Visite au domaine Mochel à Traenheim

Le domaine Mochel a été l’une de mes premières adresses régulières dans le vignoble de la Couronne d’Or mais cela faisait bien trop longtemps que n’avais pas rendu visite à ces vignerons de Traenheim…même si je n’ai jamais cessé de goûter leurs vins.

1 1 2
L’entrée encore bien fleurie de la maison Frédéric Mochel à Traenheim.

J’ai eu l’occasion de rencontrer rapidement Guillaume Mochel à l’occasion des derniers salons des vins de Molsheim (en 2016 et en 2017) et les quelques cuvées que j’ai pu déguster sur son stand m’ont convaincu qu’il faudra vraiment que j’arrive à programmer une petite rencontre chez lui avant la fin de cette année.
En ce début octobre, j’ai enfin réussi à caler une première journée de liberté dans mon emploi du temps et Guillaume Mochel est disponible pour m’accueillir au domaine…voilà une bonne occasion à saisir pour faire une petite sortie automnale dans le vignoble alsacien.
Hoppla c’est parti !

1 2 1
Le vieux pressoir du XVIII° siècle qui décore la cour intérieure du domaine Mochel.

Pour commencer Guillaume Mochel nous invite à faire une petite visite de ses installations professionnelles qui ont été rénovées en 2010 : cuvages, caves, chaine d’embouteillage et d’étiquetage et espaces de stockage.

1 3
Les cuves de débourbage qui seront chargées par gravité à partir du pressoir qui se trouve à l’étage supérieur.

2 1 3
Le cuvage inox avec des contenants thermo-régulés de 10 à 30 hl qui permettent une grande souplesse dans la gestion des volumes pour les vinifications et les élevages.

2 2 3
La cave traditionnelle avec des foudres de 40 à 80 hl toujours en service.

2 3 3
L’espace « technique » avec les chaînes d’embouteillage et d’étiquetage.

2 4 1
Une partie du stockage où reposent quelques milliers de bouteilles qui attendent leur mise sur le marché.

Après cette mise en condition qui nous a fait suivre les différentes étapes de la conception du vin au domaine Mochel, nous nous installons dans le caveau de dégustation pour quelques travaux pratiques avec un verre en main.
Le caveau a également été refait à neuf et nous propose un côté « Stube » alsacienne, chaleureux et accueillant et un côté plus contemporain au style épuré très classieux.

3 1 4
Le caveau Mochel, dans sa version traditionnelle…

3 2 4
…et dans sa version moderne…

Le domaine Mochel exploite 10 hectares de vignes dont 5 sur le Grand Cru Altenberg de Bergbieten et produit une gamme de vins qui comprend une vingtaine de références.

3 3
La gamme Mochel présentée dans le caveau de dégustation.

Crémant d’Alsace (2013 – dégorgé en 2016) : olfaction expressive et séduisante, notes de fruits frais (citron et pomme Granny Smith), matière suave équilibrée par une acidité vive et bien en place, mousse onctueuse, finale fraiche et appétente.
Crémant d’Alsace (2014 – dégorgé en 2017) : arômes délicats, palette florale complexe, matière ample avec une joli gras tenue par une acidité mûre et droite, bulle très fine et amers nobles en finale.

4 1 3

Réalisés à partir d’un assemblage très « champenois » (80% chardonnay + 20% pinot noir), ces deux crémants affirment un caractère fringant très festif tout en montrant de la structure et de la vinosité en bouche.
La cuvée 2013 qui a parfaitement intégré son dosage (7 g) nous régale par sa buvabilité exemplaire alors que l’édition 2014 (pas encore au tarif) révèle un style plus complexe et plus gastronomique.


Edelzwicker : nez frais et très gourmand, matière élancée, équilibre frais et structure bien tenue, finale nette et sapide.
Pinot Blanc 2016 : nez ouvert et charmeur, notes florales et fines nuances amyliques, matière assez généreuse structurée par une acidité très droite, finale légère et glissante.

