quelques années supplémentaires pour intégrer la générosité de son jus (14°5) et laisser s’exprimer le terroir de ce Grand Cru.
Je pense que l’un comme l’autre ont encore besoin de temps pour donner toute la mesure de leur potentiel…patience !
Petite pause restauration avant la suite :
Les huîtres « Fines de Claires Marennes Oléron » sont prêtes à être gobées…mais pas par moi !
Les knacks attendent d’être sorties de leur bain d’eau chaude...
...et la famille Quesnot est au service des fromages.
L’assiette de fromages et un gewurztraminer V.T. 2010 du Clos Saint Landelin qui a réalisé un accord remarquable avec un Cashel Bliue Fermier (fromage à pâte persillée irlandais).
Reprise du travail après quelques knacks et une assiette de fromages affinés avec un « atelier terroir » qui nous propose de déguster 4 pinots gris :
Pinot Gris Côte de Rouffach 2016 : nez très engageant avec une palette fruité et florale bien complexe, bouche riche avec une chair généreuse mais un équilibre bien sec (2g de SR), finale sapide et délicatement épicée.
Pinot Gris Lutzeltal 2016 : nez très charmeur, notes de fruits jaunes bien mûrs, matière concentrée équilibrée par une acidité vive et filante, finale digeste avec une présence saline qui stimule la salivation.
Pinot Gris Clos Saint Landelin 2016 : nez plus discret, palette complexe très élégante (fruits blancs et fleurs des prés), matière dense, acidité centrée et bien fondue, salinité intense qui apporte du tonus à la finale.
Pinot Gris Clos Saint Landelin 2010 : olfaction suave et très complexe, silhouette longiligne très élégante, équilibre droit, toucher bien gras, finale fraîche et appétante.
Vinifiées et élevés avec une belle maîtrise en évitant ces excès de richesse qui peuvent fatiguer les papilles, ces 4 cuvées de pinot gris séduisent par la finesse de leurs expressions aromatiques mais surtout par la pureté et l’équilibre de leurs jus.
Voilà un joli quatuor qui se situe dans la ligne de ces pinots gris « modernes » qui me plaisent de plus en plus…et qui commencent à refaire leur apparition dans ma cave.
Pour terminer cette visite au domaine Muré, je sélectionne 3 cuvées moelleuses parmi les 7 proposées aux visiteurs du jour :
Sylvaner Gris Clos Saint Landelin-Cuvée Oscar 2016 : nez mûr et charmeur, palette complexe sur la pêche blanche et les fleurs (muguet, sureau), matière assez puissante en bouche avec un équilibre riche, acidité souple, finale avec une belle présence saline.
Avec des paramètres œnologiques assez impressionnants (36 g de S.R. et 7,9 g d’A.T.), ce très beau sylvaner révèle déjà une parfaite gourmandise tout en laissant deviner l’empreinte de son terroir d’origine qui aura besoin d’encore un peu de temps pour se dessiner avec plus de précision. MIAM !
Muscat Clos Saint Landelin V.T. 1992 : nez « explosif » sur la menthe poivrée et le camphre, silhouette assez gracile en bouche mais équilibre encore bien « jeune », aromatique suave et complexe, finale sur le cuir et le camphre.
Comme les muscats d’Alsace ont en général une durée de vie assez limitée dans ma cave – en fait, je les débouche dans l’année – je suis toujours ravi de pouvoir déguster un muscat plus âgé, surtout lorsqu’il provient d’un grand terroir comme le Clos Saint Landelin. MIAM !
Gewurztraminer Clos Saint Landelin S.G.N. 2009 : olfaction intense avec des arômes de raisin sec et d’épices douces sur un fond grillé, matière d’une richesse extrême mais acidité tranchante et longue qui équilibre parfaitement la bouche, finale digeste et longuement aromatique.
Ce gewurztraminer qui révèle un style très « Trockenbeerenauslese » (8° - 290 g de S.R. – 9g d’A.T.) est un vin vraiment immense : les éléments constitutifs sont d’une force peu commune mais se répondent dans un dialogue tout à fait harmonieux.
Voilà un vin qu’on peut apprécier dès aujourd’hui mais que l’amateur patient pourra garder en cave durant les prochaines décennies.
Pour conclure :
J’ai toujours autant de plaisir à commencer l’hiver en passant ces jolis instants de gourmandise au domaine Muré : pour moi, c’est l’une des plus belles « Journée portes Ouvertes » du vignoble alsacien…tout simplement !
Après une visite complète en 2017, je me suis limité cette année aux différentes activités de dégustation organisées par l’équipe du domaine Muré au grand complet…mille mercis et bravo à tous.
En ce qui concerne les vins, j’ai très bien goûté les deux cuvées de la gamme « cépages » : des vins délicats et sociables offrant un excellent rapport Q/P.
Les pinots noirs 2017 sont prometteurs, même si c’est la cuvée « V » qui s’est montrée la plus séduisante aujourd’hui et les 4 pinots gris de l’atelier « terroirs » nous ont permis de redécouvrir les potentialités de ce grand cépage…surtout lorsqu’il est vinifié avec la justesse et la précision qu’on retrouve depuis toujours dans le travail de ces grands vignerons alsaciens.
Après l’incroyable cuvée de pinot gris S.G.N. 2007 qui m’avait mis une claque retentissante l’année dernière, ce sera le gewurztraminer S.G.N. 2009 du Clos Saint Landelin qui montera sur la plus haute marche de mon podium personnel du jour : c’est le genre de vin qui me fait prendre conscience de la pauvreté de ma prose vinique bien incapable de décrire mes sensations et mes émotions. Désolé !
Le club AOC de La Wantzenau toujours bien représenté, lorsqu’il s’agit de vider quelques godets !
Ajouter un commentaire