Périple sudiste 2015 - Visite au domaine Supply-Royer à Arboras

« Institué depuis l’année 2011 ce périple printanier me conduit à abandonner lâchement femme et enfants pendant plusieurs jours pour assouvir mon coupable penchant de picoleur mondain dans les vignobles ensoleillés du sud de la France » : voilà ce que je disais en 2014 pour contextualiser cette escapade vinique et je ne vois pas ce que je pourrais rajouter cette année…bref, j’ai profité de mes congés scolaires du mois de mai pour rencontrer des amis et boire quelques bons canons, un point c’est tout !

Pour commencer, j’ai prévu d’agrémenter mon voyage aller vers Port Camargue par une petite boucle autour de la colline de l’Hermitage qui va me permettre de faire une deuxième visite au domaine Fayolle à Gervans.
Le lendemain, je vais me rendre au
Mas de Daumas Gassac, étape obligée depuis de longues années, mais aussi au pied du Pic Saint Loup pour un premier rendez-vous à l’Ermitage du Pic Saint Loup.
L’emploi du temps des deux jours suivants sera pris en charge comme d’habitude par l’ami Dany Jaffuel, guide irremplaçable dans les vignobles du Languedoc-Roussillon : une matinée et un repas de midi à Arboras chez les Supply-Royer une soirée en compagnie de Nadia et Cyril Bourgne de La Madura et une journée de samedi à Calce où
« Les caves se rebiffent »…je crois qu’il va falloir s’accrocher !

Hoppla, c’est parti !

 


Domaine Supply-Royer à Arboras
 

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Des vignes au sortir de Montpeyroux et Arboras au loin.

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Arboras au printemps 2015


Pour ma 7° visite au domaine Supply-Royer, je vais être rejoint par Dany et Eddy accompagnés de leurs épouses, qui ont choisi de profiter de ce jour férié (on est le 8 mai) pour passer du bon temps du côté d’Arboras.
Nous commencerons par une dégustation apéritive dans la cave du domaine avant de nous installer sur la placette du village pour partager un déjeuner « Tartines » avec les vignerons.

La première phase du programme de cette journée se déroule dans la cave des Supply-Royer où Eric et Marie-Ange nous présentent leurs cuvées 2014 encore en cours d’élevage ainsi qu’une partie de leur gamme de 2013 en bouteilles.
Eric nous parle brièvement du dernier millésime « proche des deux années précédentes avec pas mal d’eau…ce qui nous donne des équilibres très frais dans les vins ».
La vendange a pourtant été une véritable épreuve de force puisqu’il a fallu rentrer les raisins avant les intempéries annoncées par Météo-France « nous avons réuni 21 coupeurs le dernier jour pour vendanger le bourboulenc, le carignan et le mourvèdre »…le jour d’après de terribles orages ont éclaté dans la région…OUF ! Le volume global est en baisse par rapport à 2013 (6200 bouteilles au lieu de 7000) mais la production de vins blancs a augmenté, elle passe de 900 à 2000 bouteilles…les amateurs vont être ravis !
Bon, assez parlé quantité, place à la dégustation pour nous faire une petite idée de la qualité de ce millésime 2014.

Le Bourboulenc de Nega Saumas : nez fruité très frais, boisé noble mais un peu marqué, matière svelte en bouche, acidité vive et profonde, finale tonique avec un sillage aromatique citronné et vanillé.
Soutiré il y a quelques jours, ce vin est sûrement encore un peu « bousculé » aujourd’hui et pourtant on peut déjà deviner son futur profil : tendu et très profond, peut-être un peu plus bourguignon que languedocien il jouera la carte de l’élégance et du raffinement.

La Roussane du Bramaïre : olfaction complexe, notes de fruits jaunes frais avec une petite touche résineuse, équilibre très gourmand entre richesse et acidité bien mûre, toucher gras et sillage fruité agréable en finale.
En raison des conditions de vendanges très particulières, la roussanne a bénéficié d’un traitement inhabituel puisque les raisins ont été pressés dans le pressoir pneumatique du domaine de l’O (alors que les bourboulencs ont été pressés comme d’habitude dans un pressoir vertical).
Même si ce vin a été soutiré en même temps que le précédent, il semble bien mieux en place et se présente à nous avec une suavité et une gourmandise irrésistibles. MIAM !

