Visite au domaine Pierre Henri Ginglinger à Eguisheim

J’ai découvert le domaine Pierre-Henri Ginglinger en 2015 à l’occasion d’une opération « Portes Ouvertes » organisée par Mathieu et son épouse dans leur grande maison d’Eguisheim…et comme cette première rencontre avec ce vigneron et ses vins a été tout à fait convaincante, je n’ai pas hésité à braver la canicule de ce début août pour participer à cette nouvelle journée festive destinée à présenter la production vinique signée Ginglinger à la clientèle professionnelle du domaine.

Comme les messages d’alerte à la canicule se multiplient en conseillant aux personnes âgées de se mettre au frais et de boire beaucoup, le néo-sexagénaire que je suis va donc profiter de cet évènement pour suivre scrupuleusement les recommandations de nos instances sanitaires nationales…vite une cave et quelques bouteilles !

La place du château à Eguisheim…


…et l’entrée du domaine P.H. Ginglinger.


Le caveau est préparé pour accueillir les dégustateurs.

Dès 15H30, l’ensemble des vins actuellement disponibles à la vente ainsi qu’une série de vins encore en cours d’élevage et quelques flacons prélevés dans la réserve personnelle du vigneron étaient proposées à la dégustation…un programme conséquent – 34 bouteilles quand même ! – mais très alléchant. Allez, on y va !

Il y a de beaux outils de travail…


…quelques lamelles de fromage et du pain pour se refaire le palais…


…et surtout une très belle série de bouteilles…


...présentées par cépages sur 6 tables.

Table 1 : sylvaner, pinots et muscat.

Sylvaner 2017 : aromatique classique, notes d’herbe sèche avec de petites touches citronnées, vif et assez puissant en bouche, amers nobles en finale.
Sylvaner 2016 : nez séduisant, notes de pomme verte et de fleurs des prés, un peu plus léger que le 2017 mais la finale est tout aussi qualitative.

Pinot Blanc 2017 : expression olfactive pure et délicate, ample et charnu en bouche, finale généreuse.
Pinot Blanc 2016 : nez floral très agréable, matière longiligne très élégante, aromatique suave, finale sapide avec un petit grain tannique très stimulant.

Très joli tir groupé pour ces 4 cuvées d’entrée de gamme qui nous donnent une petite leçon de simplicité et de gourmandise : les 2017 sont plus corsés et les 2016 plus sveltes mais dans tous les cas la buvabilité est au rendez-vous. MIAM !

Ambre 2016 : nez fin et opulent, notes de fruits jaunes frais avec quelques nuances résineuses très discrètes, bouche élégante avec un équilibre sec et un joli gras, finale bien sapide.
Ambre 2009 : nez plus évolué avec une palette « classieuse » sur l’amande et le pain grillé sur un fond de menthe poivrée, bouche équilibrée avec un gras très « bourguignon » qui donne la réplique à une acidité droite et bien en place, finale étirée, bien fraîche.

Cette cuvée issue d’un assemblage de pinot auxerrois et de pinot gris vinifié et élevé en demi-muids, révèle un style bourguignon assumé et recherché par le vigneron. C’est un vin qui sort un peu des codes esthétiques alsaciens, mais quand on arrive à ce niveau de qualité, je crois que la question de la typicité ne se pose plus.
C’est très bon tout simplement !

Muscat 2017 : nez assez explosif, arômes de fleur de sureau et de bonbon acidulé, bouche souple et gourmande, finale courte mais bien digeste.

Cet assemblage de muscats ottonel et de muscats d’Alsace, est une petite bombinette aromatique mais la bouche manque un peu de tonicité…c’est plus un vin à sentir qu’à boire.

Un groupe de dégustateurs à la table des rieslings

Table 2 : les rieslings

Riesling Tradition 2017 : nez pur et très frais, belles notes florales et citronnées, matière svelte, équilibre sec et digeste, finale ciselée, très appétante.

Riesling Grand Cru Ollwiller 2015 : nez discret, finement zesté, matière en demi-corps tenue fermement par une acidité large, salinité intense et immédiate qui soutient une logue finale.
Riesling Grand Cru Ollwiller 2013 : nez plus ouvert, notes fruitées (orange amère) et naphtées, acidité puissante fondue dans une matière assez consistante où on perçoit une légère présence tannique, finale nette et salivante.

