Tournée estivale dans le vignoble français - Visite au domaine Supply-Royer à Arboras

Après une croisière qui m’a fait découvrir les sites majestueux du pays des fjords, j’ai eu envie de retrouver des paysages plus familiers et plus calmes en programmant un périple inédit dans le vignoble français.
Mon voyage va commencer par une journée dans le chablisien avec la découverte du domaine d’Elise et une nouvelle visite au domaine Besson.
La deuxième journée me conduira dans le vignoble du centre pour apprendre à mieux connaître les appellations Quincy et Reuilly en faisant étape au domaine Tatin à Brinay.
Pour terminer, je mets le cap au sud en direction de Vallon Pont d’Arc pour une soirée chez l’ami Cyra, avant de continuer en direction de la Méditerranée avec une visite surprise au domaine Mirabel avant mes haltes habituelles dans le Languedoc, à Daumas-Gassac et chez les Supply-Royer…mais ça vous l’aviez deviné, non ?
Hoppla c’est parti !

Jour 4 : Languedoc

Visite au domaine Supply-Royer à Arboras

Depuis quelques années mes périples viniques comptent quelques étapes vraiment incontournables, en Alsace et en Bourgogne bien sûr, mais aussi dans ce Languedoc que je visite avec de plus en plus de plaisir et où le passage obligé « number one » se situe à Arboras chez mes amis Marie-Ange et Eric que suis très content de présenter aujourd’hui à Cyril l’ardéchois.

Première rencontre entre Cyril l’ardéchois et Eric le languedocien.

Cette année nous allons commencer par une dégustation en cave avant de faire une rapide tournée dans les vignes pour terminer comme toujours par un moment de convivialité autour d’une table…et aujourd’hui ce ne sera pas sur la placette d’Arboras – pour cause de marché nocturne – mais dans un restaurant de Saint Saturnin de Lucian.

Un joli comité d’accueil dans le cave Supply-Royer

Nous commençons par déguster les 7 cuvées nées en 2015.
« Un millésime très sec qui a engendré deux types de vins : ceux issus de cépages précoces qui sont assez riches et ceux issus de cépages plus tardifs, récoltés après les pluies de septembre, qui vont présenter des équilibres plus frais ».

La Roussanne du Bramaïre : nez expressif et très engageant, matière riche et juteuse en bouche, belle fraîcheur en finale, long sillage épicé.
Même si la jeune vigne plantée par Eric a produit des fruits gorgés de soleil en 2015 ce premier vin se goûte sans lourdeur aucune et brille par une gourmandise tout à fait irrésistible.
Le secret de cet équilibre vient probablement des rangs de bourboulenc et d’aligoté – « Des raisins qui apportent de la vivacité à cette cuvée » - qui bordent la parcelle.
En tous cas je constate avec plaisir que cette cuvée dont j’ai suivi l’évolution depuis le début commence à révéler l’étendue de son potentiel et j’aime de plus en plus !

La parcelle du Bramaïre en août 2016.

Le Bourboulenc de Nega Saumas : nez discret mais très fin, petite touche de réduction, matière allongée très élégante, tension acide solide et minéralité tactile en finale.
Cette parcelle historique qui a souffert de la sécheresse en 2015 – et qui continue de souffrir cette année – a produit peu de raisins et des jus relativement compliqués à vinifier et à élever « j’ai été contraint de faire un travail sur les lies plus long que d’habitude ».
Malgré ces quelques péripéties, le bourboulenc 2015 se goûte très bien aujourd’hui : on y sent une belle tension avec une présence minérale tout à fait prometteuse…encore un peu de patience et la cuvée emblématique du domaine Supply-Royer donnera la pleine mesure de son talent.

La parcelle de Nega Saumas en août 2016 avec des bourboulencs en souffrance.

Le Grenache de Costas : nez discret, palette complexe et raffinée, corps bien charnu, texture épaisse avec des tannins souples et racés, finale sapide, sillage sur les fruits rouges bien mûrs.
Le Grenache du Badaïre : légère réduction à l’ouverture, puis beaux arômes de fruits mûrs, très belle présence en bouche, matière généreuse et belle ligne acidulée rafraîchissante, tanins veloutés, finale nette et digeste
Derniers arrivés dans la cave des Supply-Royer, ces deux grenaches ont trouvé leur identité et leur place dans la gamme du domaine : la cuvée du Badaïre séduit par la gourmandise de son jus et la spontanéité de son expression aromatique alors que les vieilles vignes de Costas on généré comme d’habitude un vin dense et séveux qui aura besoin d’un peu plus de temps pour montrer toute sa classe.

Le Mourvèdre des Crouzets : fine touche boisée à l’ouverture, beaux arômes de fruits à noyau par la suite, matière savoureuse, expression fruitée très épanouie qui persiste longuement en finale.
L’épée de Damoclès suspendue au dessus de cette parcelle depuis quelques années ne s’est toujours pas abattue sur ces vieux ceps de mourvèdre et c’est avec une intense émotion que je déguste cette cuvée absolument unique…et, comble de bonheur, Eric et Marie-Ange me confirment qu’il y aura également une version 2016.
La pétition pour sauver la vigne des Crouzets peut attendre encore un peu !