4 2 3

Réalisé à partir d’un assemblage de pinot blanc (80%) et de riesling (20%) cet edelzwicker présenté en litre est une cuvée d’entrée de gamme absolument irréprochable : voilà un vin qui ne laisse aucun doute sur le sérieux du travail de ces vignerons. MIAM !
Avec son côté suave et digeste, ce pinot blanc « Klevner, vinifié exclusivement à base d’auxerrois, est une « friandise » idéale pour accompagner des moments de convivialité. RE-MIAM !


Riesling 2014 : olfaction pure et vivifiante, notes de citron, de zestes d’agrumes et fines nuances terpéniques, matière gourmande mais solidement tendue par une acidité puissante et large (6,9g SR – 10g AT), finale très saline avec un joli retour aromatique frais et fruité.

7 1 6

Ce riesling qui m’a étonné par la force de sa présence minérale en bouche est né sur les parcelles de jeunes vignes (8 à 30 ans) que le domaine Mochel exploite sur le Grand Cru Altenberg de Bergbieten.
Autant vous dire que cette cuvée « faussement » générique offre un rapport Q/P inégalable…voilà une véritable aubaine pour tout amateur de vin d’Alsace.
MIAM !


Riesling Grand Cru Altenberg de Bergbieten-Cuvée Henriette 2014 : nez ouvert et flatteur, notes d’ananas frais et de citron mûr, matière ample et généreuse, présence saline bien marquée, texture légèrement grenue, finale longue et sapide.
Riesling Grand Cru Altenberg de Bergbieten-Cuvée Henriette 2013 : nez discret, expression racée sur le zeste, la poudre de craie et la pierre chaude, matière dense structurée par une acidité stimulante bien large, équilibre très droit, finale étirée qui laisse persister un long sillage minéral.
Riesling Grand Cru Altenberg de Bergbieten-Cuvée Henriette 2012 : nez discret mais bien complexe, belle palette florale et minérale, matière svelte et très élégante tenue par une acidité bien fondue, finale avec de belles sensations salines et un long sillage zesté.
Riesling Grand Cru Altenberg de Bergbieten-Cuvée Henriette 2011 : nez intense et complexe, fruité charmeur et notes minérales sensibles (caillou, plâtre…), matière qui donne une vraie impression de plénitude, équilibre digeste, fine présence tannique, finale intensément saline et long retour aromatique sur les zestes d’agrumes et la pierre chaude.

5 2 3

Véritable emblème du domaine Mochel depuis des années, la fameuse « Cuvée Henriette » naît sur  une vieille vigne plantée dans les années 50 sur le Grand Cru Altenberg de Bergbieten.
Ce sont des rieslings très verticaux avec des acidités structurantes et des présences salines toujours bien marquées : les vins issus des deux millésimes pairs nous offrent une version plutôt sociable et gourmande de ce cépage alors que les deux années impaires ont engendré des rieslings où la minéralité du terroir s’exprime avec une force impressionnante...pour tout dire, je n’attendais vraiment pas le 11 et le 13 à ce niveau : double coup de cœur !


Riesling Grand Cru Altenberg de Bergbieten 2007 : nez complexe et raffiné, palette florale séduisante et fines notes de zestes d’agrumes, matière ample et concentrée, charpente acide/saline bien en place, finale fraîche avec une présence minérale bien salivante.

7 1 6   7 2 6

Servie à l’aveugle par Guillaume Mochel cette cuvée Grand Cru (qui a disparu depuis de la gamme du domaine) assume sa décennie avec une facilité déconcertante : voilà un très grand riesling entré dans la force de l’âge mûr qui s’exprime aujourd’hui avec une belle plénitude et une énergie encore très juvénile.


Muscat 2016 : nez expressif et intense, palette classique sur la fleur de sureau et le raisin frais, matière riche et suave en bouche, équilibre léger et digeste, finale assez courte mais parfaitement digeste.
Muscat Grand Cru Altenberg de Bergbieten 2014 : nez discret, bouquet floral complexe, matière généreuse, milieu de bouche légèrement moelleux, expression aromatique qui gagne en intensité, finale bien sapide.

8 1 5

Réalisée à 100% avec des muscats ottonel, la cuvée 2016 est parfaite dans son rôle de vin aromatique et joyeusement convivial alors que le Grand Cru se présente à nous avec davantage de retenue et révèle une matière plus dense qui aura encore besoin de temps pour laisser la parole au terroir.