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Première série Supply-Royer avec les vins de 2014 en cours d’élevage

Le Grenache du Badaïre : nez ouvert et charmeur, notes de chocolat amer et fruits rouges bien mûrs (cerise bigarreau), matière ronde en bouche, grain tannique bien souple, fruité épanoui, finale rafraîchie par une fine touche acidulée.
Issu d’une jeune vigne plantée sur un sol très filtrant, ce grenache juteux et expressif est bien placé pour tenir le rôle du séducteur dans la gamme 2014 du domaine.

Le Grenache de Costas : olfaction un peu plus discrète mais qui développe une palette proche du grenache précédent, matière dense et riche en bouche, tannins plus serrés mais bien mûrs, toucher soyeux, finale très longue, fruits rouges et épices.
Cette cuvée issue d’une parcelle de vieilles vignes sur un sol plus argileux s’exprime plus timidement au premier abord mais en bouche on sent tout de suite un surcroît de puissance et de complexité.
Avec le Badaïre pour le plaisir immédiat et le Costas pour la garde, les Supply-Royer nous proposent une paire de grenaches très complémentaires !

Le Mourvèdre des Crouzets : nez profond et délicat, myrtille, encre, touche de goudron, bouche assez légère, silhouette longiligne très élégante, finale encore un peu brouillée avec quelques notes végétales.
« Aléa jacta est », cette fois ci c’est officiel, 2015 sera le dernier millésime de mourvèdre du domaine Supply-Royer. Sentence irrévocable prononcée par Eric :
« La vigne vraiment trop malade (esca) a produit une pièce de vin…elle sera arrachée après la vendange 2015 ».
La cuvée 2014 se présente actuellement de façon un peu atypique mais ce vin va bien au-delà de l’analyse sensorielle en me procurant comme chaque année une intense émotion gustative.

La Syrah de Pey Cherres : nez très charmeur, notes de poudre de cacao amer, touche de violette, matière charnue, tanins très fins et équilibre digeste, sillage aromatique long sur les épices douces.
En 2014 la parcelle de Pey Cherres a reçu la visite de sangliers gastronomes qui ont visiblement apprécié la qualité des raisins puisqu’ils en ont boulotté un bon tiers : « au final il restait de quoi produire deux pièces et demie ».
C’est d’autant plus regrettable que sur 2014 la cuvée historique du domaine est particulièrement réussie : une expression aromatique typée mais complexe et un équilibre très digeste. MIAM !

Les Intillères : nez pur et très complexe, notes fruités (mûre, groseille rouge…) et florales, bouche fuselée, équilibre tonique et finale longue et délicatement minérale.
Comme d’habitude, les vieux carignans des Intillères ont permis à Eric Supply d’élaborer un grand vin languedocien qu’on pourra garder précieusement en cave mais qu’on pourra également déboucher plus rapidement pour profiter de sa parfaite gourmandise actuelle. MIAM !

Après cette première série, nous passons à la dégustation des vins rouges de 2013 :

LeGrenache du Badaïre : nez fruité bien frais, bigarreau et groseille rouge, matière ample et charnue, tanins serrés mais bien mûrs, finale opulente et discrètement poivrée.
Le Grenache de Costas : nez riche et complexe, notes de prune, de chocolat noir, bouche ronde et juteuse qui laisse une impression de douceur, presque un peu sucrée, finale longue mais avec une pointe de chaleur.
Avec sa matière fruitée douce et très généreuse, Costas exprime son caractère sudiste avec une certaine véhémence. Plus frais dans sa palette aromatique comme dans son équilibre, le Badaïre paraît plus harmonieux à l’heure actuelle.
En tous cas, ces 2 cuvées nous offrent des interprétations très différentes mais pleinement réussies de grenaches languedociens.

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Suite de la dégustation avec les vins de 2013 en bouteilles.


Le Mourvèdre des Crouzets : nez expressif, fruité bien agréable, notes de figue fraîche avec une touche d’herbes de garrigue, bouche concentrée, très chocolatée, tanins soyeux et finale précise et bien tonique.
La rarissime cuvée de mourvèdre est conforme à sa réputation et étonne toujours autant par l’originalité de sa palette et l’énergie qui se dégage de sa matière en bouche…la sombre beauté d’un grand vin né sur une parcelle malheureusement à bout de souffle.