Riesling Grand Cru Eichberg 2016 : nez pur et discret, matière svelte tenue par une acidité bien large, équilibre très digeste, finale vive et sapide.
Riesling Grand Cru Eichberg 2015 : nez complexe et séduisant, notes d’agrumes sur un fond floral délicat, matière ample et suave, acidité en place mais moins saillante que sur le 2016, très belle présence saline en finale.

Les 5 premiers rieslings de cette longue série nous donnent un joli récital d’expressions de terroir avec des Ollwiller aux lames acides affutées, des Eichberg remarquables d’élégance et de gourmandise et surtout une cuvée « Tradition » parfaitement vinifiée qui séduit par sa précision et sa pureté. MIAM !

Riesling Grand Cru Eichberg 2002 : nez très « jeune » sur les agrumes frais, matière longiligne, équilibre tonique, très belle finale citronnée et minérale.
Riesling Grand Cru Eichberg 1996 : nez agréable, palette plus évoluée sur la brioche, le pain grillé et les agrumes mûrs, matière ample acidité solide et longue.

Voilà  deux rieslings d’âge respectable qui portent leurs années avec beaucoup d’aisance et qui nous rappellent que l’Eichberg est un terroir capable d’engendrer de grands vins de garde : le 96 est un peu plus fluet mais son arête acide est encore bien solide alors que le superbe 2002 se trouve surement sur son plateau de maturité optimale mais bien malin qui pourra dire durant combien de temps il va y rester. Impressionnant !

Riesling Nature 2016 : nez assez « nature », notes de raisin frais, de pomme tapée et de marc, bouche impressionnante d’énergie, acidité vive et rayonnante, grain tannique sensible, finale « punchy » avec un sillage minéral marqué.

Réalisée à partir des premiers jus de presse des rieslings de l’Ollwiller, cette cuvée en barriques depuis les vendanges 2016 est encore en cours d’élevage.
Malgré une expression aromatique encore un peu brouillée, ce vin impressionne par sa présence en bouche : jus dense, texture grenue, acidité tranchante et salinité prononcé. MIAM !

Table 3 : les pinots gris

Pinot Gris Tradition 2017 : nez fin et très discret, matière riche, aromatique suave, finale propre et digeste.

Pinot Gris Grand Cru Ollwiller 2014 : nez très réservé mais très belle présence en bouche, acidité solide, jus riche et salin, finale nette et sapide.
Pinot Gris Grand Cru Ollwiller 2013 : nez plus expressif, notes de fruits jaunes sur un fond minéral racé, présence envahissante en bouche avec une matière large et opulente, finale qui s’étire progressivement avec un beau sillage fumé et minéral.

Pinot Gris Grand Cru Pfersigberg 2015 : discrets effluves floraux au nez, matière longiligne et très suave, finale glissante avec une belle présence saline.
Pinot Gris Grand Cru Pfersigberg 2014 : nez ouvert et bien frais, matière élancée tirée par une acidité bien en place, finale vive et fruitée.

Ces 5 cuvées de pinot gris sont très bien faites et s’expriment avec un certain classicisme mais aujourd’hui aucune d’entre-elles ne m’a fait vraiment vibrer.
En fait, je crois que je préfère ce cépage quand il est vinifié à la bourguignonne…et ça Mathieu Ginglinger le fait remarquablement bien dans sa cuvée Ambre.

Pinot Gris Grand Cru Pfersigberg 2002 : nez raffiné, palette fruitée complexe avec une présence minérale sensible, matière assez dodue, aromatique suave, finale puissante, sillage minéral et légèrement fumé.

Après plus de 15 années en cave ce pinot gris Grand Cru a gagné en complexité et en distinction en nous proposant une interprétation généreuse et raffinée de ce cépage.
Voilà une bouteille qui confirme qu’un pinot gris bien né est un vrai vin de garde.

Table 4 : les gewurztraminers

Gewurztraminer Tradition 2017 : nez fin avec de belles notes florales et une fine touche grillée, expression aromatique très suave, matière opulente, finale digeste et délicatement poivrée.
Gewurztraminer Cuvée Saint Léon 2017 : expression aromatique semblable à celle de la cuvée tradition, bouche plus concentrée avec une chair plus épaisse et une finale plus intense.

