Portes Ouvertes au domaine Kreydenweiss à Andlau - Edition 2018
Journées Portes Ouvertes dans le vignoble alsacien – Printemps 2018
Dans le vignoble alsacien, l’arrivée du printemps est marquée par la reprise des manifestations œnotouristques sur la route des vins et comme chaque année c’est le domaine Barmès-Buecher qui a ouvert le bal suivi de près par le domaine Kreydenweiss.
N’ayant pas pu répondre à l’invitation des premiers – mais j’y étais l’année passée – je vais commencer mes visites 2018 en Alsace par un week-end « intense » puisque j’ai prévu de participer à 3 journées « Portes Ouvertes » : le domaine Kreydenweiss le samedi, le domaine Emile Beyer le dimanche et le domaine Ostertag le lundi.
Je sais que ce programme peut sembler ambitieux pour un amateur, même bien entraîné, mais je vais essayer d’être à la hauteur.
Hoppla, c’est parti !
Portes Ouvertes au domaine Kreydenweiss à Andlau
La maison Kreydenweiss sous le regard de l’ourse d’Andlau…
…et la cour du domaine à l’ombre de l’abbatiale Sainte Richarde.
Je ne compte plus le nombre de mes rencontres avec ce vigneron d’Andlau mais je suis toujours aussi impatient d’aller lui rendre cette petite visite printanière pour déguster la nouvelle série de cuvées qui vont être mises sur le marché cette année.
Le programme 2018 propose la série d’animations habituelles – découverte des installations du domaine, présentation des bouteilles disponibles à la vente et découverte de quelques vins en cours d’élevage – mais également une Masterclass « in situ » sur le Grand Cru Wiebelsberg…à laquelle je n’aurais hélas pas le temps de participer.
Avant de passer en cave, je vais visiter le nouveau bâtiment professionnel qui vient d’être inauguré et qui se trouve sur la place de l’abbatiale à quelque pas de la maison Kreydenweiss : deux niveaux de 200 mètres carrés construits dans un esprit « durable » avec comme matériaux principaux le béton brut et le bois naturel.
L’entrée du nouveau bâtiment
L’espace pour l’habillage des bouteilles et la préparation des commandes au rez-de-chaussée
Le sous-sol avec la cave de stockage déjà opérationnelle et un projet d’aménagement d’une d’œnothèque en cours.
Malgré le soleil et le ciel bleu, la température ambiante est encore très basse et c’est donc dans les espaces plus tempérés des caves du domaine que l’équipe Kreydenweiss nous attend pour nous faire goûter leurs vins.
Le duo « Les Escrocs du Swing » assure l’ambiance musicale dans la cour…
…et le four à tartes flambées tourne à plein régime pour permettre aux visiteurs de se restaurer en se réchauffant un peu.
Descente à la cave par l’escalier extérieur au bord de l’Andlau...
...pour une visite guidée de la grande cave à foudres.
L’espace de cuvage aménagé pour la dégustation des vins.
Comme chaque année je commence par goûter quelques vins du dernier millésime :
Pinot Blanc Kritt 2017 : nez prometteur, notes d’agrumes et présence saline déjà sensible, matière généreuse avec un petit grip tannique stimulant, finale propre et délicatement acidulée.
Riesling Andlau 2017 : expression olfactive plus austère, notes de zestes et d’écorce, matière dense et acidité puissante, finale étirée.
Pinot Blanc La Fontaine aux Enfants 2017 : fruité pur et très charmeur sur un fond minéral discret (nuances pierreuses), matière longiligne et très élégante, finale fraîche et saline.
Clos du Val d’Eléon 2017 : nez sur les fruits blancs frais, matière assez carrée, acidité tendue et salinité puissante, finale encore très austère avec des amers minéraux et un sillage très végétal (racine, écorce).
Riesling Clos Rebberg 2017 : fruité discret au nez, notes fermentaires encore sensibles, matière concentrée et finement tannique, structure allongée, finale vibrante de minéralité qui laisse persister longuement de belles nuances salées.
Les 2017 présentés en magnums
Je n’ai pas testé tous les vins de 2017 proposés à la dégustation mais sur les 5 cuvées que j’ai choisi de goûter aujourd’hui – dont certaines n’ont pas totalement fini leurs sucres (les fermentations sont à l’arrêt à cause du froid) – j’ai trouvé des jus purs et généreux structurés par des charpentes minérales de belle facture et équilibrés par des acidités déjà bien en place…bref, des vins très prometteurs avec un style Kreydenweiss bien affirmé.
