" Il était un petit Cheval Blanc, tous derrière, tous derrière…et lui devant ! "

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Les beaux jours sont de retour. Il est grand temps de revenir à une vie normale après les deux années terribles que nous avons vécues.
L'anniversaire de ma compagne est une occasion rêvée pour célébrer cette grande occasion en un lieu de charme.
L'Alsace ne manque pas de beaux établissements pour goûter aux plaisirs de la table.
Je cherchais donc un endroit calme, agréable, à la cuisine recherchée et avec possibilité de dormir sur place.
Echaudé par des expériences passées dans certains endroits pourtant étoilés (ne comptez pas sur moi pour rappeler le désastreux accueil et le service très insuffisant du Boeuf à Sessenheim), à moins que ce soit le temps qui passe qui fait que l'on revient toujours à ses anciennes amours, mais il me parût évident que le Cheval Blanc à Lembach serait un cadre tout désigné pour fêter cet événement avec nos deux enfants.

J'avais pris de soin de réserver bien à l'avance car cet établissement est très demandé.
J'avais bien entendu quelque peu réfléchi au choix des vins selon ce que choisirait ma compagne.

Lors du repas d'anniversaire à la maison, elle avait beaucoup apprécié le Grasberg 2011 du domaine Deiss, premier cru de Bergheim. Ce vin de complantation présentait un joli nez marqué par les agrumes (des nuances de pamplemousse et de pomelo avec un écrin citronné), une belle longueur en bouche avec un jus consistant mais que le temps avait joliment modelé.
L'occasion était grande aussi d'ouvrir une bouteille de Pinot noir Grande Réserve 2015 du domaine Jean-Paul Schmitt à Scherwiller, un vin magnifique avec un nez ciselé et un équilibre souverain en bouche qui prouve que l'Alsace sait aussi produire de très beaux rouges

Après avoir été fort bien accueilli et nous être installés à l'hôtel, nous sommes allés profiter de la paisible piscine avant de dîner au restaurant gastronomique le soir.

Comme je l'avais demandé, nous avons eu droit à une table dans une alcôve où j'avais d'ailleurs dîné un soir avec des amis d'un club de vin il y a de cela au moins 20 ans…autre soirée mémorable où nous laissâmes Bernard Reiss choisir avec précision moultes flacons dont un étonnant vieux riesling de la cave de Pfaffenheim et un magnifique Rasteau Les Argiles Bleues du domaine Beaurenard. C'était une époque bénie où l'on pouvait encore s'offrir des flacons de ce domaine…

Ma compagne choisit le menu « Balade en Alsace du Nord » et nous voilà partis pour une soirée dégustation.
Notons, c'est assez rare pour le souligner, que les enfants ont droit à leur carte avec des dénominations pleines de malice comme «  Sacha le foie gras » «  ou « Aglaé la volaille en filet », « Hansele les spätzele ».

Pour l'apéritif, le nouveau sommelier (originaire de Lyon et depuis 4 jours seulement en Alsace) nous propose un verre de Muscat 2020 du domaine Meyer-Fonné, granite de Katzenthal. Le nez est marqué par des notes fruitées et des épices (orange, cannelle). La bouche est équilibrée, de bonne longueur avec une acidité légère, une belle vivacité et une fine amertume finale.

Je me plonge dans la lecture de la somptueuse carte des vins. Elle propose un grand choix et notamment avec plein de bouteilles pour tous les budgets (ce n'est pas le cas partout). Je pensais choisir des demi-bouteilles de vin d'Alsace mais le choix est fort restreint comme très souvent dans les restaurants. Fort heureusement le sommelier très à l'écoute, vient à la rescousse et nous propose une bouteille de blanc capable d'accompagner quasiment tout le repas. Il s'agit d'un Châteauneuf du Pape blanc 2018 du domaine Saint-Préfert que nous adoubons au plus vite !
Notons que le sommelier viendra souvent contrôler la température du vin et n'hésitera pas à le carafer et le sortir du seau pour le servir à la bonne température (là ou d'autres laissent se figer les bouteilles dans une mer de glace et le servent dans des conditions déplorables comme au Boeuf à …).

