Journée de rebouchage de vieux flacons au domaine Schmitt à Orschwihr - Partie 1
Que ce soit pour une visite classique, une journée de vendanges ou une session AOC délocalisée, le domaine François Schmitt d’Orschwihr est devenu depuis quelques années, l’une de mes adresses fétiches du vignoble alsacien.
Frédéric et Myriam Schmitt sont toujours prêts à ouvrir leurs portes pour accueillir des œnophiles désireux de partager avec eux leur passion pour la chose vinique…et c’est ainsi qu’en ce dernier jour de vacances d’hiver, ce couple de vigneron a décidé d’inviter quelques amateurs pour une journée de rebouchage des vieilles bouteilles de l’œnothèque du domaine.
J’ai eu l’occasion de participer à une telle opération il y a quelques années dans la cave du château de Kientzheim et j’ai trouvé cette expérience intéressante et formative…donc pas d’hésitation, je vais être obligé de sécher une journée du « Salon des Vignerons Indépendants de Strasbourg »pour me rendre à Orschwihr et découvrir quelques trésors cachées dans la cave « secrète » de la famille Schmitt.
Hoppla, c’est parti !
Une petite photo prise au printemps 2018 pour ceux qui ne connaissent pas encore.
Le groupe de « reboucheurs » du jour compte une petite dizaine de membres avec Myriam et Frédéric Schmitt, Stéphane Wasser (qu’on ne présente plus), Alain Schmitt (le frérot qui travaille pour la maison DIAMS), Seb Huet (le Caviste Curieux de Vielsalm) et son épouse, un autre caviste belge et François (le papa) qui vient régulièrement voir si tout se passe bien…et si les cuvées qu’il a vinifiées ont encore des choses à raconter.
Une opération de rebouchage des vieux flacons vise plusieurs objectifs :
- éliminer les bouteilles défectueuses (vins oxydés, bouchonnés, liégeux)
- refaire le niveau du vin dans les bouteilles à conserver
- remettre une faible dose de SO2 (2ml ou moins) dans les vins
-remettre un bouchon neuf sur les bouteilles.
Bouteilles, verres, crachoirs, entonnoirs et solution de SO2…tout est en place pour la séance de rebouchage.
On prélève les flacons dans l’oenothèque…
…et on débouche.
Une opération qui peut s’avérer très compliquée dans certains cas…
…avec des bouchons plus ou moins fatigués.
Une série prête à être dégustée.
La dégustation des vins doit identifier les défauts rédhibitoires et établir une petite hiérarchie qualitative parmi les flacons d’une même série : les bouteilles défectueuses sont éliminées, les meilleures sont conservées et l’une d’entre-elles est sacrifiée pour refaire les niveau des autres.
On complète le niveau du vin dans la bouteille…
…on rajoute le SO2 à la pipette…
…et on mesure une dernière fois le niveau du vin dans la bouteille avant le nouveau bouchage.
Une série rebouchée DIAMS…prête pour les prochaines décennies !
La séance commence par les cuvées de Pinot Noir
1983 : 1 bouteille
Fruité encore frais, bouche légère, finale en place, belle complexité.
Verdict : pas de rebouchage…la bouteille sera servie avec le repas de midi. Youpi !!!
1985 : 1 bouteille
Vin très fatigué
Verdict : bouteille éliminée.
1990 Cuvée Alain : 4 bouteilles
Une mise spéciale pour une fête de famille, texture très agréable, belle fraîcheur finale.
Verdict : 3 bouteilles en pleine forme + 1 bouteille « liégeuse » éliminée.
1991 : 1 bouteille
Un pinot noir assez austère mais en place
Verdict : rebouchage avec remise à niveau (quelques ml de PN 1990)
1992 : 7 bouteilles
Un pinot noir austère avec des tanins fermes mais pas agressifs…un vin encore bien vivant.
Verdict : 2 bouteilles fatiguées et éliminées + 5 bouteilles conservées.
