Allison est une jeune texane qui travaille comme sommelière dans un « Wine-bar » new-yorkais et qui a décidé de prendre une année sabbatique pour visiter les vignobles de France et d’ailleurs. Après un séjour dans le Jura où elle a participé aux vendanges, Allison a contacté notre ami François pour qu’il l’initie aux mystères des terroirs alsaciens.
Comme mon emploi du temps me permet quelques escapades viniques en milieu de semaine et comme il fait très beau en cette fin d’octobre en Alsace, je n’ai pas hésité une seconde pour me joindre à eux…direction plein sud pour des visites à Orschwihr, Soutzmatt et Niedermorschwihr.
Hoppla, c’est parti !
Etape 1 : domaine Paul Kubler à Soultzmatt.
Comme au domaine Schmitt, chez les Kubler c’est jour de vendanges aujourd’hui mais Philippe Kubler a consenti à réduire la durée de sa pause de midi (sûrement méritée pourtant !) pour nous accueillir dans son caveau et nous présenter sa gamme de vins…Ils sont vraiment trop « classe » les vignerons alsaciens !
Philippe Kubler en tenue de travail dans son caveau de dégustation
Pinot blanc K 2012 : aromatique très discrète au nez, précis et droit en bouche avec une minéralité étonnante en finale.
Kintet 2012 (pinot blanc + pinot noir vinifié en blanc + sylvaner : 70% - muscat : 20 à 25% - riesling : 5 à 10%) : fin et complexe avec un registre très alerte sur les agrumes frais, les zestes et une touche de bourgeon de cassis, droit et nerveux en bouche, finale très sapide et finement citronnée.
Riesling K 2011 : pur et discret au nez, bouche longiligne sur la groseille blanche et la citronnelle, notes légèrement poivrées en finale.
Pinot Gris K 2011 : nez opulent sur les fruits à noyaux bien mûrs, très belle acidité en bouche qui répond à une matière généreuse, l’harmonie n’est pas encore optimale mais la balance entre richesse et tension est parfaite, longueur finale surprenante.
Gewurztraminer K 2011 : nez très raffiné sur un registre floral (violette, guimauve), délicat et très élégant en bouche, finale superbe avec une belle salinité et une fine touche réglissée.
Issus de parcelles de vignes situées dans la « Vallée Noble » les vins de la gamme « K » (comme Kubler) sont des entrées de gamme de toute beauté qui représentent parfaitement le style de vins recherchés par Philippe Kubler : francs, droits et ciselés avec une infinie précision. Leurs palettes aromatiques sont discrètes mais raffinées et leurs silhouettes privilégient l’élégance à l’opulence…des crus qui séduisent davantage par leur finesse que par leur exubérance.
Riesling Breitenberg 2011 : nez pierreux et délicatement citronné, attaque vive en bouche, acidité mûre et très large, matière ample et assez carrée, finale très saline.
Issu d’une parcelle sur un coteau à base gréseuse et calcaire exposé au sud, ce riesling franc, puissant et bien tendu se situe dans la ligne esthétique des cuvées « K » mais qui montre un supplément de densité et de profondeur…Archétypique !
Sylvaner Z 2011 : nez discret et fin sur les fruits jaunes frais et la poire mûre, bouche ample, large, étonnante de puissance, l’acidité est assez souple, finale longue et finement épicée.
Sylvaner Z 2010 : nez plus classique sur les fruits blancs et l’herbe sèche, puissant et solidement tendu en bouche, longueur et salinité imposante en finale.
Les sylvaners récoltés sur le Grand Cru Zinnkoepflé ont engendré deux cuvées dont la puissance peut dérouter…sauf si on les considère comme des Grands Crus avant de les voir comme des sylvaners. Depuis le temps que je pense que ce cépage n’a pas la place qu’il mérite dans le vignoble alsacien, voilà deux vins qui me confortent dans mes convictions. Bravo M. Kubler !
Pinot gris G.C. Zinnkoeplflé 2010 : nez complexe et frais sur les fruits jaunes et le citron mûr avec une petite touche de verveine, svelte et élégant en bouche avec une matière assez musculeuse soutenue par une acidité bien présente, la finale est sapide et longuement aromatique.
Sur ce coteau calcaire pentu et exposé principalement au sud, les Kubler possèdent une parcelle de pinot gris dans la partie sommitale du Grand Cru. L’altitude considérable des vignes (420 mètres) apporte une jolie touche de fraîcheur à ce vin expressif et généreux…MIAM !
Gewurztraminer G.C. Zinnkoeplflé 2010 : nez discret mais particulièrement classieux avec un fruité frais et délicat et de belles notes de rose et de violette, puissance mais élégance très aristocratique en bouche, finale longue, florale et profondément saline.
Lorsqu’on déguste un vin avec une si belle sensation d’équilibre et de plénitude on comprend pourquoi le Zinnkoepflé est considéré comme le terroir de prédilection du gewurztraminer…Magnifique !
La série du jour…un sans faute absolu !
Cette visite qui, faute de temps, a été presque exclusivement dédiée à la dégustation, m’a permis de découvrir une grande partie de la gamme de vins de ce producteur dont j’avais pu apprécier quelques références dans le cadre des sessions avec l’Oenothèque Alsace.
Philippe Kubler revendique un style épuré et sans concession sur toutes ses cuvées : ses vins chuchotent plus qu’ils ne crient mais celui qui se donne la peine de tendre l’oreille (et les papilles) se délectera face à la sincérité et la profondeur de leur message.
Qu’elles soient issues de la gamme « vins de fruits » ou « vins de pierre », toutes les cuvées élaborées par ce vigneron sont conçues pour entrer dans la famille des vins de gastronomie.
Le site de la vallée de Soultzmatt est remarquable, hélas nous n’avons pu que passer rapidement entre ces splendides coteaux couverts de vignes…dommage pour notre sommelière qui, à travers cette dégustation au domaine Kubler, aura pu vérifier que la beauté du paysage pouvait se retrouver dans les vins qui y naissent.
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