Gewurztraminer Grand Cru Pfersigberg 2016 : nez flatteur et très élégant, palette exotique bien complexe, bouche suave, finale équilibrée et digeste.
Gewurztraminer Grand Cru Pfersigberg 2004 : nez riche et mûr, notes de miel, de raisin confit et d’épices douces, bouche toute en rondeur avec une aromatique intense, amers salivants en finale.

Gewurztraminer Grand Cru Eichberg 2014 : nez subtil et très séduisant, matière riche, trame acide large et structurante, finale fraîche et délicatement épicée.
Gewurztraminer Grand Cru Eichberg 2008 : nez fringant avec une palette sur la chlorophylle et le poivre blanc, matière très douce en bouche, acidité large mais bien enrobée, amers nobles en finale, long sillage mentholé.

Après une série de pinots gris que je n’ai pas trop bien goutée, les 6 gewurztraminers présentés aujourd’hui nous ont gratifiés d’une prestation collective de haut niveau.
Les 2017 sont remarquables de gourmandise avec une cuvée « Tradition » déjà bien en place et une cuvée « Saint Léon »  – issue d’une vieille vigne sur le ban de Herrlisheim – qui révèle un corps plus massif et plus puissant.
Les cuvées de Grand Cru nous apportent une fois de plus, la démonstration qu’un gewurztraminer né sur un beau de terroir a besoin de temps pour se révéler pleinement : le Pfersigberg 2004 comme l’Eichberg 2008 sont vraiment exceptionnels. Double MIAM admiratif !

Table 5 : les crémants

Crémant Brut : nez floral très charmeur, bouche juteuse, bulle vive et stimulante, finale souple et légère.
(40% riesling + 25% auxerrois + 25% pinot gris + 10% pinot noir – cuvée + taille – jus de 2016)
Crémant Brut Nature-Le Point G : nez raffiné sur le pain grillé et le citron frais, matière élancée, belle tension acide, bulle très fine, finale appétante avec un long sillage aromatique.
(40% riesling + 25% auxerrois + 25% pinot gris + 10% pinot noir – 100% cuvée – 1° jus de 2013 et 2014 vieillis en barriques – tirage en 2016 – 18 mois de vieillissement sur lattes)

Réalisées à partir d’un assemblage identique ces cuvées de crémant nous proposent deux versions différentes de bulle alsacienne : la première bouteille pleine de jovialité et de gourmandise est conçue pour la fête alors que la seconde pleine d’énergie et de classe est faite pour la gastronomie…et peut-être même pour être gardée quelques années en cave.

Table 6 : les pinots noirs

Pinot Noir Rosé 2017 : nez fruité pur mais encore très discret, léger et bien frais en bouche, finale plus loquace avec un joli sillage sur les petits fruits rouges.
Pinot Noir Tradition 2017 : expression aromatique délicate, belle complexité, matière dense et charnue, tanins présents mais déjà bien lisses, finale acidulée et très digeste.

Pinot Noir Rubis 2016 : nez racé avec un fruité profond et un boisé noble parfaitement dosé, matière ample, équilibre vif, tanins veloutés et finale très appétante.
Pinot Noir Rubis 2009 : expression aromatique très discrète, bouche riche et puissante, ligne acide tonique mais finale un peu chaude.

Pinot Noir Rubis 2005 : nez complexe et raffiné, matière svelte très élégante en bouche, finale « classieuse », sillage fruité et minéral avec un boisé parfaitement intégré.

Mathieu Ginglinger aime travailler le pinot noir et ces 5 très jolies bouteilles sont là pour le prouver une fois encore. Le rosé est irrésistible de gourmandise, le rouge 2017 déjà très accessible mais d’une belle profondeur et la cuvée « Rubis » vinifiée et élevée en pièces (12 mois), peut s’aligner sans complexe face à des crus bourguignons avec notamment un 2016 très prometteur et un 2005 qui montre une plénitude qu’on ne retrouve que dans les très grands vins de pinot noir. MIAM !

Après cette longue et studieuse dégustation, il est temps de récupérer et de se détendre un peu en passant à la partie plus festive de cette journée…direction la cour du domaine Ginglinger où nous attendent quelques surprises gustatives.