La Syrah de Pey Cherres : très belle expression olfactive, fruité mûr et complexe, matière équilibrée, silhouette élégante tenue par une ligne acide très fraîche, minéralité raffinée qui pointe en finale.
Malgré sa mise récente (il y a 15 jours) cette syrah se laisse approcher très facilement et s’exprime avec beaucoup d’harmonie. J’ai l’impression que depuis quelques années cette cuvée gagne en finesse avec un équilibre plus léger et plus digeste et un élevage de mieux en mieux intégré. MIAM !

Les Intillères : nez flatteur et complexe, notes de cacao amer, d’épices douces, d’herbes aromatiques, matière longiligne mais consistante, équilibre très fin, mâche gourmande et finale sapide et bien glissante avec des nuances minérales qui commencent à se montrer.
Avec son aromatique expressive, sa présence très sensuelle en bouche et sa fine empreinte minérale, la cuvée Intillères 2013 assure fièrement sa place au sommet de la gamme des Supply-Royer. MIAM !

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Nouvelle forme de bouteille pour les Intillères.

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Le reste de la gamme Supply-Royer 2013 dans ses flacons traditionnels.

Une petite dernière pour finir :

Le Grenache du Badaïre 2011 : nez bien mûr et très flatteur, attaque très ronde en bouche, matière juteuse bien concentrée, finale étonnamment austère avec une virulence tannique inhabituelle qui laisse une impression de sécheresse.
Ce vin qui a étrenné un demi-muid neuf séduit au premier abord par sa richesse et sa générosité avant de se resserrer en laissant une impression de dureté en fin de bouche. Le passage en bois neuf a sans doute affecté une matière première très belle à la base mais pas assez solide pour digérer son élevage…dommage !


La visite à Arboras s’est terminée comme d’habitude par un repas servi au « Café atelier des hommes d’argile » où Gilles prépare de copieuses assiettes de salades et tartines à base de produits locaux, le tout arrosé par quelques bouteilles apportées par Eric et Marie-Ange…grand moment de convivialité sous le soleil !

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Une joyeuse tablée installée sur la placette d’Arboras

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La vie est belle dans le sud !

Les 7 références de la gamme du domaine portent la marque d’un travail de grande qualité à la vigne et d’une expertise incontestable en cave. Avec le style des différentes cuvées qui s’affirme et s’affine d’une année à l’autre, l’amateur trouvera derrière chaque étiquette du domaine un vin plein et authentique qui affirme sa personnalité avec beaucoup de sincérité.
J’ai le sentiment que les élevages des différentes cuvées ont encore un peu gagné en précision et en pertinence et je constate avec plaisir que les synergies entre les jus et le bois se réalisent de plus en plus tôt sur l’ensemble de la gamme mais pour tout dire j’espère secrètement qu’Eric tentera un jour de concevoir une cuvée sans passage en fûts (sur un grenache par exemple…)…on n’est pas à l’abri d’une très belle surprise.

Depuis l’année 2008 (déjà !), la visite annuelle chez Eric et Marie-Ange fait partie des étapes que je ne raterai sous aucun prétexte : ce couple de vignerons dont je ne me lasserai pas de vanter les qualités humaines, nous régale, millésime après millésime, de vins qui ont l’accent du pays tout en montrant, de plus en plus, une vraie nature de grands crus du Languedoc.
Bien sûr, depuis le temps, notre relation a un peu dépassé le cadre du rapport strictement « commercial » et mes commentaires sont surement empreints d’une subjectivité que je revendique complètement, il n’en reste pas moins vrai que la production très confidentielle de ce petit domaine atteint des sommets qualitatifs sur de nombreuses cuvées…Goûtez et dites moi si je me trompe !

(OK…ça fait deux fois que je recycle ce paragraphe mais bon pourquoi changer un texte qui reste plus que jamais d’actualité…)

-Mille mercis à Eric et Marie-Ange pour ces beaux moments en leur compagnie et à l’année prochaine bien sûr…ou peut-être avant en Alsace !

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