Le vignoble vu des hauteurs de Pupillin
Reportée pour cause de mauvaise météo l’été dernier, cette sortie « grimpe et picole » en Franche Comté a enfin pu se réaliser cette année…et voilà notre petit groupe de cinq amateurs de vins et de sensations fortes parti pour deux journées dans le Doubs et le Jura pour tâter le rocher du côté de Nans-sous-Sainte Anne et rencontrer quelques vignerons à Arbois et à Pupillin.
Notre groupe en pleine séance contemplative toujours sur les hauteurs de Pupillin
Après l’effort matinal du premier jour nous allons effectuer notre récupération active dans la cave du domaine Ratte à Arbois et dans la cave du domaine de La Borde à Pupillin.
Le lendemain, la persévérance de notre amie Valérie nous a permis d’obtenir un rendez-vous avec Pierre Overnoy…une rencontre exceptionnelle avec un vigneron mythique du Jura.
Hoppla, c’est parti !
Domaine de La Borde à Pupillin
C’est bien là !
La seconde longueur de corde de notre « via picola » jurassienne se fera à Pupillin avec une visite chez un vigneron recommandé par Maxime Edel…et comme ce jeune caviste de La Wantzenau originaire du Jura connaît très bien ce vignoble et ses bonnes adresses gourmandes, nous suivront donc son conseil en allant terminer cette première journée dans la cave du domaine de La Borde en compagnie de Julien Mareschal et de ses vins.
Julien Mareschal a crée ce domaine en 2003 en constituant progressivement un patrimoine viticole qui représente aujourd’hui 5,5 hectares de vignes qu’il travaille en bio et en biodynamie depuis près de 10 ans.
Un peu pris de court par notre visite – il avait « zappé » le rendez-vous pris par Valérie – il nous propose quand même de faire un tour de cave pour nous présenter ses vins en cours d’élevage.
Julien Mareschal à la pipette pour nous servir une première cuvée de chardonnay
Arbois Pupillin Chardonnay- Terre de Lias 2018 : nez discret, notes florales et pierreuses, bouche svelte et élégante, structure ciselée par une acidité fine et bien mature, finale longue et salivante.
(Terroir : argilo-calcaire sur marnes bleues du Lias – élevage : 12 mois en demi-muids et foudre)
Avec sa structure étirée et sa trame acide/minérale déjà bien dessinée ce premier chardonnay annonce le style de vin recherché par Julien Mareschal : droiture, pureté et minéralité…vivement la suite !
Arbois Pupillin Chardonnay- La Marcette 2018 : nez très discret qui laisse deviner de belles notes de fruits blancs, matière un peu plus ample mais finale étirée par une ligne acide bien tendue.
(Terroir : marnes rouges du Trias – élevage : 12 mois en demi-muids)
Le second chardonnay prélevé sur fût s’exprime avec une grande timidité mais développe un jus dense et équilibré qui promet quelques belles émotions gustatives à venir.
Arbois Chardonnay- Côte de Caillot 2018 : nez plus ouvert et très raffiné, notes d’agrumes frais et de poudre de craie sur un fond légèrement fumé, matière bien charnue structurée par une acidité mûre et large, finale saline et appétante.
(Terroir : calcaire du Bajocien – élevage : 12 mois en demi-muids)
Avec son esthétique un peu plus « bourguignonne » le troisième chardonnay du domaine de La Borde est une cuvée de très haute tenue qui séduira à coup sûr les amateurs du genre…dont je fais partie d’ailleurs !
La Côte de Caillot vue de la maison de Julien Mareschal
Arbois Pupillin Savagnin 2017 : nez ouvert et assez riche, notes de fruits jaunes et de pain grillé, matière ample et concentrée, équilibre suave, finale persistante avec quelques amers et de belles nuances minérales.
(Terroir : marnes bleues et grises du Lias – élevage : foudre)
Cette cuvée réalisée avec « les savagnins rescapés de 2017 qui ont produit 12 hectolitres sur 2 hectares », paraît un peu plus riche que les chardonnays mais sa constitution nous laisse envisager son avenir avec confiance.
On passe au rouge dans la cave du domaine de La Borde
Présentation des différents éléments géologiques qui constituent les terroirs de Pupillin
Arbois Pupillin Pinot Noir-Sous la Roche 2016 : fruité pur et complexe au nez, matière charnue et gourmande, équilibre tonique, finale fraîche et bien glissante.