Les 3 premiers (Kritt, Andlau et Fontaine aux enfants) semblent partis pour jouer dans un registre séducteur alors que les deux vins nés sur les terroirs de schistes, le riesling du Clos Rebberg et surtout Val d’Eléon, révèlent un vrai caractère de vin de garde et demanderont surement quelques années de patience pour donner la pleine mesure de leur talent.
Riesling Grand Cru Wiebelsberg 2016 : nez discret, palette un peu austère qui s’exprime sur un registre plutôt végétal (herbe fraîche, écorce) avec un fond légèrement iodé, matière très longiligne, structurée par une acidité solidement tendue, finale tonique et sillage minéral bien sensible.
Riesling Grand Cru Kastelberg 2016 : olfaction intense, notes de zestes d’agrumes, d’écorce pilée et de pierre à fusil, attaque acide vive et immédiate, matière ample et concentrée, équilibre sec et droit, finale minérale avec des amers salivants et de fines nuances fumées.
Si l’expression aromatique des deux rieslings Grand Cru 2016 m’a un peu dérouté – avec un Wiebelsberg à l’olfaction virile et serrée et un Kastelberg plus ouvert et plus aimable – leur présence en bouche m’a complètement rassuré : le Wiebelsberg développe une matière finement ciselée et le Kastelberg commence à affirmer son caractère puissant et minéral.
Les deux grandes cuvées du domaine sont encore bien trop jeunes pour dévoiler entièrement leur vraie nature…mais le style est déjà bien défini et la promesse de devenir de très beaux vins de terroir est réelle.
Je continue mon voyage gustatif dans la cave Kreydenweiss par la dégustation de quelques vins de 2016 en bouteilles.
La table des vins de fruits de 2016
Pinot Blanc Kritt 2016 : nez ouvert et frais, jus tonique et gourmand, équilibre très aérien, finale citronnée et bien glissante.
Riesling Andlau 2016 : expression olfactive précise sur les agrumes frais et la pierre chaude, structure très élégante avec un équilibre bien droit en bouche, finale fraîche et sapide.
Riesling Andlau 2016 (sans SO2) : aspect un peu trouble, toujours des agrumes au nez mais avec un fond végétal/minéral plus rustique, matière ample stimulée par un léger perlant et des amers minéraux assez puissants, finale longue avec une salinité tactile bien présente.
Sur les tables qui présentent les vins de 2016 déjà en bouteilles, j’ai choisi de regoûter les mêmes cuvées que sur 2017 et j’ai donc démarré par un pinot blanc Kritt toujours aussi gourmand et facile à boire et un riesling Andlau proposé en 2 versions : la première version légèrement sulfitée est déjà bien en place et montre un profil ciselé très caractéristique des vins issus de terroirs gréseux, la seconde version vinifiée sans SO2 est un peu plus rugueuse mais semble plus dense et plus large tout en révélant une minéralité plus marquée.
Pinot Blanc La Fontaine aux Enfants 2016 : nez discret, palette suave et complexe, attaque franche et vive en bouche, matière étirée et finale empreinte d’une grande salinité.
Clos du Val d’Eléon 2016 : profil très minéral au nez, notes de silex et d’épices complétées par une touche fumée, matière ample, équilibre très droit, finale tonique, sillage minéral et épicé (poivre noir).
Les deux bouteilles sélectionnées sur la table « Vins de terroir » affirment leur identité en révélant des présences minérales très bien définies : une ligne acide fine et centrée pour la cuvée née sur le sol granitique du lieu-dit « Fontaine aux Enfants », acidité large et présence saline assez envahissante pour la cuvée née sur les schistes du Clos du Val d’Eléon.
La suite de notre parcours de dégustation nous invite à découvrir une petite verticale de Riesling Grand Cru Wiebelsberg…voilà un joli cadeau pour tout amateur de grands vins d’Alsace :
- 2015 : déjà bien en place avec une expression aromatique séduisante et une matière gourmande, structure très longiligne et finale sapide.
- 2009 : nez bien expressif, palette aromatique mûre, notes de brioche au beurre et de caramel au lait sur un fond légèrement fumé, matière ample mais équilibre bien sec avec une acidité droite qui étire la structure en finale
- 2008 : olfaction fraîche et plus « classique », notes zestées et pierreuses, présence en bouche qui rappelle celle du 2009, structure oblongue avec une finale nette et saline, sillage long sur les agrumes frais.