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Il reste bien sûr à choisir de quoi accompagner l'agneau de lait de la ferme Huchot aux épices tandoori.
Et c'est là que l'on va voir que le manque de demi-bouteilles n'est pas si dramatique. J'avais eu l'occasion de déjeuner avec Pierre et les deux compères de la Vinoterie à la Wantzenau, ancien sommeliers passés notamment par le Crocodile. Leurs précieux conseils avaient confirmé mon choix de ne pas opter pour la formule de vins au verre et de lui préférer de belles quilles. Le sommelier du Cheval Blanc nous propose un verre de Côte-Rôtie Fructus Voluptas 2018  de Jean-Paul Jamet. Ca ne se refuse pas !

Place donc aux agapes !

L'Alsace en quelques petites bouchées me permet d'apprécier un délicieux cône au foie-gras et de goûter quelques grains de caviar de hareng. Jolie entrée en matière !

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Puis vient l'œuf de caille poché à la diable, pommes paille aux aromates. Tout est finement dosé et le Saint -Préfert blanc accompagne délicatement ce plat.

Le bœuf d'Alsace mariné, crumble à la tomme Neubourg et crème glacée au maïs bio est étonnant. Mais l'accord avec le vin se fait bien. Les notes de fleurs au nez et le côté salivant et délicat du vin font mouche.

Vient enfin le vrai test pour le Saint Préfert : la raviole de fois gras poêlé aux champignons des bois, émulsion de truffes noires, râpé de truffes fraîches. Comme annoncé par le sommelier, le Saint Préfert est à la hauteur. Ce plat est magnifique et son équilibre avec ses multiples et délicieuses saveurs diabolique ! Bravo au chef ! La belle longueur du vin et sa constitution épicée soulignent fort bien les différents registres de ce plat.

L'omble chevalier d'Alsace du Nord, avec une délicate mais fort goûteuse sauce aux carottes pour moi, nous permet de profiter d'un dernier verre de ce Châteauneuf du Pape blanc qui a très bien rempli son rôle. Isabel Ferrando a magistralement vinifié cette cuvée constituée de seulement deux cépages : 60% de clairette et 40% de roussane !

Comme on s'en doute, le Fructus Voluptas est une explosion d'un très joli fruit au nez et en bouche. Des notes fumées et de la fraîcheur se dégagent du verre. Beaucoup de matière, un beau corps, une fine acidité . Un vin très ciselé avec une très belle longueur. Il fallait au moins ça pour magnifier l'agneau de lait aux épices tandoori qui brille de mille feux.

Lors de chacun de nos passages, nous avions pu apprécier le talent du chef, Pascal Bastian mais il me semble que sa cuisine a gagné en maturité et que le dosage des épices et autres saveurs est d'une grande justesse.
Après une belle assiette de fromages de la maison Lohro pour profiter encore du verre de Côte-Rôtie, vient la mousse légère aux fraises d'Alsace et son sorbet à l'aspérule odorante.
Dessert qu'avait choisi ma fille, sur mon conseil, et elle n'a pas regretté son choix.
Je demande un verre de vin pour l'accompagner.
On me sert un Gewurztraminer Grand Cru Steinklotz 2012 du domaine Fend à Marlenheim. Choix audacieux car ce gewurz est sec et ne conviendra pas à tous les palais. Pour ma part, je trouve qu'il propose un joli accord subtil avec le dessert grâce à ses notes poivrées et épicées et sa fort bonne longueur.

Les gourmandises du cheval Blanc concluent de jolie manière ce très beau repas.

Tout comme lors de l'excellent petit-déjeuner du lendemain, il faut souligner la très grande qualité du service orchestré par Madame Bastian. Bravo !

On en vient tout naturellement à se demander comment le Michelin ou d'autres guides gastronomiques peuvent encore attendre avant de porter cet établissement au firmament de la cuisine régionale ou hexagonale ?

Notre région ne comporte toujours pas de 3 étoiles Michelin … Je ne suis pas le seul à trouver cette situation bizarre.

Philippe PISTER - 21 mai 2022

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