Alsace Traenheim 2014 : nez fin et très élégant, fruité discret (fruits blancs frais) avec une légère touche fumée, structure fuselée en bouche, toucher bien gras, finale tendue avec un sillage sur le résine et la cire.
Alsace Trovium 2013 : nez plus retenu, matière concentrée mais assez anguleuse, finale minérale très droite.

8 2 7

Voilà la cuvée d’assemblage du domaine Mochel présentée dans sa version initiale « Trovium 2013 » (50% pinot blanc + 50% pinot gris) et dans sa version actuelle Traenheim 2014 (70% pinot blanc + 30% pinot gris), dont le cahier de charge a été déposé à l’INAO par les vignerons de Traenheim.
Ce sont des blancs travaillés en barriques « à la bourguignonne » et qui affirment une personnalité assez éloignée des canons esthétiques alsaciens : même si le 2014 se montre un peu plus aimable que le 2013 à l’heure actuelle, ces deux vins semblent encore loin de leur apogée et demanderont encore quelques années de garde pour révéler leur potentiel.


Alsace Trovium 2005 : olfaction raffinée et très complexe, notes de coing frais et minéralité expressive, matière riche, structure sphérique, toucher bien gras, finale fraîche et tendue avec retour aromatique très long.

8 3 1

Goûtée à l’aveugle, cette bouteille prélevée par Frédéric dans la réserve du domaine, nous apporte la preuve que les assemblages « Trovium » ou « Traenheim » sont conçus pour se bonifier dans le temps.
Après plus de 10 ans de garde ce vin nous régale avec son aromatique subtile et complexe, son équilibre parfait en bouche et structure particulièrement élégante…MIAM !


Riesling Kaploen 2015 : nez ouvert et bien typé, agrumes mûrs et fruits blancs sur un fond légèrement terpénique, bouche surprenante avec une matière généreuse et très concentrée, équilibre moelleux, présence saline qui se révèle progressivement pour donner un caractère très digeste à la finale.

6 65

Victime de sa richesse exceptionnelle (13°8 – 33g SR – 8,5g AT), ce riesling de l’Altenberg de Bergbieten n’aura pas droit à son appellation Grand Cru mais personne ne restera indifférent devant son côté opulent et sensuel.
L’amateur de droiture devra oublier ce flacon durant quelques années en cave mais pourquoi attendre…profitons dès maintenant de cette belle friandise et allons chercher la droiture dans les autres millésimes !


Pinot Noir 2015 : olfaction un peu austère, fruits noirs, ronce et fumé léger, matière concentrée, charpente très solide mais trame tannique soyeuse, finale fraîche et salivante.
Pinot Noir 2016 : nez ouvert et bien fruité, notes de cerise très plaisantes, jus léger et particulièrement suave, finale fraîche et glissante.
Les deux pinots noirs du domaine Mochel s’expriment de façon attendue avec un 2015 dense et charpenté, résolument conçu pour être gardé quelques années et un 2016 fruité et sociable, une friandise faite pour être appréciée dans sa jeunesse mais qui n’est pas encore au tarif à l’heure actuelle…dommage !

Pinot Noir 2015 : nez discret et complexe, notes de torréfaction, tabac brun et fumée, matière concentrée, silhouette fuselée très élégante, finale tonique avec une belle mâche tannique et un fruité qui commence à se révéler.
Pinot Noir 2016 : nez très engageant, notes de fruits rouges et de noyau de cerise (kirsch), fine touche boisée, présence juteuse et bien fraîche en bouche, beaux arômes de cerise, trame tannique très lisse, finale fruitée et très digeste.
Cette nouvelle cuvée élevée en barriques (et qui n'a pas encore de nom pour l'instant) est issue d’une parcelle de pinots noirs « où les pieds de vigne produisent de petits raisins ».
Comme pour les deux bouteilles précédentes, ces vins portent nettement la marque des deux millésimes mais il est évident que ces cuvées sont travaillées avec un surcroit d’ambition qui leur apporte davantage de fond et de complexité

9 57
Les pinots noirs du domaine Mochel : une cuvée commercialisée et 3 qui attendent leur heure.