(Terroir : éboulis calcaires du Bajocien sur marnes bleues – élevage : 10 mois en fûts de 228 l.)
Avec son jus qui développe une élégance très bourguignonne mais avec une finale marquée par un caractère plus « montagnard », cette cuvée nous livre une très belle interprétation d’un pinot noir jurassien. MIAM !
Arbois Pupillin Trousseau 2018 : nez ouvert et expressif, notes de fruits noirs frais et d’épices sur un fond légèrement fumé, mâchu et consistant en bouche, acidité fine et léger perlant, finale énergique et salivante, sillage fruité et poivré.
(Terroir : marnes rouges – élevage : 10 mois en fûts de 228 l.)
Chez Julien Mareschal comme au domaine Ratte, la cuvée de trousseau est réalisée avec la variété qualitative de ce cépage (le trousseau « à la dame ») et une fois encore, je suis surpris et séduit par ce rouge jurassien plein de fruit et d’énergie. MIAM !
Arbois Pupillin Ploussard 2018 : nez loquace et charmeur, notes de fruits rouges (beaucoup de framboise et un peu de groseille…), bouche pleine et juteuse, finale fruitée, fraîche et glissante.
(Terroir : marnes rouges du Trias – élevage : foudre)
Cépage mal-aimé des vignerons jurassien – c’est un « cépage délicat qui demande beaucoup d’attention et de travail » – le ploussard est capable de produire des vins d’une gourmandise irrésistible.
Le « vilain petit canard » du domaine de La Borde a fait un très beau vin en 2018 !
Le « plou-plou » du domaine de La Borde
Arbois Pupillin Vin Jaune 2011 : nez fin et complexe, notes d’épices (safran, curcuma…) et de xerès blanc, bouche ample et puissante, matière très consistante tenue par une acidité massive mais bien mûre et d’une grande longueur, finale intense, sillage persistant sur les épices.
(Terroir : marnes bleues tassées appelées « schistes carton » – élevage : 6 ans et demi sous voile)
Même si les vignerons jurassiens se concentrent de plus en plus sur la production de vins ouillés, on ne pouvait pas terminer cette visite sans déguster un « jaune »…et grand bien nous en a pris car ce clavelin contenait un breuvage à la fois puissant, complexe et d’une finesse exceptionnelle…Magique !
Julien Mareschal est un vigneron qui m’a étonné par la force de ses convictions tout autant que par la qualité d’ensemble de ses vins.
Profitant des conseils précieux de Pierre Overnoy, il a travaillé sa terre et ses vignes pour pouvoir concevoir des vins très purs qui portent l’empreinte profondes des différents terroirs jurassiens.
Ses pratiques viticoles sont très vertueuses et son travail en cave ne laisse que peu de place aux interventions œnologiques. L’usage de SO2 est extrêmement limité mais au domaine de La Borde il n’y a pas de dogme « s’il faut quelques milligrammes à la mise cela ne pose pas de problème ». Depuis 2 ans, Julien utilise le SO2 en dilution homéopathique pour les cuvées de rouge : « et la dilution qui fonctionne le mieux c’est la CH41 »…étonnant, non !
Les chardonnays droits et cristallins sont profondément marqués par la signature minérale de leurs terroirs. Ce sont des vins avec un vrai profil gastronomique que nous avons d’ailleurs pu tester le soir même en dégustant un « Terre de Lias » 2016 pour accompagner notre dîner au « Bistronome », une très belle table d’Arbois où on mange bien et où la carte des vins fait une large place aux crus jurassiens.
Une adresse gourmande à retenir…
Si la cuvée de savagnin qui semblait encore un peu « brouillée », aura besoin d’un peu de temps pour trouver son équilibre idéal, les 3 cuvées de rouges du domaine de La Borde se sont livrés avec une gourmandise vraiment redoutable et le vin jaune qui conjuguait finesse et puissance avec une parfaite élégance a terminé notre dégustation de la plus belle façon qui soit.
Une fois n’est pas coutume, je vais attribuer un coup de cœur général et enthousiaste ce domaine que je suivrai avec beaucoup d’intérêt dans les années à venir.
Apéritif convivial au domaine de La Borde, le lendemain de notre visite, en compagnie de cavistes helvètes…on sait accueillir dans le Jura !
Mille mercis à Julien Mareschal pour son accueil.
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