Tout est en place pour la suite de la soirée…


…avec des verrines très appétissantes…


…un cuisinier en plein travail…


…qui tranche un beau Serrano.


La cuvée Point G est au frais pour l’apéritif…


…mais pour faire sauter le bouchon, il faut arriver à défaire le muselet traditionnel.


Les blancs tranquilles du domaine Ginglinger sont également mis à disposition des invités.


Mathieu aux petits soins avec ses invités.


La soirée est bien lancée…


…et la cour du domaine est de plus en plus animée…


…avec un DJ qui se met en place…le dance-floor pavé du domaine Ginglinger va bientôt chauffer !


Pendant ce temps l’espace de dégustation de l’après-midi s’est transformé : les tables sont installées et dressées pour le service du petit déjeuner du lendemain car le domaine P.H. Ginglinger dispose également de 4 chambres d’hôtes et 2 gîtes pour accueillir les visiteurs de passage à Eguisheim.


La cour vue de la coursive qui donne accès aux chambres d’hôte et aux gites…


…ainsi qu’à une très belle terrasse réservée aux résidents

La soirée est déjà bien avancée et le temps de partir pour retourner en direction de Strasbourg approche…il me reste juste le temps de me faire un dernier petit plaisir pour le dessert :

Riesling V.T. 2014 : nez riche et complexe, notes de fleurs blanches et de citron confit, matière généreuse structurée par une acidité véloce et cinglante, finale pointue très digeste, salinité et minéralité intenses.

Récolté sur un coteau orienté au nord situé sur le ban de Herrlisheim, cette V.T. qui associe puissance et digestibilité est une friandise qui s’offre au dégustateur avec une spontanéité gourmande tout à fait irrésistible.
L’acidité impressionnante (11g A.T.) et la richesse mesurée (70g S.R.) se répondent en donnant une belle impression d’énergie. MIAM !

Ce second passage au domaine P.H. Ginglinger a confirmé la bonne impression laissée par ma visite de 2015.
Mathieu et Stéphanie Ginglinger sont des hôtes sympathiques et attentionnés qui s’investissent sans compter pour mettre en valeur leur production vinique : une dégustation parfaitement organisée et un petit moment de convivialité gourmande qui nous a permis de finir cette soirée estivale dans une ambiance festive et détendue...bravo et merci à tous ceux qui ont œuvré pour nous permettre de vivre ces bons moments !

Le domaine P.H. Ginglinger exploite une quinzaine d’hectares de vignes répartis sur 3 villages différents (Eguisheim, Herrlisheim et Wuenheim) et que Mathieu travaille en viticulture BIO depuis 2001 (certification ECOCERT en 2004).
Les vendanges sont exclusivement manuelles, les jus sont vinifiés et élevés principalement en foudres et les interventions œnologiques sont très limitées : comme tout bon vignerons Mathieu sait que pour faire de beaux vins il faut avant tout de beaux raisins.

Ses cuvées « Tradition » sont d’une qualité irréprochable avec un vrai coup de cœur pour ce superbe riesling 2017qui donne une idée de la qualité de ce millésime en Alsace et qui témoigne du sérieux du travail de ce vigneron.
Les cuvées classées Grand Cru nous offrent un vrai florilège d’expressions de terroir interprétées par différents cépages : des Pfersigberg surprenants avec des palettes aromatiques très exubérantes, des Eichberg généreux et digestes et des Ollwiller solidement structurés par de puissantes charpentes acides.
Les cuvées « Ambre » et « Rubis » sont de brillantes réussites bien installées dans la gamme du domaine…double coup de cœur personnel pour ces bouteilles sur le millésime 2016
Les dernières créations originales du domaine sont également  de très belles réussites avec un crémant haut de gamme capable de faire douter plus d’un « suprémaciste » champenois et un riesling « nature » très prometteur. Bravo !

Quelques infos utiles :

Pour trouver les vins du domaine, vous pouvez vous rendre au caveau situé au centre du village d’Eguisheim ou sur leur site internet qui propose une boutique ne ligne.

Pour voir les hébergements proposés par le domaine : Le hameau d’Eguisheim

 

Le caveau traditionnel du domaine Ginglinger ouvert de 9 heures à 18 heures, 7 jours