Les Intillères : notes de torréfaction à l’ouverture, palette fruitée bien mûre en fond, matière juteuse et pleine d’énergie, trame tannique solide mais très mature, finale digeste avec un grain minéral qui fait saliver.
Un peu plus robuste que ses aînés nés en 2014 et de 2013, Les Intillères 2015 reste cependant ce beau vin languedocien bien constitué qui peut déconcerter par la facilité avec laquelle il se livre dès sa plus tendre enfance. MIAM !

La parcelle de carignans des Intillères en août 2016

La Syrah de Pey Cherres : nez charmeur et complexe, notes de violette et de réglisse, fruits noirs (cassis, myrtille) en fond, sphérique en bouche, maillage tannique très soyeux, finale digeste longuement fruitée et épicée.
Magnifique de gourmandise et d’équilibre, la cuvée doyenne de la cave Supply-Royer (avec le Bourboulenc) a frappé un grand coup cette année…c’est peut-être la meilleure syrah produite au domaine jusqu’à maintenant. RE-MIAM !

Après les vins de 2015, Eric débouche quelques bouteilles du millésime précédent :

Le Grenache de Costas 2014 : nez bien en place, palette complexe, notes de chocolat noir, de mûre et d’herbes de garrigue, matière riche et suave, impression de sucrosité en milieu de bouche, finale opulente, sillage aromatique très long

Avec un an de bouteille ce Grenache de Costas commence à révéler sa personnalité toute en générosité et en expressivité mais je pense qu’i est encore loin de son apogée…feu d’artifice assuré dans 2 à 3 ans !

La Syrah de Pey Cherres 2014 : nez avenant, belle complexité, une véritable invitation à la picole, équilibre généreux, chair juteuse et bien structurée, finale riche et persistance aromatique soutenue.
Véritable « enfant caractériel » du millésime 2014, qu’Eric a gardé en cave bien plus longtemps que les autres cuvées, cette Syrah de Pey Cherres commence enfin à se livrer en montrant une belle personnalité sudiste comme on les aime…mais ça valait le coup d’attendre. MIAM !

Les Intillères 2014 : expression olfactive subtile et déjà très complexe (figue fraîche, cerise noire, épices), silhouette oblongue très élégante en bouche, retour aromatique long et particulièrement classieux.

Bon, la dégustation tire vers la fin et je ne vais pas tourner autour du goulot face à cette bouteille qui comme chaque fois (ou presque) m’éblouit par sa majestueuse beauté. RE-MIAM !

Pour finir nous dégustons une bouteille « surprise » :

Le Grenache du Badaïre 2011 : encore une pointe de volatile au nez mais belle palette fuitée bien mûre en fond, matière riche, encore un poil chaleureuse mais avec une finale prometteuse.
Goûtée pour la quatrième fois – et à l’aveugle depuis 2014 – cette cuvée se civilise tout doucement…gageons que l’année prochaine elle sera à point !

Sur la route vers Saint Saturnin de Lucian, nous nous arrêtons rapidement pour voir la parcelle de carignans des Intillères et la nouvelle plantation de bourboulencs et de chenins du domaine.

Les rangs de jeunes vignes de chenins et de bourboulenc du domaine Supply-Royer


Un pied de carignan sur les Intillères


Le câprier des Intillères…


…avec des fleurs superbes aux arômes envoûtants.

Nous continuons par une visite de la parcelle du Bramaïre et de Nega Saumas où les bourboulencs commencent vraiment à souffrir de la sécheresse…comme toujours Eric se fait du souci mais Marie-Ange est optimiste.
D’ailleurs, je sens des gouttes de pluie (c’est véridique), il est temps d’aller se mettre à l’abri au restaurant.

Les rangs de jeunes vignes au bord de la parcelle du Bramaïre.

La soirée se termine de la plus belle façon qui soit autour d’une bonne table – le restaurant « Le Pressoir » à Saint Saturnin de Lucian – avec quelques bouteilles apportées par Eric dont Intillères 2014 magnifique de souplesse et de complexité et le Bourboulenc de Nega Saumas 2015 qui a fait un mariage somptueux avec des filets de rougets à la tapenade.

Après 9 visites au domaine Supply-Royer et autant de comptes-rendus (ICI ou LA ou LA) il ne reste plus beaucoup de choses nouvelles à vous raconter : mon amitié pour ce couple de vignerons est intacte et mon admiration pour leur travail est plus grande que jamais.

Leurs vins sont toujours aussi remarquables et la sincérité qui émane de chaque flacon me comble à chaque fois que je débouche l’une des 7 bouteilles qui constituent la gamme actuelle du domaine.
Sur la série des 2015 dégustés ce jour, j’ai été particulièrement impressionné par la Syrah de Pey Cherres qui a affirmé un niveau qualitatif vraiment exceptionnel mais aussi par le Bourboulenc de Nega Saumas qui a montré sa haute valeur gastronomique lors de notre dîner à Saint Saturnin.
Les quelques 2014 que j’ai pu regoûter sur place – mais dont j’avais déjà « tombé » quelques quilles depuis ce printemps – se sont révélés très gourmands et très accessibles malgré leur jeunesse…même s’ils gardent leur stature de solides gaillards languedociens qui les rend aptes à bien se tenir face au temps qui passe.

- Mille mercis à Eric et Marie-Ange pour ces beaux moments en leur compagnie et à l’année prochaine bien sûr…ou peut-être avant en Alsace !