Une belle dégustation de cinsaults rouges

Depuis quelques temps déjà, j’ai l’occasion de goûter des Cinsault purs et non pas pris dans un assemblage divers comme parfois à Châteauneuf. Il est souvent utilisé en Rhône sud, en Provence mais aussi en Languedoc, malheureusement souvent juste pour faire du rosé. Pourtant c’est bien en rouge que j’ai eu envie de le découvrir un peu plus en glanant des bouteilles de tous les côtés et quasi que sur des 100%. Ce cépage du sud a l’air de revenir en grâce. Il faut dire qu’il est plutôt résistant notamment face à la sécheresse et la mode des vins ultras foncés étant passée (ouf !) son jus clair pour un sudiste pose moins de problème à la vente. Last but nos least, son degré d’alcool est souvent plus modéré que ses comparses syrah grenache Mourvèdre et autre carignan. Du coup, alors qu’il a été arraché dans nos campagnes depuis pas mal d’année, des vignerons l’ont remis en selle et l’on peut trouver maintenant pas mal de cuvées à goûter. C’est ce que nous avons fait en ce mois de mai notamment en compagnie pour la plupart des vins de mes amis Gérard et Véronique Sauzon ainsi que Béatrice Fromaigeat et Manuel Cunin, les amis vignerons de la Ferme des Roumanes et du domaine des Deux Terres qui s’intéressent à ce cépage.
Hauts les verres ! … goûtons !


Les 100% cinsault :

VDF Zou Maï 2015 – J. Almansa : tout de suite expressif entre fruité rouge et floral avec une très légère touche de volatile. Agréable en bouche, un vin immédiat qui aura du mal à tenir à l’aération pour tirer un peu sur la cacahuète.

VDF Marie Galante 2014 – Domaine Zélige-Caravent : j’ai goûté plusieurs fois ce vin avec des variations. Ce jour, après une légère réduction, il s’ouvre sur de délicates notes florales, de rose, d’épices douces et de petits fruits rouges. Là encore, il a du mal à tenir à l’air, se fanant un peu dans le verre.

VDF Gourmandise 2015 – Julien Peyras : une bombe dans le verre duquel jaillissent des notes de fraise écrasée. Le vin porte parfaitement son nom tant il est gourmand, sphérique, plein de soleil tout en gardant un côté délicat, frais avec une pointe acidulée. C’est réellement un très bon vin !

Gourmandise et pradel

VDF Le Fond de l’Air est Rouge 2017 – Domaine des Foulards Rouges : en magnum, un peu chahuté à l’ouverture avec notamment une présence de gaz assez importante, il ne va cesser de s’améliorer dans le verre développant de délicates notes florales avec une touche de petits fruits rouges. C’est frais, assez savoureux avec un goût de « reviens-y ». Il faudrait lui laisser encore un peu de temps de bouteille je pense.

Le fond de l air

VDP du Var Cinsault 2015 – Domaine de la Réaltière : un peu de volatile à l’ouverture, une belle fraîcheur réglissée apparait ensuite, puis des notes de rose ancienne. Le vin ne va cesser de s’améliorer au fil de l’aération, devenant plus ample et plus sapide. 24h après, il s’exprime pleinement avec une belle longueur. Très joli vin !

VDF L’Or du Puits 2016 – Terres du Pic : plutôt agréable au nez, plus sombre, fruits noirs, garrigue, la bouche se montre très fluide, aqueuse, sans réelle personnalité et donc sans donner beaucoup de plaisir.

IGP de l’Hérault Le Pradel 2013 – Domaine les Terrasses d’Elise : encore une autre approche, plus d’élevage avec un côté tabac, épicé. C’est un vin mûr, assez dense pour ce cépage, qui mérite d’être aéré voire carafé. De jolies notes de cerise se développent sur une belle trame qui s’étire en longueur. Je lui trouve juste un peu trop de chaleur sur la finale.

VDP Coteaux du Salagou L'Œillade 2015 - Mas des Chimères  : le bouchon m’a inquiété et à juste titre. Si le nez est assez sympa, sudiste, garrigue avec une pointe de fruits noirs puis de figue, la bouche a une touche acétique qui gâche le joli jus qu’il y avait derrière. J’avais déjà goûté cette cuvée qui d’ordinaire oscille entre caractère et délicatesse. Dommage…et à revoir ! La cuvée porte mal son nom car le domaine précise bien qu’il s’agit de cinsault et non d’œillade !

IGP Côtes Catalane On s’en Fish 2016 – Domaine Gardiès : le vin le plus au sud, dans le Roussillon : Une jolie couleur soutenue, assez soutenue quand même, entre le fruit à noyau et la fleur. Il respire le soleil, avec une pointe d’herbes aromatiques.  Un vin plein, même si j’aurais aimé un peu plus de naturel pour exprimer au moins tout le talent de ce joli jus.


Les vins d’assemblage à dominante de Cinsault :

Côte de Provence Cuvée St Saux 2014 – Domaine du Clos de la Procure : le second vin de Provence, belle région de vin qui malheureusement préfère produire d’abord les vins de cinsault avec avant tout des rosés techniques et insipides…ce n’est pas le cas des Dupéré-Barrera notamment avec cette cuvée complétée de grenache issue, d’un terroir de schistes. On sent l’élevage et c’est ce qui me chagrine un peu car le jus est joli, très provençal dans son expression, olives noires, thym, sarriette, et cette touche réglissée, fraîche que l’on retrouve parfois dans les beaux Mourvèdre. Je ne pense pas que le cinsault aime le maquillage et un élevage trop poussé l’éteind plus qu’il ne le met en valeur à mon goût. Mais cela reste un bon vin.

AOP Languedoc 2015 - Les Vignes Oubliées : un cinsault accompagné de syrah grenache et carignan. C’est très mûr, un peu confiture de fraise accompagné d’épices, de poivre noir. Le profil est super séducteur, un peu fatiguant je trouve avec notamment une impression un peu pâtissière, pâte d’amande, qui fatigue un peu. La finale serre un peu avec un côté végétal.


Un pirate :

VDP Coteaux du Pont du Gard Clin d’œil 2015 – Domaine Mas Lau : Pirate…. ? Pas tant que çà car il s’agit d’un 100% œillade, un cousin. Un très joli nez fait de fraise, un peu confiture, de garrigue. La bouche marque un peu avec un trait végétal mais sans excès (vendange entière ?) J’ai presque une impression de fleur sucrée comme de l’acacia, c’est super gourmand et très agréable à boire. J’avais mal goûté une autre cuvée du domaine, me voilà réconcilié et comme ce n’est pas loin de chez moi…

Tous les flacons

Cette dégustation était vraiment un plaisir ! Nous nous sommes régalés avec la plupart des vins qui présentaient pour l’essentiel de jolies couleurs, des nez agréables et des bouches fraîches, déliées, sapides, avec un alcool non prédominant. Le Cinsault ne permet pas seulement des bons canons de soif, ce qui serait déjà pas mal ! La plupart avaient du fond sans parler de puissance. Je pense que le millésime 2017 va mettre encore plus en avant ce cépage dans le Sud Est de la France, car il est clair que dans le futur, nous allons aligner de plus en plus de millésime dans ce style. Après une campagne d’arrachage et de dénigrement, il est certain que ce cépage sudiste est sur la voie du retour en grâce sur nos tables, et c’est tant mieux !!!
 


Cyril Amelin - mai 2018

 

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