Riesling Grand Cru Altenberg de Bergbieten V.T. 2014 : nez intense sur l’ananas rôti et les épices douces, jus riche et suave mais équilibre bien tonique, finale digeste, sillage fruité d’une longueur remarquable.
Riesling Grand Cru Altenberg de Bergbieten V.T. 2015 : nez mûr et profondément fruité, matière juteuse à la fois douce et sapide, finale longue et épicée.

10 56

Ces deux cuvées moelleuses qui m’ont impressionné par leur buvabilité montrent pourtant des caractères très différents : le 2014 s’exprime sur un registre classique et gourmand tout à fait irrésistible (11° - 99g SR – 9,3g AT) alors que le 2015 montre un caractère plus atypique – presque mosellan (8,8° - 123g SR – 8,3g AT) – tout en affirmant un potentiel de séduction comparable. Double MIAM !


En digne héritier d’une grande famille vigneronne de la Couronne d’Or, Guillaume perpétue la tradition d’excellence du domaine Mochel en produisant une gamme de vins de haute tenue grâce à une viticulture respectueuse de l’environnement (vignes labourées et utilisation de produits biologiques pour les différents traitements) et un travail précis et rigoureux en cave.
Après la rénovation de ses installations professionnelles ce jeune vigneron dispose aujourd’hui d’espaces de travail fonctionnels qui associent tradition et modernité avec une vraie cohérence. Bien évidemment, il peut encore profiter des conseils et de l’expérience de son père Frédéric qui lui a passé la main il y a quelques années mais qui est toujours encore très présent dans les vignes et dans la cave.

Pour ce qui est des vins, j’ai retrouvé avec grand plaisir le style fin et épuré qui a fait la réputation des cuvées signées Mochel : des crémants vifs et appétents – très « champenois » en fait – des vins de cépages purs et équilibrés, des rieslings de l’Altenberg qui brillent par leur énergie minérale, des cuvées d’assemblage qui commencent à faire parler d’elles (et c’est plus que mérité !) et des pinots noirs élevés avec beaucoup de délicatesse.

Face à cette belle homogénéité, j’ai presque envie d’attribuer un coup de cœur général à l’ensemble de la gamme actuelle du domaine mais je vais quand même attribuer une mention spéciale aux deux vins d’entrée de gamme – l’edelzwicker et le klevner – dont le niveau qualitatif apporte une preuve incontestable du sérieux de ce vigneron mais surtout au riesling 2014 qui représente surement l’un des meilleurs rapports Q/P actuels dans la région.

11 57
Fin de dégustation dans le caveau du domaine Mochel…le sourire de rigueur après un bon moment de convivialité.

Mille mercis à Guillaume pour cette après-midi instructive et gourmande.

Commentaires

  • Gilbert
    • 1. Gilbert Le 29/11/2018
    Pour fréquenter pluri-annuellement depuis plus de 20 ans le domaine Mochel, je ne peux que souscrire sans réserve à ces succulents commentaires. Je partage tout particulièrement, et d'une façon générale, l'avis que les vins d'entrée de gamme méritent toujours d'être goûtés avec une attention soutenue, car ils annoncent d'emblée le talent -ou son absence- d'un vigneron. Et dans le cas des Mochel père et fils, je me donne systématiquement le plaisir de faire découvrir le edel et le klevner à tous ceux que je convie à m'accompagner chez cet excellent domaine.

    Un regret cependant concernant ces remarquables commentaires dont j'ai fait mon miel avec gourmandise : l'absence du pinot gris et surtout des gewurz AOC et GC, qui s'avèrent être d'authentiques vins de gastronomie, marqués par une élégante acidité équilibrant des SR toujours cantonnés à la discrétion -quand le millésime n'a pas été abusivement solaire- mais dont les notes épicées (gewurz) et exotiques sans exubérance forment des associations insolites et atypiques (saumon fumé ; escargots au beurre aillé ; boudin noir aux pommes, etc)...

Ajouter un commentaire