1995 : 30 bouteilles
Un pinot noir très droit avec un fruité discret et agréable.
Verdict : pléthore de bouteilles donc exigence absolue…10 bouteilles éliminées.
Une petite partie de la collection de pinots noirs 1995.
1996 Fûts de Chêne : 5 bouteilles
Premier pinot noir travaillé en barriques au domaine, un vin frais avec un joli fruit et un boisé bien fondu.
Verdict : série très homogène reçue 5 sur 5.
1997 Fûts de Chêne : 12 bouteilles
Un très beau pinot noir, charnu, fruité et épicé.
Verdict : 10 bouteilles rebouchées et élimination de 2 bouteilles un peu moins bonnes…mais nous avons été très sévères !
2001 Fûts de Chêne : 3 bouteilles
Un pinot noir sec et longiligne…pas très expressif mais bien vivant.
Verdict : 3 bouteilles validées et remises à niveau.
2003 Cœur de Bollenberg :
Une aromatique raffinée, notes de fruits noirs, de violette et de résine avec une légère touche de volatile, très belle tenue en bouche, finale fraîche et juteuse.
Verdict : une bouteille goûtée juste pour le plaisir et pour voir comment se portait la première cuvée Cœur de Bollenberg produite au domaine…très bien, merci !
15 ans passés et forme éblouissante pour le premier Cœur de Bollenberg…
…avec un bouchon qui ne suscite pas d’inquiétude particulière.
L'heure de l’apéritif approchant nous passons du côté des blancs avec quelques cuvées de Sylvaner :
1983 : 2 bouteilles mortes
Verdict : dernier voyage vers l’évier.
1994 : 2 bouteilles
Herbes séchées au nez et belle fraicheur en bouche, un vieux sylvaner comme j’aime !
Verdict : 2 bouteilles conservées.
1995 : 5 bouteilles
Aromatique plus discrète, vif et léger en bouche, finale fraîche.
Verdict : 4 bouteilles conservées et rebouchées, 1 bouteille éliminée.
1997 : 6 bouteilles
Frais et complexe au nez, très belle tenue en bouche, finale sapide.
Verdict : 5 bouteilles impeccables, 1 bouteille en peu moins bonne éliminée.
2002 L’Exotique du Bollenberg : 15 bouteilles
Un sylvaner récolté en surmaturité qui s’exprime avec une belle gourmandise, notes de fruits jaunes, de pâte de coing et d’herbe séchée, bouche suave et finale vive et appétente.
Verdict : grande chelem pour la série…je pense que ces bouteilles sont taillées pour tenir encore quelques années, lustres, décennies…
Verre blanc pour une série de sylvaners de haute tenue !
Petit exercice pour terminer la série des sylvaners : dégustation comparative de deux vins du même millésime mais bouchés de manière différente :
Bollenberg 2007 bouché synthétique : aromatique oxydative, bouche fatiguée, finale aqueuse.
Bollenberg 2007 bouché liège : zesté et bien nerveux au nez, jus frais en bouche, finale salivante.
Test comparatif entre 2 sylvaner Bollenberg 2007…l’aspect de la robe est déjà très parlant !
La dernière étape avant le repas de midi, nous permet de goûter quelques Pinots blancs :
Pinot blanc 1998 : 3 bouteilles
Fraîcheur, vivacité et belle gourmandise…une longévité « stupéfiante » pour une bouteille qui a du se vendre bien moins de 5 euros au moment de sa sortie.
Verdict : 3 bouteilles conservées.
Auxerrois Fût de chêne 2003 : 1 bouteille
Belle énergie, aromatique très jeune, boisé subtil, finale longue et appétente dans un style très « bourguignon ».
Verdict : 1 bouteille débouchée…et servie pour accompagner le déjeuner.
Une petite pépite de la réserve Schmitt…
…qui se trouve en compagnie d’autres jolis flacons sur une table bien garnie. MIAM !
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