- 2004 : nez fin et délicat d’une pureté surprenante, notes de fruits blancs frais relevées par un léger fumé, attaque bien souple avec un petit creux en milieu de bouche mais très belle finale propre et digeste avec de beaux amers minéraux.
- 2002 : olfaction plus évoluée mais encore très agréable sur les agrumes mûrs, le miel de fleurs et la guimauve, matière assez consistante, équilibre droit mais finale un peu molle avec un sillage amer et réglissé.
- 1998 : nez qui s’exprime avec discrétion sur un registre bien frais, bouche vive et tonique avec une matière pleine, équilibre très aérien en finale, persistance aromatique très longue, sillage minéral et mentholé.
Cette série de Wiebelsberg qui couvre deux décennies nous apporte une fois de plus la preuve que les grands vins d’Alsace n’ont pas peur du temps qui passe.
Si le 2015 est encore un peu marqué par le côté solaire de son année de naissance, les 2009 et 2008 montrent qu’après 10 ans de garde l’effet millésime s’estompe pour laisser la parole au terroir.
Le 2004 est étonnant de pureté, le 2002 semble être entré dans sa phase de pleine maturité et le 1998 brille par son énergie d’une jeunesse étonnante…un trio très convaincant !
Une fois n’est pas coutume, le temps de ma visite a défilé trop vite et l’heure de repartir vers Strasbourg a sonné…il me reste juste le temps de me faire un dernier plaisir avec un Riesling Grand Cru Kastelberg 2015 : un nez riche et complexe…presque envoûtant avec ses notes de fruits jaunes juteux qui enrobent une présence minérale affirmée, chair épaisse et musculeuse, squelette acide très puissant, équilibre droit, finale bien sapide avec une trame tannique délicate et des amers nobles.
Ce Grand Cru dégusté en cours d'élevage en 2017 laissait déjà deviner de très belles potentialités mais la superbe bouteille servie aujourd'hui dépasse de loin les attentes pourtant toujours très élevées lorsqu'il s'agit d'un vin du Kastelberg.
Le jus très concentré enrobe voluptueusement une puissante charpente acide/saline en donnant un caractère très gourmand à ce Grand Cru qui n'a pas l'habitude de se livrer aussi facilement dans ses jeunes années.
Bien sûr, ça reste un vin taillé pour la garde mais je pense que cette bouteille sera difficile à oublier en cave. MIAM!
La journée « Portes Ouvertes » au domaine Kreydenweiss qui a ouvert mon long week-end de dégustations en Alsace m'a donné l'occasion de constater une fois encore que les vins produits par Antoine et son équipe restent fidèles à cette ligne esthétique qui privilégie la pureté et l'authenticité dans l'expression de chaque terroir : ce sont des vins dont les textures et les structures acides/salines marquent le dégustateur...ils sont sans concession et peuvent se montrer parfois rugueux, parfois caressants mais il seront toujours sincères dans leur manière de délivrer leur message minéral.
Avec un temps de visite un peu plus court que d'habitude et une endurance de dégustateur toujours aussi faible, je n'ai hélas pas pu goûter l'ensemble des vins présentés : il y en avait quand même une bonne trentaine...too much pour moi !
Les cuvées de 2017 encore en cours d’élevage ont révélé des jus très denses structurés par de belles acidités et des trames minérales bien marquées : les attentes liées à un millésime annoncé comme très réussi en Alsace étaient grandes mais les vins du domaine Kreydenweiss relèvent crânement le défi. Bravo !
Si les 2016 jouent la carte de la finesse et de l’élégance avec une grande aisance, le riesling Kastelberg 2015 déploie une puissance hors norme tout en se laissant approcher sans trop faire de manières…le roi de la cave affirme sa place sur le trône et monte sur la plus haute marche de mon podium personnel du jour.
Pour terminer, je dois également relever l’exceptionnelle prestation collective des rieslings qui on composé cette petite verticale de Wiebelsberg : leur tenue dans le temps est impressionnante…chez les Kreydenweiss, il n’y a pas que les Kastelberg qui sont taillés pour résiter face au temps qui passe !
Merci à tous ceux qui ont œuvré pour nous permettre de passer cette belle après-midi.
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